La multiplicité des engagements des pharmaciens adjoints interrogés saute aux yeux. Pour Françoise Amouroux, pharmacienne adjointe à Sainte-Hélène (Médoc), tout commence par une réunion d’information de la Commission qualité Aquitaine pour la pharmacie d’officine (CQAPO) où elle remplace son titulaire, indisponible. « Nous en étions au tout début de l’assurance-qualité, je n’y connaissais rien. J’y suis restée, j’ai beaucoup appris, j’ai même participé à la rédaction d’un guide d’autoévaluation en 1998. » Et elle est devenue secrétaire de la CQAPO.
Parallèlement, l’adjointe suit des enseignements post-universitaires (EPU), ce qui lui donne des idées de projets. « De fil en aiguille, on rencontre des gens, on s’investit. » Après avoir accepté de coanimer une soirée de formation pour pallier un désistement de dernière minute, et après avoir affronté son trac, Françoise Amouroux se rend compte qu’elle a mis le doigt dans l’engrenage. Les formations se multiplient, elle entre au bureau de l’UTIP avant d’en devenir conseillère scientifique. « Je connaissais Thierry Barthelmé, alors président de l’UTIP, depuis la CQAPO, on se croisait aussi aux EPU puis aux formations de l’UTIP, il a décidé de me coopter au bureau de l’UTIP. » Même si Françoise Amouroux ne renouvelle pas son mandat de trois ans au bureau national, elle reste une fidèle de l’UTIP Aquitaine qu’elle coprésidait jusqu’à récemment, puis passe la main. « Je continue les EPU pour le moment, mais je forme ma remplaçante, une jeune pharmacienne motivée. » Le but ? Se dégager du temps pour la faculté de Bordeaux. « Le responsable de la filière officine, qui me connaît grâce aux EPU et à l’UTIP, a pensé à moi pour la création d’un poste de professeur associé. J’ai dit non, je n’y connais rien en enseignement. Il a fini par me convaincre en me disant que ça ne serait pas pour la prochaine rentrée mais celle d’après, en 2011. Résultat, le poste a été obtenu en juillet 2010… pour octobre 2010. »
Fort altruisme
Pour mener de front ses multiples activités, Françoise Amouroux est à temps partiel à l’officine, elle réserve ses jeudis et vendredis à la faculté, sans compter son temps auprès d’étudiants passant leur thèse, toujours plus nombreux à se tourner vers elle. L’adjointe est aussi, depuis un an, vice-présidente de l’APPEX, l’Association pour la promotion des pharmacies expérimentales qu'elle a rejoint en 2010. Elle se souvient encore de sa première assemblée générale. « On m’a demandé de faire une présentation sur l’assurance-qualité… devant des confrères universitaires ! » C’est à cette occasion qu’un pharmacien tunisien la convainc de venir en son pays pour animer des formations sur la qualité à l’officine.
À cela s’ajoute son engagement ordinal. « Je faisais partie de ces pharmaciens très critiques concernant l’Ordre. Un jour on m’a dit : viens et tu verras. J’ai découvert une véritable fourmilière, j’ai totalement changé ma vision. » Élue conseillère ordinale de la section D en Aquitaine en 2012, elle prend en charge les dossiers liés à l’assurance qualité. En 2015, elle est élue au bureau national. Le plus difficile ? Siéger en chambre de discipline et juger un confrère. Car l’altruisme est fort chez Françoise Amouroux, qui ne peut s’empêcher de se mettre à la place du pharmacien fautif. Mais comment concilier toutes ces activités ? La pharmacienne sourit : « Je ne sais pas. Je grignote sur mon temps de loisirs. J’y arrive, même s’il y a des moments de lassitude, surtout face aux critiques qu’on peut entendre. J’ai plusieurs casquettes mais toutes mes activités sont liées les unes avec les autres. »
La passion de transmettre
Vivien Veyrat, adjoint à Mantes-la-Jolie (Yvelines) est professeur associé à la faculté de Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine). Il découvre son goût pour la formation dès la 1e année d’université, lors d’un travail en groupe pour préparer le concours, consistant à expliquer des chapitres de cours à d’autres étudiants. Après sa thèse, avec un autre pharmacien, Nicolas Mimoun, il propose des rencontres avec des étudiants autour de vraies ordonnances, pour les exercer aux cas de comptoir. La démarche plaît. Lorsqu’en 2005 il entend parler d’un poste de professeur associé à la faculté de Châtenay-Malabry, il envoie naturellement sa candidature : « J’ai un mi-temps de professeur des universités et un mi-temps à l’officine, qui sont intimement liés dans le sens où, si mon activité en ville s’arrête, mon activité à l’université aussi. » Vivien Veyrat compte 120 heures de cours par an pour des étudiants de 4e, 5e et 6e années, à quoi il ajoute l’encadrement de thèses et des projets renouvelés en matière d’enseignement. Lauréat du prix de l’Ordre 2017, il craint l’inactivité. Ainsi, lorsqu’il est en période de congés universitaires, il propose d’augmenter son temps de travail à l’officine, et si son titulaire n’a pas besoin de ses services, il les propose à une autre officine ou à l’hôpital. Il est aussi pharmacien pompier volontaire, ce qui entraîne quelques astreintes le soir à partir de 18 heures et le week-end. « Je ne suis appelé qu’en cas d’intervention nécessaire d’un pharmacien, que ce soit pour un réapprovisionnement urgent ou une intervention à caractère chimique. Je réalise aussi des formations sur le risque chimique aux pharmaciens pompiers volontaires ainsi qu’aux sapeurs pompiers non-pharmaciens. » Transmettre reste sa passion. C’est la raison pour laquelle il anime des séminaires de formation continue à l’université, mais aussi lors de formations UTIP, et qu’il déploie une imagination débordante pour développer des outils pédagogiques tel que le Pharmaquiz en fin de 6e année ou le Speed dating officinal. Élu à la section D de l’Ordre des pharmaciens pendant six ans, Vivien Veyrat ne s’est pas présenté aux dernières élections, même s’il qualifie l’expérience de « très bonne » et n’exclut pas d’y revenir un jour. Pour le moment, ses engagements et son travail officinal l’occupent suffisamment. « Je suis heureux dans mon travail, chacune de mes activités me stimule intellectuellement. Ce que je n’aime pas ? La monotonie. »
