Quelques définitions
Expectoration : expulsion par la bouche de sécrétions contenues dans la trachée, les bronches ou les poumons (crachat).
Mucosité : substance épaisse et filante, à la surface de certaines muqueuses, formée de cellules desquamées et de corps étrangers microscopiques (poussières, germes, parasites).
Glaire : substance incolore, rappelant le blanc d’œuf, sécrétée par certaines muqueuses.
Un peu de physiopathologie
La toux trouve son origine dans l’inflammation des voies aériennes. Dès qu’un agent irritant stimule des récepteurs spécifiques situés au niveau du pharynx, du larynx, de la trachée et des grosses bronches, ceux-ci envoient un message au centre de la toux. La toux débute alors par une phase inspiratoire profonde qui permet l’entrée de l’air dans les poumons. Puis les muscles de la cage thoracique sont immédiatement mis à contribution : le diaphragme remonte alors que les côtes et le sternum descendent, les poumons se contractent et le calibre des bronches diminue. Survient ensuite une phase de compression de l’air pendant laquelle la respiration s’arrête. Lorsque la pression devient trop forte, il se produit une expiration brusque et sonore qui fait sortir un courant d’air qui expulse les substances contenues dans l’arbre respiratoire à une vitesse pouvant atteindre 250 mètres par seconde. Quand les secousses de toux se succèdent, on parle de quintes de toux.
L’intérieur de l’arbre bronchique est enduit de mucus bronchique (liquide épais et gluant) qui emprisonne les particules étrangères (poussières, bactéries, virus…) tandis que des millions de cils vibratiles, tapissant la paroi bronchique, font remonter les mucosités au niveau de la trachée où elles sont dégluties ou rejetées à l’extérieur. Il arrive parfois que ce système d’épuration soit débordé, la toux prend alors le relais.
Les mots du conseil
La toux n’est pas une maladie mais un symptôme, ses causes sont nombreuses et variées et recouvrent des pathologies de gravité très inégale. Le pharmacien doit prendre en considération un contexte évocateur (épidémie, rhinopharyngite…) et se limiter à une toux débutante sans signe de gravité (cyanose, dyspnée, douleur thoracique, fatigue…). Avant de conseiller un médicament, il doit également prendre en compte les particularités physiologiques et pathologiques du patient (âge, tabac, grossesse, diabète, adénome de la prostate…).
Toussez-vous depuis longtemps ?
Il est important de faire préciser l’ancienneté de la toux pour déterminer son caractère aigu (moins de trois semaines) ou chronique (au-delà de huit semaines). Au-delà de trois semaines et si la toux persiste malgré un traitement bien conduit, un avis médical s’impose. Dans tous les cas, le traitement conseillé à l’officine n’est que symptomatique et de courte durée.
Toussez-vous plutôt le jour ou la nuit ?
Le moment et les circonstances de survenue de la toux sont révélateurs : une toux mucopurulente survenant le matin au réveil signe une maladie bronchique chronique ; une toux de début de nuit évoque une origine cardiaque ; une toux nocturne a une origine asthmatique ou ORL lorsqu’elle est accompagnée de quintes. La toux chronique mucopurulente est l’apanage du fumeur. Le pharmacien doit également penser au reflux gastro-œsophagien (RGO) lorsque la toux survient plus volontiers au moment des repas ou augmente en position couchée.
Comment toussez-vous ?
La tonalité de la toux renseigne sur son origine : elle est rauque en cas de trachéite aiguë, sifflante en cas de bronchite ou d’asthme, sèche en cas de laryngite ou de rhinopharyngite, et grasse avec des crachats lors d’une bronchite aiguë. Une toux spasmodique doit faire évoquer une origine allergique.
Avez-vous beaucoup d’expectorations ?
Une toux sèche peut succéder à une toux grasse d’apparition récente. Cette évolution entre les deux types de toux définit un état intermédiaire qualifié de toux mixte dont la prise en charge est plus délicate. Il faut se méfier aussi des « fausses » toux sèches ou grasses. En effet, dans certains cas de toux grasse, la sécrétion est déglutie et il n’y a pas d’expectoration. Parfois celle-ci n’est en réalité qu’un crachat salivaire ou un raclement de gorge d’origine nasale.
Prenez-vous des médicaments ? Lesquels ?
Il est utile de s’informer des traitements en cours pour éviter des interactions et identifier une cause iatrogène due à la prise de certains médicaments (bêtabloquants, aérosols de corticoïdes…). Il faut prendre des précautions en cas de prise concomitante de médicaments pouvant induire une somnolence (dépresseurs du système nerveux central) ou un effet antabuse (disulfirame).
Les produits conseils
De nombreuses spécialités relèvent de l’automédication et sont accessibles en libre accès. L’intervention du pharmacien permet de confirmer ou modifier le choix du patient tout en le mettant en garde contre certaines idées reçues ou en corrigeant des erreurs dans sa façon de se traiter.
Ma priorité est de calmer rapidement l’inflammation et la gêne respiratoire.
