Vous connaissiez Cracovie ? Vous allez découvrir Wroclaw (prononcer « Vrosouaf »), 630 000 habitants, capitale de Basse-Silésie, à mi-chemin entre Berlin et Varsovie (350 km). À ceux qui mettent dans le même sac toutes les villes d’Europe de l’Est, prétendument truffées de patrimoine baroque, d’églises et de jeunes femmes agréables, nous disons : c’est vrai. Mais si les mêmes sont curieux d’Histoire et d’évolution urbaine, ils découvriront aussi ce qui n’existe pas ailleurs en Pologne : un passé et une géographie fluviale singuliers et un punch économique que vient couronner son titre de capitale 2016.
Côté symboles, la ville peut prétendre aux honneurs. Si toutes les cités polonaises sont bâties autour de leur rynek (place centrale), encadrée d’immeubles de styles baroque et Renaissance, la place de Wroclaw joue les premiers rôles. Une taille immense, des façades pastel, la richesse de l’ancien hôtel de ville (XIIIe-XVIe siècles), une diversité architecturale (classique, Renaissance, baroque, néobaroque, Bauhaus…), l’animation des terrasses en font, aux beaux jours, une agora à laquelle il est difficile de se soustraire. Ailleurs, les rues le prouvent : demeures de briques rouge, vastes bâtisses académiques et quelques vestiges médiévaux constituent le fonds de commerce d’une métropole au patrimoine riche et éclectique.
Nous parlions des églises. Elles sont plus de 100 dans la ville d’un pays catholique qui vénère Jean Paul II, premier pape polonais. À chaque quartier son sanctuaire. Le symbole reste toutefois la vue sur l’île de la Cathédrale, depuis les rives de l’Oder : les flèches jumelles de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste et celle de l’église Sainte-Croix se dressent fièrement au-dessus des bâtiments à tuiles rouges des congrégations de prélats. Quant aux jeunes femmes, gageons que leur beauté ne laisse pas insensible les chanoines. Laissons aux visiteurs le soin d’apprécier…
Douze prix Nobel
Wroclaw est aussi une ville qui tente de faire de son histoire un tremplin. Polonaise ? Oui, mais depuis 1945 seulement. Germanisée de longue date, elle a connu les dominations tchèque, austro-hongroise, prussienne. La Breslau allemande d’avant-guerre a vu sa population chassée par l’armée russe au sortir du conflit, remplacée par des Polonais déplacés depuis l’ouest ukrainien. Un « jeu » de dominos symbole d’une identité neuve pour une cité qui avant 1939-1945 accueillait protestants, catholiques et juifs (ces derniers furent jusqu’à 30 000, il reste une synagogue). De l’Université sortirent 12 prix Nobel, tandis que la halle du Centenaire (Hala Stulecia) montra en 1913 l’audace architecturale dont étaient capables ses ingénieurs. Pas étonnant, au final, si tant de monde se précipite aujourd’hui au Raclawice Panorama, peinture en cinémascope (120 m sur 15 !) rappelant la victoire de l’insurgé Tadeuz Kosciuszko sur l’armée russe en avril 1794, symbole de la résistance polonaise face aux puissances voisines.
Cette ville joliment bâtie sur l’Oder, formant des bras entre 12 îles et 120 ponts, est donc « différente ». Dans une Europe de l’Est convertie à l’économie libérale, Wroclaw affiche un taux de chômage inférieur à 5 %. L’informatique s’y porte bien. La proximité de l’Allemagne est un atout. Symbole de cette modernité : la Sky Tower, l’une des plus hautes tours de Pologne (212m). Elle abrite des bureaux et un centre commercial.
Le titre de Capitale européenne de la culture 2016 concrétise un allant perçu dans les commerces et la jeunesse, plutôt polyglotte et avenante. Plus de 500 événements festifs sont attendus. L’aménagement des bords de l’Oder, l’ouverture d’un Forum national de la musique, deux nouveaux musées (théâtre et littérature), des quartiers revisités (Nowe Zerniki, Nadodrze, Psie Pole…) s’ajoutent au musée d’Art contemporain, à la moderne bibliothèque de l’Université et au gracieux pont suspendu sur l’Oder déjà livrés.
Les curieux auront raison d’être… curieux, en découvrant Wroclaw.
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