Île de Santo Antão, village de Janela. Dans la touffeur d’une matinée de septembre, le chemin empierré de lave grimpe en lacets depuis l’océan vers des hauteurs embrumées. Bientôt, des maisons sommaires, aux toits de palme et de bananiers, un hameau, une école, de vieilles femmes édentées ramassant du linge… Plus haut, des hommes courbés binent la terre, nivelée sur des terrasses étroites. Ignames, manioc, blé, maïs, tabac, café… tout pousse sur ces versants gorgés de pluie. Ainsi va la vie agricole – pauvre mais pas miséreuse – dans les hauts de Santo Antão, accessibles seulement, ici et là, à la force des mollets.
L’île montagneuse, la plus à l’ouest de l’archipel (à 580 km du Sénégal), est la star du Cap-Vert, avec ses décors grandioses et son humanité souriante. De Porto Novo à la capitale Ribeira Grande, la Corda, route historique pavée, traverse l’île par la montagne. Sous les odeurs de pins mêlées de celles des poivriers à baies roses, l’itinéraire longe Cova, un ancien cratère volcanique au sol fertile découpé en parcelles. Plus loin, le cirque de Delgadinho livre ses parois vertigineuses. La vallée de Xoxo (prononcez Chocho) déborde de luxuriance, sur fond de pitons acérés. Et le village de Punta del Sol, accessible par une spectaculaire route de falaise, plonge vers l’Atlantique dans une nonchalance apaisante. Cette île a des airs de Madère, en témoigne la route qui revient par la côte jusqu’à Porto Novo : roche noire volcanique d’aspect friable, villages et hameaux de rivage aux maisons colorées ou grises (Sinagoga, Paul, Praia de Gi…), vagues de l’océan giflant le sable noir.
L’autre côté de l’île est à l’unisson, dans une version aride mais aussi spectaculaire. Il faut pousser jusqu’à Alto Mira, village de montagne cul-de-sac perdu dans un décor de rocaille. Ici, les terrasses cultivées sont des œuvres d’art et l’on broie encore la canne à sucre dans des trapiche, machines entraînées par deux leviers en bois tirés par des bœufs.
Balade musicale
Pour aller à Santo Antão, accessible seulement par ferry, en une heure, il faut passer par São Vicente. Une chance, puisque cette île est considérée comme le creuset culturel et musical de l’archipel. Sa capitale Mindelo est le berceau de la chanteuse Cesária Evora, dont l’ombre plane partout en ville. Afin d’apprécier la musique, il faut se rendre dans les esplanadas. Le long de la plage de Laginha, ces bars-terrasses vibrent chaque week-end au son des groupes de coladeira, morna et funana, rythmes cap-verdiens empreints de nostalgie ou de gaîté, auxquels s’ajoutent bossa-nova, reggae, zouk…
Au-delà, São Vicente mérite le détour. Toujours à Mindelo, au bord de l’océan, le marché aux poissons bruisse d’échanges vifs, entre les étals de garupes, serras, tunas… Il est posé à côté d’une réplique de la tour de Bélem, rappel de l’histoire portugaise du Cap-Vert, soit plus de cinq cents ans de colonisation (1456-1975).
Hors la ville se dévoile un univers de villages et de côtes du bout du monde, comme le long de la route reliant Calhau à Baia das Gatas, siège d’un festival de musique aoûtien très prisé. Tourné vers l’Afrique, ce littoral subit les assauts du vent charriant le sable sahélien, formant des dunes spectaculaires. Sur l’île, les villages de mer sont pauvres, comme São Pedro, près de l’aéroport, ou Salamansa, avec ses maisons de parpaings sans eau courante et sa population désœuvrée.
Sauts de puce
Ceux qui se posent à Sal, porte aérienne de l’archipel, et ne font qu’y rester – en général une semaine – peuvent avoir des regrets. Certes, l’île, plate et désertique, porte les plus beaux établissements du pays, à Santa Maria. Plus de dix hôtels all inclusive soutiennent le tourisme, les Oasis, Riu, Melia… Et les projets se multiplient. De quoi séduire les fans de plages, de sports nautiques et d’animation... et donner des emplois aux Cap-Verdiens, dont la diaspora (Brésil, Europe, États-Unis…) subvient aux besoins des familles restées au pays. Mais Sal n’est pas tout le Cap-Vert et l’archipel, si divers – citons aussi Fogo, Santiago, São Nicolau… –, mérite une découverte en sauts de puce. Aux défricheurs, il offre encore de splendides terrains d’exploration.
Dans votre bibliothèque
« Deux par deux »
« Notre Santé est en jeu »
Quelles solutions face au déclin du système de santé ?
Dans votre bibliothèque
« Le Bureau des affaires occultes », ou les débuts de la police scientifique
USA : frites, bière, donuts gratuits… contre vaccin