LES CONTRÔLES s’enchaînent dans les officines. Lorsqu’il ne s’agit pas des agents du fisc (« le Quotidien » du 20 juin), ce sont les services douaniers qui débarquent dans les pharmacies. Motif de la procédure : la vente d’alcool à 90° aux particuliers. Et la visite des douaniers n’est pas obligatoirement liée à la délivrance de quantités exorbitantes. En effet, les douanes semblent aujourd’hui interpréter différemment les textes encadrant la dispensation d’alcool dans les officines. « Depuis la suppression des procédures de contingent d’alcool par la loi de finances pour 1999, les pharmaciens ont pour habitude de vendre en exonération de droits d’accises de l’alcool pur aux patients ainsi qu’aux professions médicales et paramédicales, rappelle l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF). Ils effectuent pour cela une déclaration préalable de profession à la Direction régionale des douanes et droits indirects compétente. » Mais depuis, une ordonnance de 2001 modifiant le code général des impôts a réformé les dispositions de cette exonération. Cette ordonnance « prévoit que sont exonérés de droits d’accises les alcools utilisés à des fins médicales ou pharmaceutiques dans les hôpitaux et établissements similaires ainsi que dans les officines », précise l’UNPF. Les douanes, elles, font une lecture restrictive de la nouvelle disposition. Pour elles, explique le syndicat, « seul l’alcool utilisé dans la pharmacie est exonéré des droits et l’alcool à 90° délivré par les pharmaciens d’officine doit l’être en droits acquittés depuis cette ordonnance de 2001, et ce dès le premier litre délivré ». « Les douanes estiment que les flacons d’alcool à 90° (ou tout autre titre) en flacon de 125 ml ou 250 ml, fussent-ils prescrits et fabriqués industriellement depuis de nombreuses années et dispensés à usage de désinfectant, le sont en infraction au code général des impôts », observe la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), qui déplore que les douanes n’aient jamais communiqué aux instances professionnelles, et sans doute pas non plus aux fournisseurs d’alcool, et encore moins aux pharmaciens, leur nouvelle position en la matière. « On nous interdit de vendre, sauf à payer des droits d’accises, résume Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). C’est une lecture qui aurait pu être faite il y a dix ans. »
Cerise sur le gâteau : même si les officinaux avaient eu connaissance de ces nouvelles règles, ils n’auraient pas pu, en pratique, s’acquitter de la taxe, puisqu’aucune procédure n’a été mise en place, s’indigne Gilles Bonnefond. « À qui dois-je payer, à un contrôleur des douanes ou à mon fournisseur ? interroge le président de l’USPO. On nous demande de verser des droits d’accises, mais on ne nous en donne pas les moyens. Il y a un biais auquel les douanes n’apportent pas de réponse. »
Appel au boycott des ventes.
Dans ce contexte, les trois syndicats d’officinaux appellent leurs confrères à cesser immédiatement toute dispensation d’alcool pur (sauf alcool dénaturé ou modifié), quel que soit le volume, même sur prescription médicale. D’autant que les pénalités peuvent être lourdes, de l’ordre de 15 euros par litre dispensé, avec une rétroactivité allant jusqu’à trois ans. Et, à la clé, des risques pour la pérennité des entreprises sanctionnées.
Les alertes lancées par les syndicats auprès de la direction générale des douanes et les appels à la discussion n’y ont rien changé. Les contrôles et les poursuites continuent, quelles que soient les quantités délivrées. Une rencontre a tout de même eu lieu à la mi-mai, mais sans résultat probant. Pourtant, « le directeur général des douanes admet que les textes sont un peu ambigus, et qu’il va faire une proposition au Conseil central A de l’Ordre pour mieux définir les modalités d’application », déclarait Patrice Devillers à l’issue de cette réunion où il représentait l’USPO. Pour la FSPF, c’est désormais aux autorités de santé de se prononcer sur ce dossier. Pour l’heure, les syndicats recommandent donc de ne plus courir de risque et de boycotter purement et simplement les ventes d’alcool.
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