MÉTIER EXERCÉ, relations avec sa famille, éducation thérapeutique… L’environnement pèse à hauteur de 50 % dans notre santé. Dans ce contexte, le rôle du pharmacien apparaît incontournable. « Par son écoute et ses conseils de prévention, il aide le patient à éviter l’isolement », souligne Thierry Barthelmé, président de l’UTIP, en préambule à cette journée nationale de formation. Ouvrir de nouvelles pistes de réflexion pour l’exercice professionnel, tel était l’objectif de la manifestation qui a réuni plus d’une centaine de pharmaciens. « Nous sommes de plus en plus confrontés aux questions de nos patients sur les bons choix à opérer pour mieux vieillir. Nous, pharmaciens, nous nous interrogeons également sur les meilleures approches à employer pour empêcher la dépendance », ajoute Jean Orset, vice-président de l’UTIP.
Premier constat, dressé par le Dr Jean-Pierre Aquino, gériatre et président du Comité de suivi national du plan Bien vieillir : « Si les situations personnelles sont très hétérogènes, à âges identiques, le vieillissement a des effets variables selon les personnes et vient accentuer les inégalités. »
Un plan pour accompagner les jeunes retraités..
L’objectif est donc de tirer le meilleur parti de ses compétences, et de les optimiser en s’adaptant. Le rôle de l’environnement et la responsabilité de l’individu sont déterminants en la matière. Mais le constat est sans appel : la proportion de personnes âgées augmente, surtout les personnes de 85 ans et plus, et - une première - on assiste à l’émergence de familles à cinq générations. L’espérance de vie des hommes est montée à 77,6 ans et celle des femmes à 84,5 ans.
Outre l’espérance de vie, les pathologies elles-mêmes ont évolué : les maladies létales se sont transformées en maladies chroniques, et des pathologies invalidantes ont émergé, comme la maladie d’Alzheimer. Pourtant, si l’effort de prévention doit se poursuivre, il est difficile d’anticiper : le rôle du niveau social et économique des personnes n’est pas à négliger. « Plusieurs variables entrent en ligne de compte dans l’avancée en âge : estime de soi, gestion du temps, sens de la vie, aptitude au bonheur… »
Des éléments - renforcement du lien social, alimentation équilibrée… - qui servent de colonne vertébrale au nouveau plan Bien vieillir, présenté en janvier 2007, et portant sur la période 2007-2009. 168 millions d’euros sur trois ans sont prévus pour aider les jeunes retraités - de 55 à 75 ans - à bien commencer leur nouvelle vie.
« Il s’agit de dépister et de prévenir, lors de l’arrêt de l’activité, les facteurs de risque, précise Jean-Pierre Aquino. Dans ce but, nos trente deux mesures encouragent la pratique d’une activité physique, le bon usage des médicaments et la solidarité entre les générations. » Le développement de la recherche et de l’innovation, la prévention des pathologies influençant la qualité de vie, et l’inscription du Plan dans la dimension européenne comptent également parmi les objectifs.
Le pharmacien a ici un grand rôle à jouer en matière d’éducation thérapeutique, pour encadrer le patient âgé. Le Plan Alzheimer entend également améliorer le dialogue et renforcer les consultations sur la mémoire. « Il faut soutenir les aidants familiaux en tenant compte d’une spécificité : il y aura davantage de personnes âgées dépendantes et moins d’aidants d’ici à 2040. » En effet, les baby-boomers, qui prennent leur retraite actuellement, se voient plus comme des aidants gestionnaires de la situation de leur parent que comme des prestataires.
Cette fragilité des personnes âgées pose un véritable défi aux professionnels de santé : elles se trouvent dans un état d’instabilité liée à la réduction de leurs réserves physiologiques. « La prévention est donc un enjeu majeur, à commencer le plus tôt possible dans la vie active, en prenant en compte l’individu dans sa globalité », conclut le Dr Aquino. C’est ici, bien sûr, que le pharmacien peut intervenir, en attirant dans une démarche préventive le plus grand nombre et notamment les patients qui ont le plus besoin de se montrer attentifs.
Identifier les plus fragiles.
Mais comment identifier les personnes les plus fragiles ? À partir de quel âge est-on très âgé ? C’est sur ces questions majeures que s’est penché Frédéric Balard, docteur en anthropologie et ingénieur de recherche à l’INSERM pour l’équipe démographie et santé : « Selon le National Institute of Aging, les seniors auraient entre 65 et 75 ans et les personnes âgées entre 75 et 85. On parle de personnes très âgées à partir de 85 ans et plus. » Depuis vingt-cinq ans l’espérance de vie a continué de progresser de trois mois par an, donc les plus vieux ont environ 90 ans maintenant. En un siècle – de 1900 à 2000 – l’espérance de vie à la naissance en France est passée de 40 à 78 ans.
Les patients âgés ressentent un affaiblissement, et restreignent leurs activités. Les très âgés sont fragiles : ils sont les plus touchés par la perte d’autonomie. Ils cumulent la perte de poids, la baisse de la force physique pour attraper les objets, la faible endurance, la lenteur et le faible niveau d’activité. Une fragilité qui induit un risque de marginalisation, car le patient ressent un décalage entre ses valeurs, son mode de vie et son identité.
Cependant la perception du vieillissement diffère selon les cultures : en Occident, la personne âgée est marquée par ses pertes. « A contrario, souligne Frédéric Balard, dans des sociétés traditionnelles, elle est celle qui porte la connaissance. » Dans nos contrées, certains auront tendance à nier leur fragilité tandis que d’autres se laisseront vivre.
Dès lors, que peut faire le pharmacien pour accompagner le patient âgé ? D’abord l’encadrer pour la prise de son traitement « L’officinal doit se montrer vigilant car les malades ont des problèmes d’observance liés à leur affaiblissement sensoriel. Ils peuvent ne pas lire les prescriptions, oublier leurs médicaments, se tromper dans la prise. D’autres auront du mal à se rendre à la pharmacie et devront être accompagnés. »
Le médicament : outil de communication.
Dans le cas fréquent de patients traités à leur domicile, le pharmacien peut représenter l’épicentre autour duquel va s’organiser un véritable réseau de soins et associera des malades à la démarche. « Il possède une relation privilégiée avec le patient. C’est un atout qui fait de lui un acteur indispensable dans la chaîne de santé », pointe Bernard Charles, président des entités Carla chez Pierre Fabre (prise en charge de la dépendance).
En officine, les professionnels de santé pourront également tenter de détecter les effets iatrogènes des traitements. Le lien avec le malade ? C’est le traitement lui-même qui va l’établir. En effet, pour le patient âgé, le médicament s’avère un repère identitaire qui l’individualise en tant que personne et lui donne un rôle social. « L’officinal peut l’utiliser comme un outil de communication, d’où l’importance du choix des mots pour formuler les explications nécessaires : posologie, changement du nom du traitement… Autant d’attitudes qui permettront de gagner sa confiance. »
Car l’objectif reste d’encourager les personnes à vivre leurs dernières années de la manière la plus active possible. Pour mener à bien cette mission d’accompagnement, le pharmacien doit se montrer attentif aux moindres signes de fragilité des patients. Il est leur référent le plus évident : « Le pharmacien représente, pour la personne âgée, le soignant qui sait écouter », conclut Frédéric Balard.
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