LA PROFESSION n’a pas réussi à se mettre d’accord. Mardi dernier, juste avant de rencontrer les représentants du ministère de la Santé et de Bercy, les syndicats d’officinaux, l’Ordre, les groupements et l’association de pharmacie rurale (APR) s’étaient donné rendez-vous pour finaliser le projet de décret relatif aux SEL (sociétés d’exercice libéral) et aux SPF-PL (1). On pensait les différentes parties proches d’un accord, de nombreux points ayant fait l’objet d’un consensus. Mais patatras, l’article 5-1 de la loi de 1990 instituant les SEL, modifiée par la loi MURCEF de 2001, créé la zizanie. Cet article, qui permet une distorsion entre droits de vote et capital, rend de ce fait possible qu’un pharmacien exploitant n’ait pas la majorité des parts de l’officine dans laquelle il exerce. Comme c’est le cas avec les SELAS (SEL par actions simplifiées).
D’un côté, l’UNPF (2), l’USPO (3), les groupements (4), l’Ordre (les sections A et D) et l’APR, n’ont rien contre le maintien de cette disposition. Mais, de l’autre, la FSPF (5) demande sa suppression pure et simple. Résultat, cette dernière a refusé de signer le projet de décret remis la semaine dernière à l’administration et reprenant les différents points d’accord (voir encadré).
« Nous avons un principe intangible : les professionnels exploitants doivent être majoritaires en capital et en droits de vote dans l’officine où ils exercent », martèle Philippe Besset, président de la commission Économie de l’officine de la FSPF. Dans le cas contraire, celui-ci craint que le titulaire perde son indépendance professionnelle. Pire, il estime que, à terme, l’abandon de ce principe risque de se traduire par « l’ouverture du capital à tout le monde ». Autre argument avancé par le responsable syndical : « Si l’on permet à des pharmaciens de posséder 95 % des parts de 5 ou 6 officines, on va priver toute une génération de jeunes confrères de la possibilité d’accéder au capital des pharmacies. » Aussi, souhaite-t-il que les autres organisations professionnelles fassent marche arrière.
Arbitrage extérieur.
Mais elles ne semblent pas être de cet avis. « Le reste de la profession souhaite le maintien de l’article 5-1, afin de ne pas dénaturer la portée du texte consensuel », souligne l’UNPF, qui se dit déçue de l’issue de la réunion. Si l’on supprimait l’article 5-1, « le montage proposé dans le projet de décret serait remis en cause et le seul possible serait qu’une SPF-PL possède une SEL, qui détient elle-même une seule pharmacie », explique Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO. Pour lui, c’est la situation de blocage actuelle qui est dangereuse car elle laisse perdurer certaines pratiques, telle la prise de participations sans limite dans les SEL et donc les montages en cascade. Elle expose même la profession à un arbitrage extérieur, voire à un nouveau débat sur l’ouverture du capital à des non-pharmaciens. L’idée est loin d’être enterrée, comme en témoigne le rapport de Brigitte Longuet remis récemment à Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des PME (« le Quotidien » du 1er février). « Il faut régler le problème des SPF-PL et des SEL », affirme ainsi Gilles Bonnefond. « L’USPO, l’UNPF, l’Ordre, l’APR et les groupements sont tombés d’accord sur une position commune, où chacun à fait des concessions, souligne-t-il. La position de la FSPF nous fait revenir quatre ans en arrière, ce qui risque d’entraîner une exaspération de la part des services de Bercy. La présentation d’un texte de compromis nous aurait mis dans une position de force pour négocier, assure le président délégué de l’USPO. Cette absence de compromis est une faiblesse pour la profession. »
Un décret indispensable.
Les groupements sont, eux, furieux de la décision de la FSPF de ne pas signer. « La création des holdings est reconnue par tout le monde comme absolument indispensable au maintien du réseau, indique le président du CNGPO, Pascal Louis, quelque peu dépité. Et une des conditions pour que les SPF-PL aient un intérêt économique, c’est que le principe du 5-1 soit maintenu. » Et, à l’inverse de la FSPF, celui-ci d’affirmer que les SELAS sont une solution pour aider les jeunes à s’installer par une prise progressive de parts.
Plus modéré, Jean-Charles Tellier, président du conseil central A (titulaires) de l’Ordre, estime qu’il n’y a pas de réel désaccord avec la FSPF, le syndicat ayant accepté l’ensemble des points inscrits dans le projet de décret. En ce qui concerne les SELAS, l’ordinal souligne que le texte proposé limite à quatre le nombre possible de participations directes ou indirectes, ce qui réduit considérablement les montages en cascade. « Et que faire des quelque 300 officines actuellement exploitées en SELAS si l’on supprimait l’article 5-1 ? », s’interroge-t-il.
Quoi qu’il en soit, le projet de décret est aujourd’hui entre les mains des services de l’État qui ont prévu d’en discuter avec la profession à la fin du mois d’avril. D’ici là, la FSPF doit se réunir jeudi en assemblée générale pour se prononcer sur ce texte. Si elle maintient sa position, « c’est l’autorité de tutelle qui tranchera », prévient Jean-Charles Tellier, qui se veut toutefois optimiste. À suivre.
(2) Union nationale des pharmacies de France.
(3) Union des syndicats de pharmaciens d’officine.
(4) Collectif national des groupements de pharmaciens d’officine (CNGPO) et Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO).
(5) Fédération des syndicats pharmaceutiques de France.
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