AUJOURD’HUI désaffecté et transformé en maison de retraite, l’hôtel-Dieu de Dourdan fut pourtant, en quelque sorte, l’enfant chéri de certains grands personnages de la noblesse royale, ce qui fit dire à Joseph Guyot, propriétaire du château de Dourdan au XIXe siècle et talentueux auteur d’une chronique de la ville, qu’une « heureuse circonstance fit la fortune de l’hôtel-Dieu de Dourdan » en la venue de la grande-duchesse de Toscane, Marguerite-Louise d’Orléans. Celle-ci était la cousine germaine de Louis XIV et de son frère Philippe d’Orléans à qui appartenait alors le château de Dourdan. Pour la petite histoire, elle aimait venir chaque année chez son amie la comtesse de l’Hôpital, à Sainte-Mesme, non loin de Dourdan. Joseph Guyot nous apprend qu’elle s’enquit des pauvres malades et que « l’hôtel-Dieu de Dourdan devint le but de toutes ses promenades et le théâtre de toutes ses bonnes œuvres », tel un petit voile d’autel qu’elle broda elle-même, visible au musée du château. La grande-duchesse de Toscane insuffla ainsi un nouvel élan à l’hospice et donna le ton aux actions de charité. Les grands de la cour suivront son exemple, d’autant plus que le secours des pauvres permettait le salut de l’âme.
Mais avant elle déjà, deux reines de France, Marie de Médicis et Anne d’Autriche, avaient reçu le domaine royal de Dourdan et s’étaient également occupé de l’hôtel-Dieu en y plaçant les sœurs de la Charité sous l’obédience de Saint-Vincent de Paul et Louise de Marillac. Au XVIIe siècle, l’hôtel-Dieu bénéficia donc de bien riches bienfaitrices. Sa chapelle et ses intérieurs devaient être fort bien pourvus. Aujourd’hui, le musée du château conserve justement en dépôt les objets précieux ayant appartenu à l’hôtel-Dieu et à son apothicairerie.
Le trésor de l’hôtel-Dieu.
La salle consacrée à l’hôtel-Dieu présente de magnifiques commodes Louis XV et de nombreuses peintures de dévotion de belle facture. Merveilleuse, une Vierge à l’Enfant, dite Vierge au Perroquet, retrouvée dans les greniers de l’hospice, est un chef-d’œuvre de la Renaissance peint par le Flamand Pieter Coecke Van Aelst au début du XVIe siècle. Encore mystérieuse, on ne sait pas tout de cette Madonne. Serait-elle un don de Marie de Médicis ? Rien ne le prouve, mais l’on peut s’attarder quelques instants devant et tout imaginer. En tout cas, en écoutant les propos passionnés de la conservatrice, Isabelle Mitton-Famié, on comprend que cette œuvre est rare et que le petit musée municipal de Dourdan recèle des trésors ; c’est probablement pourquoi il fut autorisé à porter le label Musée de France, en 2003.
L’apothicairerie.
Dans la salle suivante, se poursuit la découverte de l’histoire de l’hôtel-Dieu avec l’exposition d’une belle série de pots, provenant de l’ancienne apothicairerie, dans le style de la manufacture de Nevers, dont deux pièces, probablement de monstre, présentent un décor peint particulièrement raffiné. L’apothicairerie aurait été située au premier étage de l’hôtel-Dieu, mais l’on n’a plus trace de ses boiseries. Les cinq sœurs de la Charité qui officiaient à l’hôtel-Dieu y avaient en charge la préparation des drogues, ces drogues si précieuses dont la commercialisation fut strictement réglementée, comme l’indique un arrêt de la cour du Parlement en 1786, « qui fait défense à tous marchands de la ville de Dourdan, qui ne seraient pas reçus apothicaires, de quelque nature que soit leur commerce, de tenir, vendre, et débiter à l’avenir, aucunes drogues médicinales simples ou composées [...] Enjoint aux marchands de la ville de Dourdan, ayant en leurs boutiques des drogues médicinales de les remettre incessamment auxdits Chirurgiens qui leur en rendront le prix ».
Témoins de l’histoire médicale de l’hôtel-Dieu qui soigna les adultes malades et les indigents – bien que ceux-ci furent également enfermés dès le XVIIIe siècle dans le donjon du château devenu prison ! - ces pots de faïence ont été l’objet, en 1967, du premier dépôt au musée de la collection de l’hôtel-Dieu, trois ans avant que n’ouvre le nouveau centre hospitalier en périphérie de la ville, en 1970.
Aujourd’hui, le château et son exceptionnel donjon circulaire sont de rares exemples conservés de l’architecture de l’époque du roi Philippe-Auguste, le même qui fit construire le château du Louvre. Lieu royal, Dourdan vit se succéder de grands noms de l’histoire de France tels Jeanne de Bourgogne et Étienne de Vignoles, dit La Hire, compagnon de Jeanne d’Arc, qui furent enfermés dans le donjon, ou encore Jean Sans Peur, Anne de Pisseleu, favorite de François Ier, François de Guise, Sully, plusieurs reines et rois de France…
Pendant que l’Histoire imprimait ainsi quelques-unes de ces grandes heures, les sœurs de la Charité continuaient, sans relâche, à soigner l’âme des malades en confectionnant de petites boîtes reliquaires appelées canivets, et en priant pour eux.
Place du Général de Gaulle
91410 Dourdan
Tel : 01 64 59 66 83
Horaires : du mercredi au dimanche, jours fériés inclus (sauf 25 décembre), de 10 heures à 12 heures et de 14 heures à 18 heures, sauf vendredis 17 heures Fermé première quinzaine de janvier.
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