Le pharmacien et ses collaborateurs sont des confidents nécessaires du médecin, via l’ordonnance, et du patient.
Les informations recueillies ne doivent pas être dévoilées à des tiers, y compris au détour de conversations tenues en dehors de la pharmacie. Toute l’équipe officinale est astreinte au secret professionnel : les pharmaciens titulaires, adjoints, remplaçants, les préparateurs, les apprentis, les employés, et même les étudiants stagiaires. Le titulaire a la responsabilité d’informer ses collaborateurs et de veiller au strict respect de cette obligation : au moyen d’une réunion ; d’une note affichée sur le panneau d’information du personnel ; ou d’un document annexé au contrat de travail remis lors de l’embauche. Ainsi, à l’officine, le secret est bien scellé.
Les informations protégées
Tout ce que vous déduisez de l’ordonnance. Tout ce qui vous est confié par le patient mais aussi tout ce que vous voyez, entendez, ou constatez concernant la santé et la vie privée de ce dernier. Toutes ces informations doivent être protégées et sanctuarisées. Cette exigence ne fait pas obstacle à ce que votre équipe échange des informations, sous le sceau du secret professionnel partagé. Par exemple, pour un double contrôle d’une ordonnance, pour croiser un avis, etc. Vous pouvez également transmettre des éléments à d’autres professionnels de santé afin d'assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge possible. Sauf si le patient, dûment averti, s’y oppose. Au comptoir, face au patient, mesurez vos propos. Vos conseils et vos commentaires ne peuvent dépasser le cadre du traitement. Le médecin peut avoir caché à son patient une partie de la vérité, par exemple un pronostic grave, dans l’intérêt de ce dernier. Lorsque le porteur de l’ordonnance n’est pas le patient, mais un parent ou un ami, la vigilance doit être accrue. L’entourage n’a pas forcément connaissance de la maladie. Enfin, respectez les délivrances anonymes. Lorsqu’une jeune fille demande un contraceptif d’urgence, l’équipe officinale n’a pas le droit d’informer par la suite ses parents, même si cette révélation est portée par une bonne intention.
Un espace top confidentiel
L’agencement de l’officine doit permettre de discuter avec les patients en toute discrétion. L'article R.5125-9 du Code de la santé publique l’exprime distinctement, « l'accueil de la clientèle et la dispensation des médicaments s'effectuent dans des conditions de confidentialité permettant la tenue d'une conversation à l'abri des tiers ». Quelques conseils pratiques : indépendamment des précautions sanitaires, délimitez par un marquage au sol la ligne de confidentialité à ne pas franchir par les clients qui patientent dans la file d'attente ; utilisez les présentoirs et les descentes de linéaires pour créer des obstacles visuels et phoniques au niveau d’une zone que vous souhaitez tenir à l’écart des indiscrétions ; évitez de laisser les médicaments de manière apparente sur les comptoirs. Ce sont des indices qui n’ont pas à être portés à la connaissance des autres clients. Le cas échéant, proposez aux patients en situation manifeste de détresse ou dans le besoin de parler de vous suivre dans le back-office, dans un espace isolé. Parce que la confidentialité est l’affaire de tous, n’hésitez pas à sensibiliser et à informer vos clients sur le secret professionnel au moyen d’une fiche conseil ou d’une affiche. Ce sera l’occasion de rappeler que vous êtes un interlocuteur privilégié et votre officine un lieu de confiance.
Rompre les liens du secret
Si vous détectez des violences conjugales physiques ou psychologiques, notamment dans une situation d’emprise morale, vous pouvez alerter le procureur de la République. L’accord de la victime – dans une situation de « danger immédiat » – n’est pas nécessaire, elle doit cependant être informée de votre signalement. Avec cette récente mesure, publiée au Journal officiel du 31 juillet 2020, le législateur confie aux pharmacies une mission d’alerte afin de protéger les victimes. Ce rôle doit également être activé dans deux autres circonstances : en cas de privations ou de sévices sur mineurs, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes sexuelles ; face au caractère dangereux d’une personne qui vous consulte et dont vous savez qu’elle détient une arme ou envisage d’en acquérir une. La gravité de ces situations ne permet pas de les taire en se retranchant derrière le secret professionnel.
Une obligation lourdement sanctionnée
Violer le secret professionnel, c’est commettre un délit. L’article 226-13 du Code pénal l’énonce haut et fort, « la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ». Peu importe d’ailleurs que la divulgation résulte d’une intention, d’une négligence, ou d’une simple méprise. Cette sanction pénale s'ajoute à la sanction disciplinaire pour atteinte à la déontologie professionnelle. On ne peut pas défaire, sans raison légitime, les liens du secret.
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