L’ACNÉ SÉVÈRE représente le premier acte de consultation des dermatologues, soit un quart de leurs prescriptions, et le quatrième acte des médecins généralistes. En pharmacie, l’acné représente le premier segment des soins du visage en unités vendues par an. À ce jour, 12 % des 15-69 ans ont une acné, dont 4 % une forme sévère. Celle-ci est tardive et persiste avec l’âge. « Il faut arrêter de parler d’acné juvénile, cette maladie touche de nombreux Français, ce n’est pas un mal obligé de la période adolescente qui finira par se résoudre tout seul. La sous-estimer et ne pas la traiter est une perte de chance pour le patient », insiste le Pr Pierre Wolkenstein (hôpital Henri Mondor à Créteil).
Il est d’autant plus important de la prendre au sérieux que son impact psycho-social est important (suicide, anxiété, altérations des relations familiales, amoureuses, sexuelles). Il a été démontré que le taux de symptômes dépressifs est statistiquement plus élevé chez les patients acnéiques, garçons filles, que chez les non acnéiques (20 à 51 % versus 14 à 20 %). De plus, l’acné sévère provoque des cicatrices irréversibles alors qu’un traitement mis en place dès les premiers symptômes peut éviter cet effet à long terme.
Une étude qui fera référence.
La philosophie du Conseil scientifique de l’acné sévère (CAS Santé), créé en 2011, est une démarche d’optimisation de la prise en charge, avec des projets à long terme. En 2012, le CAS Santé a réalisé un sondage sur plus de 10 000 sujets représentatifs de la population française. « Il manquait en France une version actualisée de la population concernée, remarque le professeur en dermatologie. L’objectif de cette étude nationale était de mieux connaître les patients acnéiques et de mieux comprendre les facteurs du mode de vie susceptibles de favoriser cette pathologie. Ce grand sondage va compter pour les dix années à venir et il fera référence. »
Les résultats de l’enquête montrent que la prévalence de l’acné au cours d’une vie est de 60 % pour les 15-69 ans et de 73 % pour les 15-34 ans. Les adolescents ne sont donc pas les seuls atteints, un acnéique sur quatre a plus de 25 ans, le sexe féminin est plus touché que le sexe masculin (61 % versus 39 %). Pour les formes sévères, 71 % sont des adultes, la répartition étant de 57 % de femmes et 43 % d’hommes ; les zones atteintes sont le visage et le dos dans 50 % des cas. On note une excellente corrélation entre le score d’impact sur la qualité de vie et le degré de sévérité de l’acné.
Parcours de soin et idées reçues.
Si le dermatologue reste le référent, l’expert de la peau, il apparaît que les principaux freins à une consultation de dermatologie sont les délais trop longs pour obtenir un rendez-vous (26 %) et le coût de la consultation (22 %). « Il faut également combattre un certain nombre d’idées reçues qui parasitent une bonne prise en charge, souligne le Pr Laurent Misery (CHRU de Brest). En effet, pour 26 % des personnes interrogées les traitements ne marchent que temporairement et, pour 22 %, ils sont inefficaces. »
Au total, les patients souffrant de tout type d’acné ont le parcours suivant : 21 % voient directement le dermatologue et ne respectent pas le parcours de soin ; 31 % voient en premier le médecin généraliste, puis le dermatologue. Au final, 52 % des patients consultent un dermatologue, 38 % se traitent seuls ou ne se traitent pas. Le parcours est comparable pour les patients souffrant d’une forme sévère ; 76 % d’entre eux consultent un dermatologue, mais 17 % ne prennent de traitement. « Il y a un gros travail d’information et de formation à faire auprès des patients et de leur entourage. Des traitements efficaces existent et leurs résultats sont durables, consulter un spécialiste comme le dermatologue est un premier pas vers une bonne prise en charge et un mieux-être », affirme le dermatologue brestois.
L’alimentation comme facteur favorisant l’acné a aussi son lot d’idées reçues ; l’enquête du CAS Santé a permis d’en écarter certaines. Ainsi, aucune corrélation sérieuse n’a pu être établie entre la présence d’acné, les sodas sucrés et les produits laitiers. En revanche, le risque d’acné est multiplié par 2,7 pour la population qui consomme chocolats et confiseries tous les jours, il est 2,5 supérieur chez les sujets soumis au stress quotidien ; il est multiplié par 1,4 chez les sujets fatigués au réveil dont le sommeil est perturbé. « Ce lien décrit par l’étude est un aspect non étudié jusqu’ici, note le Pr Wolkenstein, grâce à ce sondage on est dans une dynamique de meilleure prise en charge de l’acné sévère. Ces investigations sont à confirmer par des travaux complémentaires. En 2013, une étude internationale permettra de comparer des populations européennes différentes et de mieux étudier les facteurs de risque, dont l’alimentation et le stress physique et psychique. »
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