LES TRANSFERTS et les regroupements sont aujourd’hui régis, pour l’essentiel, par l’article 59 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008, et sont indissociables des règles qui encadrent la création des officines. En effet, la loi favorise le regroupement des officines, notamment en gelant temporairement les licences libérées après un regroupement, et autorise théoriquement les transferts sur l’ensemble du territoire afin d’optimiser leur répartition.
La loi a prévu le gel des créations d’officine jusqu’au 1er janvier 2010 dans les communes dépourvues d’officine et dans les zones franches urbaines (ZFU), les zones urbaines sensibles (ZUS), les zones de redynamisation urbaine (ZRU) et les zones de revitalisation rurale (ZRR). Toutefois, les créations restent néanmoins possibles dès lors qu’aucun transfert ou regroupement n’a permis de satisfaire les besoins des populations des communes dépourvues d’officine et celles des zones sensibles. À compter de 2010, les pharmaciens qui demandent une création doivent démontrer que les seuils de population prévus par la loi sont respectés depuis au moins deux ans dans la commune (nouvel article L 5125-11 du Code de la santé publique).
En pratique, il peut donc être procédé à une ouverture d’officine par création, par transfert ou par regroupement, mais dans des conditions qui varient selon que la commune a plus ou moins de 2 500 habitants recensés et qu’elle est dépourvue ou non d’officines. Ainsi, dans les communes qui comptent au moins 2 500 habitants et qui n’ont pas d’officine, une ouverture ne peut être autorisée que par voie de transfert d’une officine installée dans une autre commune. Dans les communes d’au moins 2 500 habitants ayant au moins une officine, l’ouverture d’une nouvelle officine peut être autorisée à raison d’une autorisation par tranche complète de 3 500 habitants recensés, mais cette ouverture doit se faire par voie de transfert.
Enfin, dans les communes de moins de 2 500 habitants qui n’ont plus d’officine à la suite d’une cessation définitive d’activité, l’installation d’une officine peut être autorisée par un transfert, à condition que la population desservie par cette officine soit au moins égale à 2 500 habitants.
Transferts infra ou intracommunaux.
Pour les transferts, les règles ne sont pas les mêmes, par conséquent, selon que l’opération a lieu à l’intérieur de la même commune ou vers une autre commune. Dans le premier cas, le transfert est libre, sous réserve qu’il réponde de façon optimale aux besoins de la population résidente du quartier d’accueil (article L 5123-3 CSP), mais sous réserve aussi du droit, pour le préfet (ou à partir du 1er avril 2010 de la DDASS ou de l’ARS) de désigner un autre secteur d’implantation ou d’imposer une distance minimum par rapport à une autre officine. Et lorsque le transfert a lieu vers une autre commune, il y a un quota de population à respecter à la fois pour la commune de départ et dans la commune d’accueil, et le préfet peut toujours désigner un autre quartier d’implantation mieux adapté ou prendre un arrêté de distance.
« En pratique, il faut toujours démontrer qu’il n’y a pas d’abandon de clientèle dans la commune de départ et que le transfert répond au critère d’optimisation des besoins en médicaments de la population de la commune d’arrivée », insiste Corinne Daver, avocate au cabinet Fidal, qui animait une conférence sur ce thème à Pharmagora.
Attention également aux conséquences du transfert : en effet, sauf cas de force majeure, une officine créée ou transférée depuis moins de cinq ans ne peut faire l’objet d’une cession totale ou partielle ni être transférée ou faire l’objet d’un regroupement. Une officine issue d’un regroupement ne peut pas non plus être transférée avant l’expiration du même délai, sauf cas de force majeure. Toutefois, cette disposition n’est pas applicable aux personnes physiques ou morales détenant une partie du capital social et des droits de vote d’une société d’exercice libéral. « D’où l’intérêt de bien réfléchir à l’opportunité de la mise en société avant toute décision de transfert ou de regroupement et, dans ce cas, à la forme de société à retenir », souligne Alexandre Arbabe, avocat chez Fidal.
Attention, encore, aux conséquences de l’opération en matière de droit du travail. Un transfert ou un regroupement entraîne un changement de lieu de travail des salariés, qui peut entraîner, lui-même, une modification de leurs contrats de travail. « Or, si le transfert est effectué hors de la commune avec un changement de secteur géographique, il faut l’accord des salariés à ce changement, à défaut de quoi des indemnités de rupture sont dues par le titulaire, précise pour sa part Rodolphe Meneux, avocat chez Fidal. Pour éviter toute difficulté sur ce point, l’employeur peut avoir intérêt à insérer une clause de mobilité dans les contrats de travail des salariés. »
Regroupements compliqués ?
En ce qui concerne plus particulièrement les regroupements, d’autres précautions doivent encore être prises, et d’abord concernant les locaux. On sait en effet que deux options sont possibles : soit le regroupement est effectué à l’emplacement d’une des officines regroupées, soit il est effectué dans de nouveaux locaux. Les pharmaciens regroupés peuvent donc avoir à signer un nouveau bail commercial ou à demander un permis de construire. « Or, même si décision du préfet d’autoriser le regroupement n’est pas attaquée par d’autres pharmaciens ou si le recours contre cette décision échoue, le permis de construire, lui, peut être attaqué, et l’annulation du permis peut faire échouer toute l’opération », prévient pour sa part Me Bastien Bernardeau, notaire à Poitiers et membre du réseau de notaires spécialisés en officine Pharmétudes.
Dans tous les cas, le regroupement, comme le transfert, doit répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidente, et il faut donc un lieu qui garantisse un accès permanent du public à la pharmacie et permette à cette dernière d’assurer un service de garde ou d’urgences. Dans tous les cas aussi, et comme pour les transferts, le préfet peut prendre un arrêté de distance minimum entre l’officine regroupée et les officines existantes, ou même imposer un secteur déterminé.
Pour ces raisons et pour bien d’autres tenant à la complexité de la procédure du regroupement et à son caractère aléatoire, et en raison du fait également que le regroupement interdit tout transfert de l’officine regroupée pendant un délai de cinq ans, on peut préférer le système de l’abandon de licence. Celui-ci consiste en fait à racheter la clientèle des pharmacies que l’on voulait regrouper, et à restituer les licences. « Ce système est moins administratif et donc plus souple. Il marche bien pour les petits commerces », explique Me Bernardeau. L’inconvénient, en revanche, est que l’on ne prend pas alors en compte la ou les licences libérées pour le calcul des quotas de population.
Avant tout regroupement, un audit préalable est donc absolument nécessaire. Et il est préférable de s’y prendre tôt, l’instruction d’une demande de regroupement (ou de transfert) prenant un minimum de quatre ou cinq mois.
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