Tel Aviv. Que n’entend-on pas sur cette ville depuis des années ! Festive, tolérante, ultraculturelle…, la cité méditerranéenne semble prise dans un tourbillon transcendé par l’incertitude du lendemain. Un seul mot d’ordre : vivre ! Depuis trois ans, l’un des quartiers en vue s’appelle Sarona. Dressé de buildings, ce secteur historique a vu rénover ses maisons, vestiges d’une colonie protestante allemande du XIXe siècle. Restaurants, commerces et pelouses lui donnent un côté propre pour clientèle aisée que l’on retrouve aussi sur le port, autre lieu d’animation nocturne, avec hangars et entrepôts recyclés en bars, terrasses et boutiques de designers. Rien à voir avec le vieux quartier Newe Zedeq, sorte de Marais branché investi par les cafés culturels. Ni avec les secteurs Bauhaus et Art Déco, témoins d’une fière épopée architecturale dans les années 1920-1930.
Pour apprécier cette ville en mouvement, fondée en 1909 par des pionniers juifs – l’exposition gratuite à la Shalom Tower dit tout sur sa genèse –, rien de tel qu’une virée sur le front de mer. Bordé d’immeubles blancs dansant sous la chaleur moite, c’est ici que bat le pouls balnéaire de Tel Aviv. Plages, expos en plein air, promenades drainent la foule à toute heure.
Les vignes et la mer qui recule
La route de Tel Aviv à la mer Morte est d’une autre nature. Elle traverse une partie de la Judée, territoire palestinien occupé – ou libéré, selon la dialectique de l’État hébreu… À droite, l’Ela Valley est l’épicentre de la vigne israélienne. Depuis dix ans, le tourisme viticole, avec visites de domaines et de caves, s’accroît. Les vins sont excellents. À gauche, des chantiers signalent les travaux de la nouvelle voie ferrée Tel Aviv-Jérusalem. En 2018, elle reliera les deux villes en 28 minutes.
La descente vers la mer Morte est fascinante. De 800 m, hauteur du « plateau » de Jérusalem, la route plonge jusqu’à la cote –400 m, point le plus bas du monde. 1 200 m de dénivelé à travers un décor de rocaille écrasé de chaleur où seuls quelques Bédouins élèvent un maigre bétail. Ici, le tourisme est en vitesse de croisière : la vingtaine d’hôtels de la station d’Ein Bokek attirent locaux et étrangers pour le traditionnel bain flottant salé et les soins minéraux aux spas. Seule « nouveauté », inquiétante : le recul de la mer Morte, jusqu’à 1 m par an, à cause de la surexploitation du fleuve Jourdain et de ses affluents. Des hôtels « pieds dans l’eau » sont désormais situés à plusieurs dizaines de mètres du rivage…
Le creuset des religions
A Jérusalem, que l’on soit croyant ou non, l’immersion laisse des traces. L’enchevêtrement des pierres et des religions est ici poussé au paroxysme. Comment être insensible à l’émotion des Chrétiens quittant, en larmes, le tombeau du Christ, dans l’église du Saint-Sépulcre ? Comment rester de marbre devant ces Juifs hassidim psalmodiant et chantant, presque extatiques, au pied du Mur Occidental ou au tombeau du roi David ? Comment ne pas être saisi lorsque se mêlent dans le ciel le son des cloches de l’abbaye de la Dormition et les appels à la prière musulmane venus de l’Esplanade des mosquées ? Comment ne pas déceler ces indices qui trahissent le passage soudain, dans la vieille ville, du quartier juif au quartier musulman, du secteur chrétien à celui arménien ? Et comment ne pas poser mille questions sur la politique, la vie quotidienne, les tensions religieuses, les gestes extrémistes et ces vies cloisonnées entre murs de séparation, colonies et frontières invisibles ?
La force d’attraction de la ville sainte n’échappe pas aux investisseurs hôteliers. Au-delà des problèmes récurrents de sécurité, des projets avancent. Le très lifestyle Mamilla Hotel et le Waldorf Astoria (Hilton), inauguré en 2013, ont donné le ton. En cette fin d’année ouvre le Brown Jérusalem (boutique-hôtel). En 2017 sont aussi attendus l’hôtel W Jérusalem, l’Orient Jérusalem et le Four Seasons… après 20 ans de travaux. Mais qu’est-ce que 20 ans quand on est une cité de 4 000 ans d’âge ?
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