Traquant le frémissement d’une fleur, la rudesse d’un sentier, la douceur d’une prairie d’altitude, Marc Leclercq sait donner du temps à la nature, aux plantes et même aux hommes. Ce Lourdais de 62 ans, arpente ses Pyrénées comme son officine, avec un farouche besoin de liberté et une fidélité à ses valeurs.
Des valeurs acquises auprès de son père, patron d’un atelier industriel de tissage de linge basque : « Il maîtrisait toute la fabrication, du fil de coton au produit fini, se souvient-il. Avec lui, j’ai tissé des kilomètres de linges… » Parallèlement, il découvre les grands espaces pyrénéens, chausse ses premiers skis à 3 ans… De cette proximité avec la nature naît son désir de devenir vétérinaire, mais il échoue. Peu attiré par la médecine des hommes, il choisit Pharmacie : « C’était pour moi d’un abord facile, j’aimais la physiologie, la botanique… » Diplômé de la fac de Toulouse en 1980, Marc Leclercq multiple les expériences : la recherche en pharmacologie, qu’il abandonne pour « rester maître de sa destinée » ; l’hôpital où il travaille en toxicologie, à Toulouse, puis à la pharmacie à Lourdes : « Je n’avais pas une âme de fonctionnaire, précise-t-il. Je préfère exercer en libéral, être mon patron, maîtriser ma boutique. » Le voilà donc remplaçant en officines jusqu’en 1986, où il reprend la pharmacie de la Place Marcadal, au cœur de Lourdes. Une petite officine* qu’il n’a pas quittée depuis 32 ans et où d’autres passions l’ont accompagné.
Photographe reconnu
À commencer par la photographie : « Tout gamin, je ne sortais jamais sans mon Canon, explique-t-il. Très vite, je me suis fait un laboratoire pour développer du noir et blanc, vivre la magie de la révélation… » C’est la même volonté qui le pousse aujourd’hui, à l’heure du numérique, à maîtriser ses images, de la prise de vue à l’impression et l’encadrement.
Une passion d’artisan pour la photo de nature et surtout de fleurs : « Souvent, je pars à 5 heures du matin pour 3 ou 4 heures de voiture, puis 7 heures de marche, pour photographier une seule plante… » Artiste reconnu, Marc Leclercq expose régulièrement ; ses sites Web** très visités, rassemblent plus de 3 000 photos, dont une collection exceptionnelle de 900 fleurs des Pyrénées.
C’est justement une fleur qui a fait basculer sa vie dans une seconde passion : « Il y a 30 ans, ma femme m’a offert une orchidée. Avec un ami de Tarbes nous avons commencé une collection qui est devenue l’une des plus importantes de France avec plus d’un millier de variétés ! C’est une école de patience et d’amour, car entre plantule et l’orchidée adulte, il peut se passer 15 ans de soins attentifs. Une seule erreur d’arrosage et c’est fini. »
Passion destructrice
Mais l’arrivée de nouveaux parasites contraint les deux amis à traiter chimiquement leurs protégées. Quelque temps plus tard, son ami meurt d’un cancer foudroyant : « Je ne peux affirmer que les pesticides en sont la cause, indique Marc Leclercq, mais j’ai décidé d’arrêter les traitements et beaucoup d’orchidées sont mortes. »
Ces passions ne l’ont cependant jamais éloigné de l’officine : « La profession évolue, moi un peu moins » ironise-t-il. Rien de passéiste pourtant chez ce pharmacien qui fut un pionnier de l’informatisation : « Je m’agace parfois des techniques de vente, proches de la grande distribution, de certains confrères… Quant aux valeurs de confraternité, j’ai l’impression que beaucoup s’assoient dessus… Mais je continue de lutter au comptoir, avec mes armes : accueil, disponibilité, connaissances… Je n’ai pas mis le profit en tête de mes priorités, pour mon passage sur terre, mais je ne suis pas un looser, mon officine marche bien, j’ai plaisir à retrouver mes clients, rendre service… plutôt que batailler pour un rabais de 10 centimes. »
Farouchement indépendant, il gère ses achats via un groupement informel de « quatre copains » pharmaciens de Lourdes. « La ville compte 11 officines pour 14 000 habitants, avec un centre qui se désertifie, explique-t-il. Ce contexte rend les regroupements difficiles ; les grandes officines attendent que les petites meurent… » Mais Marc Leclercq croit en l’avenir, aux nouvelles missions de l’officine et à la nouvelle génération : son fils, jeune pharmacien, pourrait un jour reprendre le flambeau…
* L’officine emploie aujourd’hui 4 personnes.
** http://marc.leclercq-serveur.com/main.php et https://500px.com/marcleclercq.
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