ZOOM SUR L’ÉQUIPEMENT
SE RENDRE chez le pharmacien pour contrôler sa glycémie ou son cholestérol, voilà une attitude qui n’est pas encore entrée dans les mœurs des patients français. Pourtant, à l’heure où le monde de la santé est de plus en plus modelé par la loi HPST, le rôle du pharmacien en matière de diagnostic devrait sensiblement se renforcer. Le marché des outils de diagnostic connaît une croissance régulière depuis plusieurs années, + 3 % en 2008, + 4,5 % en 2009 et l’année 2010 (non consolidée à date) devrait être encore en tête des segments les plus dynamiques selon Laurent Keiser, directeur des ventes nationales de l’OCP. Mais cela ne semble pas suffisant et Sophie Nicolas, responsable marketing de Phœnix Pharma estime nécessaire de le dynamiser. Le problème principal est de faire connaître aux patients français les compétences des pharmaciens et les possibilités qu’il y a à dépister et prévenir des pathologies par leur intermédiaire. Les groupements ont donc à cœur de travailler l’aspect communication autour de ces compétences. Ce qu’ils font déjà depuis longtemps pour certains d’entre eux, mais l’évolution législative, tout en valorisant leur travail comme l’affirme Guénola Giangrasso, directrice du label Pharmactiv Optimum, va les conduire à accentuer leurs efforts à l’égard de leurs adhérents.
Une sélection en amont.
Les pharmaciens ont deux possibilités très complémentaires pour se positionner sur ce marché, soit s’équiper pour assurer le diagnostic en officine des patients qui souhaiteraient dépister d’éventuelles pathologies et leur fournir le conseil idoine, soit, ou en sus, leur conseiller des appareils d’autodiagnostic quand il s’avère nécessaire de suivre leur tension régulièrement par exemple. « La démarche est la même dans les deux cas » assure Laurent Keiser, seul le volume, et bien sûr la marge, diffèrent. Mais comment choisir le bon appareil ? Quand on est membre d’un groupement, le choix est guidé puisque les outils sont déjà sélectionnés en amont par ledit groupement, une ou deux références, en général les marques leaders assorties parfois d’une marque répartiteur. « Nous travaillons avec les laboratoires les mieux positionnés et les plus reconnus » affirme Guénola Giangrasso, résumant ainsi l’avis de plusieurs groupements et répartiteurs. Ce choix diffère cependant beaucoup d’un marché à l’autre. Celui des tensiomètres est le plus compétitif : de très nombreux produits y sont disponibles, « mais ce sont plus ou moins tous les mêmes » constate Yves Morvan, P-DG du groupement DirectLabo. De plus, la qualité n’est pas toujours au rendez-vous, loin s’en faut. Des garde-fous permettent toutefois aux pharmaciens qui n’auraient pas recours à la sélection de groupements, de ne pas acheter des produits de mauvaise qualité grâce aux normes de l’Union Européenne (NF) et à l’agrément de l’AFSSAPS. « Il y a aussi de bons appareils qui ne sont pas forcément haut-de-gamme » estime Frédéric Deloeil, directeur général adjoint de PHR. Les groupements, pour leur part, jouent la carte de la sécurité et référence souvent Hartmann, qu’ils considèrent comme étant la marque leader.
Le marché des outils de glycémie est différent : « les références y sont moins banalisées et les prix y sont moins disputés » constate Laurent Keiser. Certes, « de nouveaux laboratoires apparaissent et sont très performants » juge pour sa part Sophie Nicolas, et l’innovation existe comme par exemple « des lectures plus rapides et des possibilités de diagnostic sans piqûre » selon Yves Morvan, mais là aussi, la prime aux leaders fonctionne, les groupements et répartiteurs préférant jouer la sécurité. Le référencement n’est pas du reste qu’une question de positionnement prix et de prestige de la marque. Pour Anne Pointcheval, directrice marketing opérationnel de Giropharm, « il faut que les fournisseurs soient dans l’envie de construire quelque chose avec nous. » L’engagement des laboratoires dans la durée et l’implication dans la construction d’offres adéquates sont autant d’arguments pour les groupements.
Commandes directes ou répartiteurs.
