Depuis le mois de juin, Franck Lemonnier réalise des bilans de médication dans son officine de Condé-sur-Noireau (Calvados).
Mais avant de se lancer, le titulaire de la Pharmacie du vieux château a pris soin de rencontrer les médecins environnants pour leur expliquer la démarche. « C’est une étape primordiale, il faut les faire entrer dans le cercle », estime-t-il. Le pharmacien leur a expliqué qu’il ne s’agissait pas de juger leurs prescriptions, mais d’accompagner le patient pour améliorer sa compréhension et son adhésion au traitement. « Mieux il le comprendra, mieux il le suivra », explique Franck Lemonnier. Le pharmacien n’a pas cherché à recruter parmi tous ses patients éligibles au bilan partagé de médication, préférant cibler ceux qui, par exemple, ne renouvellent pas toujours l’intégralité de leur ordonnance ou laissent paraître un manque d’observance à leur traitement. À ce jour, il a mené une dizaine de bilans avec des retours toujours positifs. « Je consacre environ 20 minutes par bilan, indique le pharmacien. Il faut poser des questions avec de l’empathie. La parole se libère assez vite. Le prescripteur pense que son traitement est pris, mais parfois, on a des surprises. » Certains bilans ont ainsi abouti à une modification de la prescription par le médecin. Comme ce bilan réalisé chez un patient douloureux qui ne prenait pas le Klipal 600 mg prescrit au motif qu’il ne pouvait pas avaler les comprimés. « Après m’être entretenu avec le médecin à qui j’avais envoyé le compte rendu du bilan, des comprimés de Klipal 300, plus petits, ont été proposés au patient », explique Franck Lemonnier, qui entend poursuivre l’expérience.
Eric Ruspini, titulaire à Gerbévillers (Meurthe-et-Moselle), et trésorier de la Société française de pharmacie clinique (SFPC), a, lui, déjà réalisé ses 20 bilans pour 2018. « À chaque fois, les patients m’ont remercié, souligne-t-il. Désormais, ils ne me regardent plus de la même façon : on a gagné en confiance et en reconnaissance. » Pour lui, le bilan de médication est une petite révolution. « Il ne s’agit pas seulement d’analyser les médicaments, mais aussi de considérer le patient de façon globale. Lui demander s’il se sent bien avec ses médicaments, savoir s’il chute souvent, et pourquoi : à cause d’un tapis qui gène ? En raison d’un traitement ? » évoque-t-il. Avant l’entretien, Eric Ruspini demande au patient de rapporter ses boîtes de médicaments et ses bilans biologiques. « Les analyses objectivent souvent une insuffisance rénale, ou qui s'installe. Avec les boîtes, je demande au patient s’il sait à quoi sert chaque médicament, "quand ?" et "comment ?" il les prend. On a parfois des surprises, rapporte Eric Ruspini. Par exemple, un patient diabétique m’affirmait au comptoir qu’il prenait bien sa metformine, matin, midi et soir. Mais durant l’entretien, il a avoué la prendre en une seule fois, car c’était plus pratique ! » Le bilan permet donc de repréciser les choses et de vérifier si le patient les a mises en application lors du second entretien. Dans son officine aussi ces bilans peuvent amener à des adaptations de traitement par le médecin, qui est toujours informé du résultat. « Cela peut être la suppression du pantoprazole ou d'une benzodiazépine d’une prescription ancienne, l’ajout d’un vaccin, etc. », illustre le titulaire. En revanche, pour lui, le grand problème est l’enregistrement des bilans sur le site ameli. « C’est complexe et long, il faut faire beaucoup de paperasserie », déplore Eric Ruspini, qui rêve d’avoir un logiciel qui les enverrait directement à l’assurance-maladie.
Dans les Alpes-Maritimes
Dépistage du VIH : une expérimentation à l’officine
Marché de l’emploi post-Covid
Métiers de l’officine : anatomie d’une pénurie
Près de 45 fois plus de cas en 2023
Rougeole : l’OMS appelle à intensifier la vaccination en Europe
Pharmacien prescripteur
Après les vaccins, les antibiotiques