Pictogramme grossesse : une fausse bonne idée à réviser

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Publié le 17/05/2019
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L’apposition de pictogrammes « médicament et grossesse » est une intention louable, mais la coexistence de deux pictogrammes, présents sur 60 à 70 % des médicaments, est une source d’inquiétude parfois infondée pour les patientes et une situation difficile à gérer pour les professionnels de santé.

Depuis octobre 2017, deux pictogrammes grossesse sont apparus sur les médicaments dont un effet tératogène ou fœtotoxique est mentionné dans le RCP : un pictogramme « médicament + grossesse = interdit » (risque avéré chez l'humain) qui concerne environ 10 % des spécialités, et un pictogramme « médicament + grossesse = danger » qui concerne 50 à 60 % des spécialités. « Au final, 60 % à 70 % des médicaments sont concernés par l’apposition de ces pictogrammes, mais seulement 10 % à juste titre, qui représentent les produits ayant un risque fœtotoxique ou tératogène avéré chez l'humain », estime Élisabeth Eléfant, chef de service du CRAT (centre de référence sur les agents tératogènes) et membre de l’Académie nationale de médecine, lors d’une séance qui s’est tenue le 15 mai à l’Académie de pharmacie.

Mais alors que le pictogramme a un objectif de prévention, on voit que le picto "danger" conduit certaines patientes à s’abstenir de tout traitement, même indispensable. De plus, la distinction n‘est pas clairement faite par les patientes entre les deux types de pictogrammes, l’un pouvant être utilisé durant la grossesse en l’absence d’alternative thérapeutique (picto danger) et l’autre pas (picto interdit). En effet, les deux logos se ressemblent (silhouette de femme enceinte dans un rond barré ou dans un triangle barré). Enfin, l'apposition du pictogramme est confiée aux firmes, sur la base du RCP, mais sans modalités d'applications claires. C'est comme cela que l'on retrouve le logo « Danger » sur l'azathioprine d'EG Labo et Téva… Et le logo « Interdit » sur l'azathioprine Mylan et le princeps Imurel !

Pour ces raisons, l’Académie nationale de médecine demande à ce que soit redéfini le périmètre du décret qui a instauré les pictogrammes grossesse : « seules les substances ayant fait la preuve de leur effet délétère pour la grossesse humaine devraient être visées par une action de communication de cette nature, avec apposition d’un pictogramme " interdit ". Pour les autres substances, aucun pictogramme ne devrait être apposé », préconisent les Sages qui indiquent que dans ce cas, « les échanges entre les prescripteurs, pharmaciens et patientes, sur la base des informations médicales et des notices devraient suffire, évitant de surcroît les effets d’alerte inutiles et contre-productifs ».


Source : lequotidiendupharmacien.fr