L'étude en question reste très modeste, avec seulement 29 patients italiens enrôlés entre le 17 et le 27 mars à l'hôpital de Milan. Dans 72 % des cas, la prise en intraveineuse de hautes doses d'anakinra était associée à une amélioration des fonctions respiratoires au cours des 21 jours qu'a duré le suivi.
L'anakinra dispose d'une AMM en France sous le nom de Kineret et est indiqué en rhumatologie, notamment dans l'indication de la polyarthrite rhumatoïde, en association avec le méthotrexate. Son mode d'action consiste à bloquer les cytokines pro-inflammatoires interleukine-1.
Dans les cas les plus sévères de Covid-19, les cytokines contribuent à l'apparition d'une hyperinflammation, elle-même à l'origine des syndromes de détresse respiratoire aiguë (SDRA) qui représentent la principale cause de décès. Aussi de nouveaux traitements sont nécessaires pour améliorer le pronostic vital des personnes admises en unité de soins intensifs.
Dans l'étude italienne, l'âge moyen des patients était de 62 ans, et souffrait pour la plupart de maladies chroniques qui les classent dans les groupes à risque de développer une forme sévère de la maladie. L'intégralité des 29 patients a été admise en soins intensifs, et recevait en plus de la stratégie thérapeutique standard de cet hôpital (à savoir 200 mg d'hydroxychloroquine 2 fois par jour + association lopinavir/ritonavir), une haute dose d'anakinra en intraveineuse (10 mg/kg de poids corporel). Leurs évolutions cliniques ont été comparées à celle de 16 autres patients qui n'ont reçu que le traitement standard. Il n'y avait toutefois pas de randomisation.
Une amélioration chez 72 % des patients traités
Au bout de 21 jours, la prise d'anakinra était associée à une diminution de la concentration sérique de protéine C-reactive et une amélioration des capacités respiratoires chez 72 % des patients, et une survie de 90 %. Une ventilation mécanique était nécessaire chez 17 % des malades. Dans le groupe contrôle de 16 patients, les fonctions respiratoires s'étaient améliorées chez la moitié des patients seulement.
« Notre étude est la première à suggérer que des hautes doses d'anakinra sont en mesure d'empêcher une surréaction du système immunitaire causée par l'infection Covid-19, précise le Dr Giulio Cavalli, de l'unité immunologie, rhumatologie, allergie et maladies rares de l'hôpital de San Raffaele. Ces résultats sont intéressants, mais ils doivent être confirmés dans des essais randomisés de plus grande ampleur. »
Dans un commentaire publié dans le même numéro du « Lancet Rheumatology », le Pr Dennis McGonagle, de l'université de Leeds (Royaume-Uni), explique que « comparée à d'autres médicaments anti-interleukine, l'anakinra présente l'avantage d'avoir un fort recul concernant sa tolérance, de même qu'une demi-vie courte, ce qui le rend plus indiqué pour les patients en soins intensifs ».