Le Quotidien du pharmacien.- Peut-on se réjouir selon vous du niveau d’activité qui ressort de votre première analyse de l’évolution des chiffres d’affaires des officines clientes de Fiducial portant sur les trois premiers trimestres de 2021 ?
Philippe Becker.- On peut se réjouir sans réserve de l’implication forte des officinaux dans cette crise sanitaire qui dure depuis 2 ans. En effet chacun de vos lecteurs comprend parfaitement que ce fort rebond d’activité est la conséquence du rôle des pharmaciens dans le dépistage du Covid-19 et de la vaccination. L’activité à taux de TVA zéro est montée en flèche, ainsi que celle à taux de TVA à 5,5 %. Le seul bémol que l’on doit apporter est la désorganisation que l’épisode lié au nouveau variant Omicron crée dans les officines depuis quelques semaines.
Est-ce à dire que sur l’ensemble de l’année 2021, la croissance du chiffre d’affaires pourrait être supérieure ?
Christian Nouvel.- Nos graphiques le montrent clairement dès que les tests et la vaccination ont pu être réalisés en pharmacie, l’impact a été immédiatement perceptible. Nous ne serions pas surpris si la hausse de l’activité moyenne frôlait les 5 %, voire dépassait clairement ce chiffre ! C’est le scénario le plus probable en tout cas pour les pharmacies qui participent activement aux missions Covid-19 ! Il faut revenir en 2005 pour observer une telle progression. Concernant l’évolution de la marge brute, nous voyons parfaitement que les missions Covid-19 changent complètement la tendance. Sa progression sur l’année 2021 devrait être proche de 0,5 point, soit entre 8 000 et 9 000 euros par an pour l’officine standard qui réalise dans nos études un CA HT de 1,75 million d’euros.
La marge brute progresse de manière notable sur les neuf premiers mois de 2021, est-ce suffisant pour compenser les coûts engendrés par l’emploi de personnels mobilisés sur les tests et la vaccination ?
Philippe Becker.- C’est la vraie bonne question car la surchauffe que nous constatons tous dans les pharmacies nécessite une grosse mobilisation du personnel et des titulaires. Lorsque les prestations Covid se faisaient au fil de l’eau avec prise de rendez-vous, l’opération était positive si aucune embauche n’était réalisée. Si aujourd’hui une embauche est nécessaire, il faut comparer le compte journalier de tests avec le coût journalier d’un étudiant, par exemple, plus le coût administratif qui peut être variable si d’aventure le site du SIDEP est encombré. Si, par hypothèse, on part sur 10 minutes pour un test en intégrant le « technique » et l’« administratif » on peut faire 6 tests complets par heure pour une personne seule, soit une résultante en termes de chiffre d’affaires égale à 150,06 euros par heure, qui doit être comparée avec les coûts directs (salaire de l’employé(e) chargé) et coûts indirects (location d’un barnum, par exemple).
En général l’opération se révélera positive !
Christian Nouvel.- Dans un scénario bien écrit à l’avance, oui, sans aucun doute, mais actuellement l’afflux de patients pour les tests désorganise les pharmacies et peut potentiellement perturber l’activité de certaines d’entre elles. Au-delà de cela, il y a les effets à long terme qui pourraient peser sur l’exploitation car la pénurie de personnel qualifié est, elle, bien réelle et elle est accentuée par les besoins actuels en main-d’œuvre. Les tensions sur les salaires auront sans aucun doute un effet sur les comptes des pharmacies dans les prochaines années.
Vous pensez que la rentabilité ne progressera pas autant qu’espéré en 2021 ?
Philippe Becker.- Indiscutablement 2021 devrait être une année positive en matière de rentabilité, il est trop tôt pour dire dans quelle mesure mais ce ne serait que justice rendue à ceux qui s’impliquent au service des patients. Mais attention, si on compte les heures de travail et le stress des officinaux, le « plus » de rentabilité ne sera pas si extraordinaire.
En d’autres mots, pour que la croissance de l’activité soit un vrai « plus » en termes de rentabilité il faut mieux anticiper et mieux s’organiser !
Christian Nouvel.- Nous l’avons souvent dit dans des interviews précédentes, passer d’une économie de dispensation à une économie de services n’est pas si simple. La bonne nouvelle est que, selon nos constats, les pharmaciens ont dû vite apprendre grâce à cette crise sans précédent !
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