Depuis hier, les députés examinent un projet de loi relatif à la sortie de crise sanitaire. Dans ce texte figure un dispositif majeur : le pass sanitaire, qui devrait permettre aux Français de retrouver une vie la plus normale possible. Selon les sondages, près de deux tiers y seraient favorables. Tout comme le Conseil scientifique. Dans un avis rendu le 3 mai, il a toutefois émis quelques réserves. Ainsi la présentation de ce pass sanitaire ne devrait s'appliquer qu’aux rassemblements de plus de 1 000 personnes et, en aucun cas, aux actes de la vie quotidienne.
Il y a fort à parier cependant que ce document se généralise comme un « sésame », car se fondant, comme le rappelle le Conseil scientifique, « sur des informations personnelles fiables ». « Elles porteront, précise-t-il, sur le statut des personnes au regard de la vaccination d’une part, et du statut virologique attesté par des tests récents, d’autre part. » Ne serait-ce qu’à ce titre, le pharmacien conserve donc, à moyen terme, toute sa place dans la stratégie de sortie de crise.
Autotests et antigéniques
Comme le montrent les derniers chiffres de la DREES, les tests RT-PCR et antigéniques sont toujours plébiscités par les Français. Entre le 26 avril et le 2 mai, près de 2,2 millions de tests (dont environ 25 % d’antigéniques) ont été réalisés. Disponibles en pharmacie depuis le 12 avril, les autotests peinent en revanche à trouver leur place. La deuxième phase du déconfinement, à partir du 19 mai, qui pourrait marquer la réouverture de certains lieux, va-t-elle contribuer à accélérer le déploiement des autotests ? « Rien ne changera au sujet des cibles à qui nous pourrons les vendre, ils seront toujours uniquement proposés aux personnes asymptomatiques. On peut en revanche s'attendre à ce que la demande augmente, anticipe Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Il y aura donc un vrai intérêt à pouvoir vendre ces tests à l'unité, ce qui n'est pas possible jusqu'à l'alors vu que les fabricants en proposent uniquement par lot de 5. J'espère donc vraiment que les autotests à l'unité seront facilement accessibles pour les pharmaciens dans les jours qui viennent. »
À partir du 15 mai, le prix plafond des autotests va baisser, passant de 6 euros à 5,20 euros. Un changement qui ne devrait pas affecter le niveau de la demande des patients, confirme Philippe Besset. « Même si les ventes d'autotests progressent un peu, cela ne va pas détourner les patients des tests antigéniques. Ces derniers sont plus fiables, réalisés par des professionnels et intégralement pris en charge, les patients continueront donc à les privilégier », rappelle-t-il. Autre handicap des autotests, ils ne seront d'aucune utilité pour accéder à certains lieux (salles de spectacle, stades) ou pour voyager. Si l'accès à certains événements est conditionné à la présentation d'un pass sanitaire (voir ci-dessous), les personnes non vaccinées devront présenter un test PCR (ou antigénique) négatif, comme le prévoit l'avis publié le 3 mai par le Conseil scientifique.
Tests sérologiques, pas d'emballement dans l’immédiat
Ils sont les premiers tests Covid à avoir été déployés en pharmacie et pourtant plus personne ou presque ne se souvient qu'ils existent. Les tests sérologiques sont pour l'instant exclus de la stratégie du déconfinement. « En l’absence de corrélat de protection solide, il semble raisonnable de ne pas utiliser seul le résultat d’un test sérologique, même de nouvelle génération, pour témoigner d’une infection protectrice survenue il y a plus de 6 mois », estime en effet le Conseil scientifique. Alors que la demande est quasi inexistante aujourd'hui, « une tous les deux mois », constate Philippe Besset dans son officine, le futur pass sanitaire ne va donc pas permettre de relancer le test sérologique. « On sera peut-être amené à l'utiliser dans les mois à venir si l'on considère qu'il peut être utile pour connaître son niveau d'immunité et déterminer si l'on a besoin d'être vacciné ou non, veut tout de même croire le président de la FSPF. Mais à l'heure actuelle les autorités sanitaires n'ont rendu aucun avis sur l'intérêt de ces tests par rapport à la vaccination ou la nécessité de revacciner une personne. »
Vaccination à l'officine, ARNm compris !
La vaccination est la pierre angulaire de la lutte contre le virus. Et de toute évidence elle le restera bien après la sortie de crise. La circulation des variants, et les nécessaires ajustements des vaccins à ARNm tel le Moderna, vont très certainement prolonger la campagne vaccinale, sinon rendre la vaccination saisonnière, à l’instar de la grippe. Les pharmaciens se voient donc engagés dans le processus de rappels, dans lequel ils revendiquent leur place.
Toutefois, s’ils réclament aujourd’hui ardemment de pouvoir disposer du vaccin Pfizer en ville, parallèlement au Moderna, c’est moins par souci d’anticipation que par pragmatisme. Dans la perspective de l’arrivée chaque semaine de 4 ou 5 millions de doses de Pfizer à partir de fin juin, le renfort de la ville semble incontournable, selon Pierre-Olivier Variot, vice-président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), décidé à se « battre » pour obtenir les deux vaccins à ARNm dans le circuit de ville. Il estime que ce serait une « erreur logistique » de miser uniquement sur une administration de ce vaccin en centres. « Les pouvoirs publics vont bien devoir se résoudre à nous le confier. Au plus tard lorsque les matchs reprendront au Stade de France, et les concerts au Zénith », ironise-t-il.
Des documents infalsifiables
Via les bases SI-DEP et SI-VAC, les pharmaciens participent d'ores et déjà à la traçabilité des résultats des tests et de l'administration des vaccins. Leur rôle devrait se limiter à ces enregistrements. Car, depuis le 3 mai, toute personne vaccinée reçoit une attestation dite « certifiée » au format papier, comportant deux cachets électroniques visibles : un Datamatrix et un QR Code permettant à l’utilisateur qui le souhaite de stocker son attestation numérisée dans la fonctionnalité TousAntiCovid Carnet. Pour les personnes vaccinées avant cette date, un téléservice de l’assurance-maladie sera ouvert d’ici à la fin du mois permettant d’accéder aux attestations. Dès le 16 mai, les Français auront un accès direct au portail SI-DEP pour récupérer leurs résultats de tests.
L’ensemble de ces données pourront abonder le pass sanitaire, ou le TousAntiCovid Carnet qui pourrait en faire fonction. En tout état de cause, les pharmaciens n’auront pas à produire de QR Code à l’intention de leurs patients. Par conséquent, la plus grande prudence est recommandée aux officines qui sont démarchées par des sociétés opportunistes leur proposant des systèmes pour générer ces codes. Comme l’affirme Olivier Verdure, directeur de Pharmonweb, « les QR code seront officiels et générés automatiquement par les instances de l’État. Il faut sécuriser au maximum les données et les rendre infalsifiables ! ».
Ces contraintes n’excluent cependant pas la mise à disposition des documents sous format papier. L’assurance-maladie indique ainsi qu’elle pourra adresser par courrier aux personnes qui n’ont pas accès aux outils numériques leur attestation de vaccination certifiée.
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