Le rapport remis lundi à la ministre de la Santé prévient d’emblée qu’il n’a pas pour objet « de conduire une expertise ou une enquête sur le Lévothyrox » mais intervient dans « un contexte de crise » sur le médicament. À partir de l'affaire du Lévothyrox, il fustige « l’absence d’anticipation et d’accompagnement » face au changement de formule du médicament, « l’absence de réaction aux nombreux signaux pourtant facilement capturables sur la toile », une information technique limitée à la légitimité scientifique de la formulation, une forme de communication portant à confusion, la « minimisation du ressenti des patients et de la légitimité de leurs signalements »…
Il ne se limite pas à énumérer les reproches d’une communication défaillante mais propose des solutions.
La série de recommandations a été favorablement accueillie, lundi, par la ministre de la Santé Agnès Buzyn qui a annoncé la mise en œuvre de six engagements pour « améliorer la qualité de l’information », « renforcer la communication d’urgence, la veille en matière de sécurité des produits de santé et la transparence ». Elle mise ainsi sur l’utilisation optimale du dossier pharmaceutique (DP). La ministre compte sur les pharmaciens pour qu’ils soulignent l’intérêt de cet outil auprès de tous les patients et qu’ils l’alimentent largement y compris lors de la dispensation de médicaments non remboursés et/ou non prescrits. Des réunions avec l’Ordre des pharmaciens sont d’ailleurs prévues pour aller dans ce sens.
Communication d'urgence
Plus généralement, la ministre espère « optimiser et faciliter la coordination des soins entre les prescripteurs et les pharmacies d’officine » en améliorant l’information sur l’intérêt des dossiers santé dématérialisés que sont le DP et le dossier médical partagé (DMP), le déploiement de ce dernier au niveau national devant être annoncé le mois prochain par l’assurance-maladie. Les officinaux sont décidément mis à l’honneur, Agnès Buzyn ajoutant au passage qu’elle souhaite renforcer leur rôle. En outre, toujours pour améliorer la qualité de l’information, la ministre envisage de modifier les enseignements sur le médicament lors de la formation, initiale et continue, des professionnels de santé.
Autre engagement : la mise en place d’une source unique d’information publique sur le médicament sur le portail sante.fr auquel sera prochainement intégrée la base de données publique des médicaments medicaments.gouv.fr qui va être modernisée et comprendra de nouveaux modes de recherche. « Il convient en effet de centraliser toutes les informations que nous avons sur les médicaments. »
Pour sa 3e mesure, Agnès Buzyn confie, en toute logique, la communication d’urgence en cas d’alerte portant sur un médicament à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) qui s’appuiera sur la cellule créée à l’été 2017, le centre d’appui aux situations d’urgence, aux alertes sanitaires et à la gestion des risques (CASAR). Ayant pour mission de traiter « tous les événements susceptibles de devenir des situations à risque élevé », son champ d’action pourra être étendu, notamment pour intégrer la détection et le traitement de signaux d’alerte faibles.
Valoriser les déclarations
Cela rejoint la 4e mesure imaginée par la ministre de la Santé, qui veut encourager les remontées d’informations des patients et des professionnels de santé par le biais de leviers incitatifs et de valorisation. « Aujourd’hui ces déclarations d’événements indésirables sont fastidieuses, les professionnels de santé les effectuent surtout lorsque le cas est grave, ce qui aboutit à des biais. Nous étudions la forme que pourrait prendre la valorisation de ce travail. » Agnès Buzyn se dit favorable au développement de tous les outils capables de repérer des signaux d’alerte, même lorsqu’ils sont faibles, y compris en dehors du système habituel de pharmacovigilance.
Pour assurer une mobilisation rapide des professionnels de santé en cas d’alerte, la ministre souhaite étendre progressivement l’outil d’alerte DGS-Urgent à tous les professionnels de santé libéraux. Avec cette 5e mesure, le nombre de soignants recevant les alertes DGS-Urgent passerait de 180 000 à 564 000. Un nombre qui pourrait encore augmenter si tous les professionnels de santé libéraux se dotaient de la messagerie sécurisée santé (MS Santé) qui est interconnectée avec l’alerte DGS-Urgent. La ministre souligne que, pour le moment, en sont équipés « 48 % des médecins libéraux, 15,9 % des pharmaciens d’officine et 11,7 % des infirmiers libéraux ».
Enfin, dans un souci de transparence de l’information, le ministère prévoit une représentation des usagers au sein du Comité économique des produits de santé (CEPS) chargé de fixer le prix des médicaments en France.
Ces mesures, qui seront « effectives dans l’année qui vient », sont une première série d’améliorations. La ministre de la Santé annonce que « toutes les pistes » proposées dans le rapport Leo-Kierzek vont « nourrir les travaux que nous engageons ».
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