Bon réflexe si la toux est sèche, sans expectoration. Mais ce geste est inapproprié s’il s’agit d’une toux grasse. Celle-ci a très souvent une origine bénigne : un coup de froid, une atmosphère enfumée, un surcroît de pollution suffisent à encombrer vos poumons de glaires, et seules des expectorations (crachats) vous soulagent momentanément. En assurant l’élimination des sécrétions bronchiques excessives, la toux dite grasse ou productive, est un moyen de défense naturel de l’appareil respiratoire. C’est une réaction salutaire qui doit être respectée.
Je prends systématiquement des antitussifs.
Lorsque la toux est grasse, il ne faut surtout pas bloquer le système de « nettoyage » par des antitussifs qui assèchent les sécrétions, sinon vous risquez l’asphyxie pulmonaire. Il faut au contraire, faciliter l’expectoration en fluidifiant le mucus et les sécrétions bronchiques.
Quand je tousse, je prends toujours le même sirop.
En cas de toux grasse, votre choix doit se porter sur les mucolytiques vrais et les mucorégulateurs dont les chefs de file sont respectivement l’acétylcystéine (Mucomyst, Fluimucil, Exomuc…) et la carbocistéine (Bronchokod, Rhinatiol…). Ils coupent les ponts disulfure des protéines du mucus et le rendent moins visqueux. Les fluidifiants, dont les principes actifs sont la guaïfénésine (Vicks Expectorant Adulte, Pulmofluide Simple…), le sulfogaïacol (Passédyl), la terpine (Terpine Gonnon) sont hydratants, ils agissent sur la viscosité du mucus en rendant les sécrétions plus liquides donc plus faciles à éliminer. Les expectorants représentés par l’ambroxol (Surbronc, Muxol…), la bromhexine (Bisolvon) et l’erdostéine (Vectrine), favorisent la production d’un mucus plus mobilisable et augmentent le transport mucociliaire. Toutes ces formules ne stoppent pas la toux immédiatement.
Je n’arrive pas à me débarrasser de mes glaires.
Si vos mucosités sont épaisses, visqueuses et « accrochent », préférez l’acétylcystéine. Si elles sont abondantes mais plus fluides, la carbocistéine s’impose en tant que mucorégulateur. Dans les deux cas, évitez les prises au coucher pour ne pas inonder les bronches durant le sommeil.
Je ne fais pas attention aux précautions d’emploi.
La prise de tous ces médicaments n’est pas anodine et comporte, pour certains, des effets indésirables (personnes âgées, femmes enceintes, allaitantes, jeunes enfants). Avec la carbocistéine et l’acétylcystéine, la prudence est recommandée en cas d’ulcères gastroduodénaux, et des réactions cutanées et/ou allergiques sont possibles. Pensez aux formules sans sucre, si vous êtes diabétique ou au régime, et vérifiez la présence d’alcool dans les sirops (à proscrire chez la femme enceinte et en cas de sevrage alcoolique).
J’associe souvent plusieurs formules pour guérir plus vite.
Il est inutile d’associer plusieurs fluidifiants ou de doubler les doses. Vous risquez de déclencher une inondation bronchique par des sécrétions excessives que vous aurez du mal à évacuer. Il est encore plus illogique d’associer un antitussif qui bloque la toux et un mucolytique ou fluidifiant qui favorise l’expectoration. Variez les formes d’administration : les sachets ont une image plus médicale et facilitent un meilleur respect de la posologie que les formes sirops, gommes ou pastilles.
Je ne sais plus quoi donner à mon bébé qui tousse.
En effet, en avril 2010, les autorités de santé ont pris la décision de contre-indiquer les mucolytiques (carbocistéine, acétylcystéine, benzoate de méglumine) et les mucofluidifiants chez les moins de deux ans en raison de survenue d’encombrement respiratoire et d’aggravation de bronchiolite ayant nécessité une hospitalisation. D’autres sirops antitussifs (Toplexil, Hélicidine) se sont alignés sur cette décision. Vous pouvez avoir recours à des spécialités type Prospan (lierre grimpant), mais dans la majorité des cas, la toux aiguë disparaîtra en 10 à 14 jours avec de simples mesures d’hygiène.
J’avale les sirops directement au goulot.
Le sirop véhicule une relation émotionnelle et affective liée à l’enfance et une image de non dangerosité qui conduisent à le boire à la bouteille sans respecter les posologies. Ces conduites comportent le double risque de contamination microbienne et de surdosage. D’où l’intérêt d’utiliser les gobelets-doseurs et les seringues graduées jointes à l’emballage (surtout pour les enfants). La tendance actuelle est aux présentations en doses unitaires qui délivrent la juste quantité et qui sont plus pratiques à transporter. Ne réutilisez pas un sirop ouvert depuis plusieurs mois, voire 15 jours pour certains sirops sans sucre.
Mon médecin m’a conseillé de dégager mon nez.
Effectivement, l’écoulement venant du nez agresse votre gorge et entretient la toux grasse d’où l’intérêt d’un bon mouchage et des lavages des fosses nasales avec du sérum physiologique ou des solutions d’eau de mer (Physiomer, Stérimar, Humex…). Les inhalations ou les suppositoires à base d’eucalyptus (Eucalyptine Lebrun, Trophirès) peuvent éviter une surinfection.
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Françoise Amouroux
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