IL NE S’AGIT pas, nous est-il dit clairement au début de ce livre très dense, de faire de l’écologie « un nouvel objet » d’études, d’étendre la morale à la nature. Ceci reviendrait au discours moralisateur habituel : nous habitons la planète, nous devons la respecter, ses richesses ne sont pas inépuisables, il faut préserver les générations futures.
Pour Émilie Hache, l’un des temps forts est l’effacement de tout distinguo entre humains et non-humains. De fait, nous avons affaire à des parcs peuplés d’animaux, ceux-ci entretiennent avec l’homme des rapports, tout ceci créant un donné de configurations déjà multiple. Ceci permet de définir par « morale écologique » le fait de s’intéresser non pas à la nature, mais à la façon dont nous pouvons vivre ensemble.
C’est sur le terrain de la philosophie pure que peut se poursuivre un intéressant débat. La nature relève-t-elle de ce « règne des fins » dont parle Kant, elle que nous avons dépouillée de tout respect, pour la ramener à l’ambition cartésienne d’en être « maître et possesseur » ?
Faut-il respecter chaque fourmi comme une « fin en soi » ? Que penser de l’idée de Hans Jonas d’un « appel » général du monde non humain, au sens où ce glacier partage notre histoire ? Il faudrait donc, non pas « répondre de », lourde responsabilité, toujours un brin culpabilisatrice, mais « répondre à », au non-humain comme à une familiarité ancienne, comme nous répondons au visage humain chez Levinas. Mais l’exemple de synergie que donne l’auteur, celui d’animaux d’élevage promis à la mort*, nous laisse perplexe. Non par sensiblerie de principe mais par cette affirmation : « Cinquante pour cent des éleveurs interrogés considèrent l’abattage comme la contrepartie du plaisir pris ensemble ! »
Preuve que nous restons bien dans une logique de poly-instrumentalisation des non-humains, dans laquelle les moyens sont érigés en fin en soi. Malgré son brio théorique, Émilie Hache ne nous convainc pas que ce ne soit encore Prométhée le vainqueur.
de penser en rond/La Découverte, 227 p., 19,50 euros.
* Il s’agit d’une étude de Jocelyne Porcher, « la Mort n’est pas notre métier », Éditions de l’Aube, 2003.
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