Un pas en avant, deux pas en arrière. Voilà ce que ressentent les professionnels de santé après les déclarations à la radio de la ministre de la Santé. Après avoir affirmé qu’il n’y aurait pas de retour à l’ancienne formule, moins stable, Agnès Buzyn est revenue sur ses propos le 15 septembre : « D’ici 15 jours, des stocks européens de l’ancienne formulation du laboratoire Merck seront mis à disposition sur prescription médicale pour les patients présentant des effets indésirables persistants. À terme, cette formulation du Lévothyrox ne sera plus disponible et cette solution est donc temporaire. » Une information confirmée par le laboratoire, qui précise que les médicaments proviendront de son usine de Darmstadt en Allemagne, et pourront avoir un étiquetage dans la langue du marché d’origine, mais les pharmaciens auront une notice en français.
Mécontents de voir leur pédagogie au service des patients ces derniers mois mise à mal, les officinaux se sentent désavoués. La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) apprécie peu que les pharmaciens soient informés « par voie de presse » et doivent conseiller leurs patients « grâce aux éléments recueillis dans les médias ». Philippe Gaertner, son président, remarque surtout que « ce retour à l’ancienne formule ne réglera qu’à court terme les difficultés rencontrées par les patients ». Pour l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), il est urgent que la ministre réunisse l’ensemble des responsables de la profession de pharmaciens pour les informer de la nouvelle organisation « de la dispensation de la lévothyroxine, ses conditions de prescription, les personnes cibles, les conditions de prise en charge, les recommandations, afin de ne pas être en rupture dès la première semaine ». Le président de l’USPO, Gilles Bonnefond, enfonce le clou : « Si nous ne sommes ni consultés, ni informés, nous ne pourrons pas accomplir notre travail de professionnel du médicament, notre rôle d’acteur du bon usage, notre mission de santé publique et la diffusion de la bonne information. »
Calmer la grogne
Du côté des malades qui réclamaient le Lévothyrox ancienne formule, ce retour en arrière est comme la confirmation qu’il y a bien un problème avec la nouvelle formulation, mais ne les rassure pas. Certains affirment que ce Lévothyrox ancienne formule « ne sera pas exactement le même produit », quand d’autres restent persuadés que la nouvelle formule contient « une substance toxique ». D’ailleurs, les annonces d’actions en justice ne faiblissent pas (voir encadré).
Aux yeux du ministère de la Santé, il ne s’agit pas d’un rétropédalage mais d'une mesure visant à calmer la grogne des malades en attendant l’arrivée sur le marché français, dans moins d’un mois, de « nouvelles spécialités de lévothyroxine (pour) répondre aux besoins des patients présentant des effets indésirables persistants en lien avec la nouvelle formulation du Lévothyrox ». Malgré les 9 000 signalements d’effets indésirables enregistrés par l’ANSM, le ministère rappelle que le Lévothyrox nouvelle formule « convient à la très grande majorité » des 3 millions de patients traités et qu’il ne faut en aucun cas cesser de prendre son traitement mais se rapprocher de son médecin pour toute adaptation.
En sus de stocks européens de l’ancien Lévothyrox (qui portera le nom d’Euthyrox) et de nouvelles spécialités de lévothyroxine, le Laboratoire SERB, fabriquant des gouttes L-Thyroxine, a doublé sa production pour éviter toute rupture de stock. Selon le laboratoire, cette mesure a été accompagnée d’une limitation des livraisons auprès des grossistes au niveau des volumes habituels et d’un relais auprès des professionnels de santé de la recommandation de l’ANSM de réserver en priorité la délivrance de L-Thyroxine SERB gouttes aux enfants et aux personnes présentant des troubles de la déglutition.
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