Dominique Cochelard est handicapé depuis l'âge de six mois, des suites d'un vaccin antivariolique. Ce qui n'empêche pas ce pharmacien, âgé aujourd'hui de 58 ans, de plaider pour les vaccinations « qui ont sauvé beaucoup plus de personnes qu'elles n'en ont tuées ». Ce Maubeugeois (Nord) est venu à Lille à la faculté de pharmacie. Après une thèse en informatique médicale, en 1987, puis un diplôme d'études appliquées (DEA), il est chargé de l'informatisation du CHR de Lille, « de A à Z ». Il met aussi en place la laser-thérapie, à titre palliatif à l'époque, pour tous les cancers.
En 1990, il est maître de conférences à la faculté de pharmacie, chargé de la bio-informatique, enseigne la physique et les mathématiques, et est responsable du diplôme universitaire (DU) d'information médicale. « Mes origines sont catholiques, mon père était animateur de paroisse. Mais le regard des autres sur mon handicap m'avait abîmé. Je m'occupais en fin de semaine de mes parents, à Maubeuge, mais je menais une vie de bringue en semaine, à Lille. Le regard des autres était trop difficile. »
À 22 ans, Dominique Cochelard tente le suicide : « Et j'ai trouvé le Seigneur. C'était une toute petite lumière, ça n'a pas été du jour au lendemain, mais un long chemin. J'ai eu un directeur spirituel, appartenu à des groupes de réflexion. Mais quand j'ai reçu la confirmation, à l'âge de 24 ans, je l'ai demandé avec mes tripes ! » La confirmation dans l'Église catholique suit habituellement la communion solennelle, qu'on reçoit vers 12 ans.
Lutte contre l'exclusion
La vie de l'ancien bringueur en est alors transformée. Il fait tout pour lutter contre l'exclusion dont sont victimes les personnes handicapées. « Je ne trouvais pas mon bonheur dans les bringues. Il me fallait fouiner ailleurs, tout faire pour aider ceux qui sont passés par là. »
Avec sa femme Marie-Astrid, infirmière libérale, ils créent l'association HandiVie, « au service de la vie, et de l'intégration ». Un groupe de théâtre est créé, les ô Parleurs, des acteurs, des handicapés, interprètent une pièce écrite par Dominique Cochelard, « ma propre expérience de vie, de 5 à 22 ans ». L'association apporte aussi des témoignages, tient des conférences sur le handicap dans les écoles, les collèges, les facultés.
« Il faut parler du handicap en termes d'inclusion, et non de problématique, répète-t-il. Traitons les handicapés comme des gens normaux. » Trois morts, des suites de leur handicap, frappent l'association, qui arrête ses activités. Mais Marie-Astrid et Dominique Cochelard continuent témoignages et conférences. Jean-Yves Grall, directeur de l'agence de santé (ARS) remettra au pharmacien enseignant l'ordre du Mérite « pour sa trajectoire admirable » contre l'exclusion des handicapés.
Ordination
Le couple vient de connaître une autre consécration, plus spirituelle, quand Dominique Cochelard a été ordonné diacre, à l'automne. « Le diaconat est une cooptation au sein de la paroisse, ce sont les autres qui vous y appellent », précise-t-il. Quand cette aventure s'est présentée à lui, et à son épouse, ils en ont d'abord parlé à leurs trois filles, aujourd'hui âgées de 25, 23 et 22 ans, adolescentes à l'époque. « Elles ont dit oui. »
Ils ont donc démarré leur formation commune, « cinq à six week-end par an », en interdiocèse (Lille, Arras, Cambrai), pour enraciner sa foi. Le diacre est le serviteur du Christ, mais « dans le monde, dans le milieu des familles, du travail, des associations ».
La maladie d'une des trois filles met la formation en stand-by, durant dix ans. En 2011-2012, ils reprennent la formation. En octobre 2016, le nouveau diacre est ordonné, avec trois autres hommes (l'Église exclut encore les femmes !), dans la cathédrale de Lille. Il avait invité à la cérémonie un collègue musulman, qui est venu et l'en a remercié.
« Le diacre a sa mission première en dehors de l'église, explique-t-il. Je m'occupe de la pastorale des personnes handicapées, de l'œcuménisme, avec les autres religions chrétiennes, du dialogue avec les autres religions. L'Église doit retrouver sa vraie place, humble, retrouver la foi, faire revenir à elle des gens blessés. » Dominique Cochelard fait tout en commun avec son épouse, Marie-Astrid. Elle donne pour lui la communion : « Elle est mes mains », trop abîmées par le handicap. « C'est une sacrée évolution que nous vivons, "grâce" au handicap, pas à cause de lui. »
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