Perpétuelle évolution
Claude est pharmacienne intermittente en Bretagne. Après 15 années au comptoir, elle a eu l’opportunité d’assurer des cours en CFA de pharmacie, puis à l’Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) et en centre de formation professionnelle. Pour elle aussi, le hasard a sa part de responsabilité dans son investissement. Une collègue absente, une demi-journée de formation continue à assurer, puis des corrections d’examens, la rencontre avec d’autres pharmaciens formateurs, les sollicitations qui se multiplient au fil des rencontres… Le tout associé à un goût pour la formation qu’elle ressent depuis quelque temps. Aujourd’hui, cette activité a pris le pas sur l’officine. Pour autant, elle tient à rester en pharmacie. « Je pense qu'il est absolument nécessaire de garder le contact avec la réalité du terrain, il me paraît important de conserver les deux activités en parallèle », souligne Claude. Son statut de remplaçante lui permet d’organiser son emploi du temps « à la carte » et de concilier plus aisément ses engagements. Ce que Claude en retire ? « Une très grande satisfaction de transmettre des connaissances, un plaisir d’échanger avec de futurs soignants ou des professionnels aguerris. » Elle apprécie aussi « la nécessité de se remettre en question et de retravailler certains sujets » exigée par la formation de ses pairs ou d’autres soignants.
Élue ordinale en 2007, Valérie Bourey de Cocker est pharmacienne adjointe à La Tour-du-Pin (Isère), où elle a été maire adjointe et présidente d’une association locale. Lorsqu’elle se présente aux élections de l’Ordre, son objectif est d’être force de propositions dans un contexte de grande évolution pour la profession. Si elle n’a plus de mandat municipal lorsqu’elle s’investit à l’Ordre, elle poursuit pendant quelque temps son activité associative avant de passer la main. D’autant qu’elle devient vice-présidente de la section D en 2012. Depuis 2015, elle est élue au conseil national et apprécie de travailler avec les élus des autres sections. « Cela m’offre une ouverture plus grande à nos autres métiers de pharmacien et me permet d’aborder les sujets différemment, pas seulement à travers le prisme officinal. » À temps partiel à l’officine, elle n’éprouve pas de difficulté à concilier travail et activité ordinale, bien que cette dernière soit de plus en plus importante. Élue au bureau du conseil national, elle participe activement à la commission de liaison inter-Ordres (CLIO), elle a aussi pris en main les dossiers DASRI, Cyclamed et environnement, et elle est missionnée depuis octobre dernier par le Conseil national de l’Ordre au comité d’expertise sur l’intérêt public de l’Institut des données de santé (INDS). Pas d’autres engagements en vue pour Valérie Bourey de Cocker qui explique avoir des projets déjà très prenants et vouloir « s’investir complètement », d’autant que les missions du pharmacien, tout comme les fonctions ordinales, « sont en perpétuelle évolution ». Épanouie dans ses activités, la pharmacienne ne regrette aucun de ses engagements.
Histoire familiale
Catherine Pamart a choisi de s’engager syndicalement. Membre de FO Pharmacie depuis une vingtaine d’années, elle a attendu que ses enfants grandissent avant de s’investir, mais reconnaît qu’il existe « une histoire familiale » avec des parents « investis auprès de plusieurs associations ». Lorsqu’elle se syndique, elle ne rencontre aucun problème dans son travail d’adjointe à Wattignies (Nord), mais arrive à un moment charnière de sa vie. « Mon mari était décédé, je savais que je ne m’installerai pas, je voulais faire plus, sortir du cadre de la pharmacie. » D’abord simple adhérente, Catherine Pamart entre au syndicat départemental de FO Lille, puis devient trésorière adjointe et se charge des cotisations avant de rejoindre la commission exécutive. « C’est une bonne équipe dans laquelle je me sens bien. »
Pour Catherine Pamart aussi, le jeu des réseaux fait son œuvre. « C’est grâce au syndicat que j’ai été sollicitée pour me présenter aux élections ordinales, puis qu’on m’a invitée à des réunions de la Fédération Addiction. Parce qu’on vous rencontre à diverses occasions, on pense à vous plus facilement. Maintenant que la retraite arrive dans quelques mois, j’espère bien continuer certaines activités. » Ainsi, elle intervient au CFA de Villeneuve-d’Ascq, notamment pour corriger les examens de travaux pratiques des préparateurs en devenir, et, tout comme pour son implication syndicale et les réunions de la Fédération Addiction, elle compte poursuivre au-delà de la retraite. En revanche, elle ne pourra pas se présenter aux prochaines élections ordinales. Loin d’imaginer réduire ses engagements, Catherine Pamart pense s’investir dans une association humanitaire et faire aussi la part belle aux loisirs.
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