À temps perdu, une fois tous les deux ou trois mois, un homme m'appelle du Sud-Ouest pour me vendre du vin. Je lui dis que nous n'en buvons pas, il ne me croit pas. Choc des cultures. Je ne sais pas s'il tient le registre de ses appels négatifs ; en tout cas, il me téléphone régulièrement. « Si vous ne buvez pas, me dit-il, vous devriez essayer. Vous ne savez pas ce que vous perdez ». Je lui réponds que, de toute façon, je n'aime pas les rouges bordeaux, beaucoup trop capiteux à mon goût. Erreur stratégique car il affirme qu'il dispose de crus très légers. J'essaie aussi de lui faire comprendre que j'ai mes propres addictions, contre lesquelles je lutte mollement et que, après tout, on n'a pas une cirrhose quand on boit du café. « C'est ce qui vous rend nerveux et même irascible, répond-il. Un peu de vin et le monde vous sourira ». C'est agaçant et j'ai envie de lui suggérer de boire son vin s'il ne peut pas le vendre. Je me contente d'une riposte soft : « Votre technique de vente ressemble à du harcèlement ». Je ne sais pas quand il me rappellera. Mon avis ne compte pas. Je suis un illuminé qui rejette les propositions les plus généreuses. Lui, il vend du vin.
Humeur
La sobriété est un vice
Publié le 07/11/2019
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Richard Liscia
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Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3555
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