« La Question Finkler » (1), qui a valu à Howard Jacobson le Man Booker Prize l’année dernière, est le premier livre de cet écrivain traduit en français, bien qu’il ait signé une dizaine d’ouvrages et que deux de ses précédents romans aient déjà figuré dans la sélection du principal prix littéraire britannique. Howard Jacobson est éditorialiste au quotidien « The Independant » et surnommé « le Philip Roth anglais » car il met en scène des personnages qui se définissent tous par leur judéité britannique.
« La Question Finkler » met en scène trois hommes qui se sont connus dans leur enfance, que la vie a séparés sans qu’ils se perdent de vue et qui, le jour où ils sont réunis, se remémorent leur passé. En rentrant chez lui, l’un d’eux, employé dans une société de sosies, est victime d’une agression. Sans réelle gravité, sauf qu’il
finit par se persuader qu’on l’a pris pour un Juif. Roman sur l’amitié masculine, sur l’amour et la signification de la judéité aujourd’hui, le livre est aussi irrévérencieux qu’hilarant car l’auteur y déploie toutes les facettes du rire.
Baroudeur des lettres – il a été correspondant de guerre pendant plus de vingt ans, mais il est aussi membre de la Real Academia Española de las Letras – et des mers – il est passionné de navigation –, Arturo Pérez-Reverte est l’auteur des « Aventures du capitaine Alatriste » et du « Tableau du maître flamand ». L’aventure continue avec « Cadix, ou la diagonale du fou » (2), qu’il a voulu au croisement de différents types de romans : historique, d’amour, policier, d’espionnage, de guerre, maritime...
L’histoire se situe à Cadix, en 1811, alors que la ville est cernée par les troupes napoléoniennes. Dans la cité soumise au blocus, mais où les riches continuent de se recevoir et le gouvernement de faire semblant de gouverner, des jeunes filles sont sauvagement assassinées et leurs corps découverts chaque fois à l’endroit précis où tombent les bombes françaises. C’est là l’intrigue principale, qui confronte un policier hors du commun à un mystère qui touche à la géographie et aux mathématiques autant qu’à la psychologie, mais Arturo Pérez-Reverte campe bien d’autres personnages intrigants et il nous attire sur bien d’autres pistes. Un régal pour les amateurs d’aventures.
Prix Médicis étranger pour « Léviathan » en 1993, Paul Auster n’a cessé de conforter, depuis, son succès en France. Après « Invisible », il poursuit dans « Sunset Park » (3) sa réflexion sur la difficulté, surtout pour les jeunes, de trouver leur place dans une
société désorientée et démissionnaire.
Le héros du roman est un jeune homme issu d’une famille de l’Upper Class américaine, qui n’en finit pas de culpabiliser après avoir causé accidentellement la mort de son demi-frère et qui, sept ans après le drame, abandonne ses études et fuit le domicile familial, d’abord à Miami puis, de retour à New York, dans une maison abandonnée de Sunset Park, où il retrouve d’autres écorchés vifs. Ainsi que son père, confronté à la crise financière et au délitement de son couple, prêt à tout pour panser des blessures dont il ignore qu’elles sont inguérissables.
Lorsqu’on sait que « Les belles choses que porte le ciel » a été couronné par le prix du meilleur premier roman étranger en 2007, et que son auteur, Dinaw Mengestu, dont la famille a fui l’Éthiopie pour les États-Unis, s’est installé la même année à mi-temps à Paris, tant la ville l’a séduit, on ne peut que s’intéresser à son deuxième roman, au titre toujours aérien, « Ce qu’on peut lire dans l’air » (4). D’autant que « The New Yorker » a classé Dinaw Mengestu parmi les 20 auteurs de moins de 40 ans les plus prometteurs.
Le récit s’articule autour de deux couples :
celui du narrateur, Jonas, né dans l’Illinois de parents ayant fui la révolution éthiopienne, qui enseigne et aide les immigrés à remplir les formulaires de demande d’asile dans un bureau d’aide sociale, qui est marié à Angela, une avocate, noire comme lui ; et celui de ses parents Yosef et Mariam, qui n’ont pas de mots pour dire leur passé. Il convient alors à Jonas de combler les vides. C’est donc avec les mots, entre « souvenirs imaginés » et vrais mensonges, qu’il va tenter de reconstruire son identité. Un livre sur l’immigration ? Certes. Mais bien plus, sur la vérité des émotions.
La guerre des sexes a eu lieu, du moins dans le dernier roman traduit – le 14e chez l’éditeur – de l’écrivain japonais Murakami Ryû, dont le titre est faussement lénifiant : « Chansons populaires de l’ère Showa » (5). Lauréat du Goncourt japonais avec son premier roman « Bleu presque transparent » et devenu un auteur-culte avec « les Bébés de la consigne automatique », Murakami Ryû est à l’origine d’une œuvre particulièrement sombre et désespérée.
Le roman met en scène six jeunes gens désœuvrés, qui aiment à se déguiser pour chanter des vieilles chansons pop autour d’un karaoké, et six femmes d’un certain âge réunies en « association des Midori », le prénom qu’elles ont en commun en même temps que leurs échecs sentimentaux. L’agression sexuelle de l’une des Midori par un des jeunes va marquer le début d’une guerre aussi sanglante que grotesque mais qui doit aller jusqu’à sa conclusion, la violence étant ici présentée comme seule pouvant donner un sens à un monde voué à la solitude.
(2) Seuil, 763 p., 23 euros.
(3) Actes Sud, 317 p., 22,80 euros.
(4) Albin Michel, 369 p., 22 euros.
(5) Philippe Picquier, 198 p., 17,50 euros.
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