Pour les pharmaciens qui ne sont pas membres de groupements et n’ont pas envie de le devenir, s’équiper en appareils de diagnostic revient à faire le choix entre répartiteurs et commandes directes auprès des laboratoires. Ces derniers permettent d’avoir de bonnes remises, mais les répartiteurs soulignent à l’instar de Sophie Nicolas que les laboratoires demandent des engagements sur des volumes. « Or, les pharmaciens qui souhaitent fidéliser leurs patients par le conseil cherchent à créer des espaces de confidentialité, et donc souvent à réduire celui des stocks, nous pouvons proposer les mêmes prix sans engagement sur le volume avec uniquement des commandes au fil de l’eau, permettant ainsi aux pharmaciens de mieux gérer leurs espaces. »
Les répartiteurs privilégient aussi les marques leaders, mais leur métier les oblige à être à l’écoute de leurs clients, qui peuvent parfois être prescripteurs. Ainsi, quand un produit est commandé plus de trois fois, une alerte mise en place par Phœnix Pharma permet de référencer le produit en question. À l’instar des groupements, ils travaillent aussi sur des offres globales, c’est ainsi que l’OCP a créé sous sa propre marque, Pharmea, une gamme réunissant tensiomètre, test de grossesse, test d’ovulation et thermomètre.
La stratégie d’achat ne fait pas tout. « Beaucoup de choses se font dans les pharmacies » remarque Guénola Giangrasso. « Mais pas toujours de manière organisée, il est nécessaire de professionnaliser cette activité et lui donner la visibilité dont elle a besoin. » Rares sont les groupements qui se contentent donc juste de leur rôle de centrale d’achat. Bien souvent, leurs offres sont des kits spécialisés dans un domaine précis, incluant appareils de diagnostic, mais aussi selon les groupements des CD-ROMS de formation et/ou d’explication, cartes de rendez-vous, des fichiers clients, quiz et carnets de santé avec évolution des résultats de glycémie ou de cholestérol par exemple, tous outils qui permettent de structurer l’offre du pharmacien en matière de dépistage et de prévention.
De la PLV peut aussi être proposée. Les pathologies que les pharmaciens suivent le plus souvent sont liées au contrôle de la glycémie et du cholestérol, et tout ce qui leur est lié. C’est ainsi que de plus en plus l’obésité, ou plus exactement les conséquences de l’obésité font partie des priorités des groupements. « Nous avons profité de la journée européenne contre l’obésité organisée en mai pour procéder à une campagne d’affichage et de sensibilisation avec notamment des explications autour de l’IMC » évoque Anne Pointcheval, illustrant ainsi une démarche qui consiste à créer un événement afin d’amener les clients à se faire dépister.
Ne pas empiéter sur les plates-bandes des médecins.
Mais le diabète et les maladies cardiovasculaires ne sont pas les seules pathologies que les pharmaciens peuvent aider à dépister et à prévenir : l’asthme par exemple est aussi un axe privilégié par le groupe PHR qui propose un kit souffle en deux parties, l’une consacrée au dépistage et l’autre au suivi de traitement, qui contient notamment un spiromètre électronique que le client peut acheter s’il le souhaite. Autre domaine où les pharmaciens peuvent agir, celui du sevrage tabagique, l’un des axes de développement de Giropharm. Au-delà du diabète, des maladies cardio-vasculaires, de l’asthme et du sevrage tabagique, cela devient plus difficile pour les groupements d’agir. « Nous avons essayé d’organiser des séances de dépistage des problèmes auditifs, mais c’est un peu plus compliqué à faire, tout comme les problèmes liés à la vision » explique Frédéric Deloeil. Les groupements font d’ailleurs bien attention de préciser qu’en aucun cas, les prestations de leurs adhérents ne viennent empiéter sur les plates-bandes des médecins. « Notre mission s’arrête là où s’arrête celle des pharmaciens » note Anne Pointcheval. Une fois la pathologie détectée, le patient est invité à consulter son médecin.
La plupart de ces prestations proposées par les groupements sont incluses dans l’adhésion de leurs membres. Toutefois, selon leur degré d’adhésion, il peut leur être demandé un supplément. Cela pose le problème de l’équation économique à laquelle sont confrontés les pharmaciens, ces prestations ont un coût, et pour l’instant, les clients ne sont pas prêts à payer. Elles représentent surtout un outil de fidélisation et une façon d’améliorer son image de marque. « Certains clients sont pourtant prêts à payer » estime Frédéric Deloeil, y voyant peut-être un début d’évolution. Peut-être qu’avec un espace de confidentialité organisé et une offre adaptée, la valeur ajoutée du pharmacien sera reconnue. Yves Morvan espère ainsi que l’offre, actuellement peu innovante selon lui, évoluera vers des outils combinés reliés à Internet et le futur DMP.
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