Menacée du fait des contraintes économiques, concurrencée par d’autres secteurs d’activités et notamment de nouveaux acteurs, la pharmacie française doit évoluer. De plus en plus d’experts le martèlent : la valeur ajoutée de l’officine s’appuie sur la compétence du pharmacien, la confiance de la population et la proximité qu’elle a su tisser avec ses patients. La pharmacie de demain pourrait donc être complètement tournée vers les services, devenir un lieu de vie qui privilégierait un lien personnalisé et de qualité, un véritable espace santé où la prévention, le diagnostic, l’accompagnement seraient tout aussi développés que la solution thérapeutique. À quoi ressemblerait cette pharmacie ? C’est la question que nous nous sommes posée.
Une vitrine axée sur l’information
Relais d’actions de santé publique, annonce d’événements en cours dans l’officine, affichage des compétences et spécialisations, mise en avant de l’équipe officinale, de nombreuses possibilités peuvent être imaginées pour la vitrine de la pharmacie « services ». Qu’il s’agisse d’affiches ou d’écrans, dès la vitrine, le positionnement de l’officine doit être explicite : santé, prévention, accompagnement, accueil, compétence en sont les maîtres mots. Des vitrines claires et épurées qui laissent deviner l’intérieur et incitent à entrer. L’Académie de pharmacie souhaite d’ailleurs « qu’une réflexion s’engage afin de promouvoir la vitrine comme outil d’information pour la prévention. L’affichage de messages de prévention et d’éducation à la santé, accessibles même sans entrer dans l’officine, est de nature à sensibiliser le public de passage sur des thèmes de santé et à l’inciter au dialogue avec le pharmacien ».
Une officine pensée pour ses clients
Après cette entrée en matière, l’intérieur doit nécessairement être traité en cohérence. Il doit être tourné vers le patient/ client. L’offre est compréhensible, l’affichage également. Certains mots du jargon officinal tels que « médication familiale » n’ayant pas toujours de sens pour tout un chacun. Theodore Levitt disait que « les gens ne veulent pas de perceuse, ils veulent faire des trous ! » et, de la même manière, le client d’une pharmacie n’entre pas pour un produit, mais pour une solution. Organiser l’espace en fonction des typologies de demande, y associer de l’information (leaflets, tablettes numériques…) et la possibilité de poser ses questions à un professionnel compétent contribuent à assurer au client qu’ici sa demande sera prise en charge. Le lien humain est un des fondamentaux de la pharmacie services et, dans ce sens, chaque membre de l’équipe porte un badge avec son prénom, sa fonction et ses spécialisations.
Confidentialité à tous les niveaux
La santé touche nécessairement à l’intime. Le pharmacien et son équipe sont tenus au secret médical, mais pas le client du comptoir d’à côté ! Tout doit être mis en oeuvre dans l’officine pour respecter cette discrétion. Au niveau de l’aménagement, ce prérequis se traduit par des comptoirs éclatés (cf. photo ci- dessus), une ligne de confidentialité et un nombre suffisant d’espaces de confidentialité. Un fond sonore avec des enceintes placées en amont des comptoirs peut, en plus de renforcer le côté accueillant du lieu, améliorer l’isolation phonique.
Les espaces de confidentialité sont adaptés à leur utilisation : en plus d’une chaise et d’un bureau, ils disposent d’un point d’eau pour se laver les mains, d’une paillasse pour réaliser des tests d’orientation diagnostique, d’un accès Internet haut débit pour d’éventuels actes de télémédecine… Ils ont désormais une réelle fonctionnalité.
La prestation de services efficaces, axés sur le patient et efficients, en collaboration avec d’autres professionnels de santé, reste un défi majeur pour les pharmaciens. Les pharmaciens d’officine travaillent souvent sans contact direct avec les autres professionnels de la santé exerçant dans le même bassin de vie. Il est important d’encourager l’échange d’informations entre toutes les parties impliquées dans les soins aux patients, tant à la ville qu’à l’hôpital.
Les frontières s’effacent
Classiquement, une pharmacie se composait d’un front office et d’un back office, ces deux zones étant séparées par une ligne de comptoir. Désormais, pharmaciens et équipes officinales sont présents dans tout l’espace et viennent à la rencontre des clients pour les accompagner et mettre leurs compétences à leur service. Certains comme la chaîne de pharmacies italiennes Dr Fleming ont même purement et simplement fait disparaître les comptoirs au profit de petits îlots informatisés permettant de consulter avec les patients des supports d’informations ou de traiter les dossiers.
Souhaitant créer un lien privilégié avec ses clients, Leroy Merlin a ouvert un atelier collaboratif de fabrication qui permet à chacun d’accéder à des machines et équipements professionnels sous forme d’abonnement. Basé à Ivry-sur-Seine, ce fablab de 2 000 m2 donne accès, 7 jours/7, à plus de 150 machines ainsi qu’à une équipe d’experts.
Une officine tournée vers l’extérieur
Véritable pôle de santé de proximité, la pharmacie services est en contact avec les autres professionnels de santé, par le biais de messagerie sécurisée ou de rencontres autour de cas cliniques. Elle organise également des ateliers de formation pour ses patients auxquels elle fait participer des acteurs médicaux et paramédicaux. Dans cette optique, une salle de réunion est un vrai plus. Elle pourra également accueillir les réunions ou formations d’équipe préconisées pour la bonne cohésion des collaborateurs et le développement des compétences. Bien dans son époque Le digital est un outil qui aide le magasin physique et s’intègre dans l’expérience client. Dans la pharmacie services, il est naturellement présent pour personnaliser la relation, pour faciliter le parcours client, lui simplifier la vie. Près de 80 % des clients font une recherche sur Internet avant de se rendre dans un magasin. La pharmacie, commerce de proximité, n’est peut-être pas complètement concernée par cette statistique, mais, quel que soit le chiffre, il signe une tendance forte.
Depuis le 20 juin 2015, les pharmaciens québécois sont en mesure d’offrir sept nouveaux services professionnels à leurs patients. Avec comme objectif d’améliorer l’offre et l’accessibilité des soins de première ligne, le pharmacien peut désormais :
• Prolonger une ordonnance
• Ajuster une ordonnance
• Effectuer la substitution thérapeutique d’un médicament en cas de rupture d’approvisionnement
• Administrer un médicament afin de vous en démontrer l’usage approprié
• Prescrire et interpréter des analyses de laboratoire
• Prescrire un médicament pour une condition mineure lorsque le diagnostic est connu
• Prescrire un médicament lorsqu’aucun diagnostic n’est requis
« Outre son temps, les nouveaux actes mobiliseront l’expertise de votre pharmacien, d’importantes ressources humaines et matérielles, un temps de travail accru du personnel en officine, la formation du personnel, l’achat d’équipement informatique et l’ajout de logiciels. C’est pourquoi, afin de répondre à la hausse des frais d’exploitation de sa pharmacie, votre pharmacien est rémunéré pour ces actes », peut-on lire sur le site Internet de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires.
Le site vitrine d’une officine doit afficher son positionnement, faire connaître sa particularité. Au-delà des éléments pratiques (coordonnées, heures d’ouverture…), il convient d’afficher son ADN, de manière honnête, sans fausse promesse, de le personnaliser avec des photos de l’officine, de présenter l’équipe, d’offrir des services (click and collect, envoi d’ordonnance, prise de rendez-vous…). À l’entrée de l’officine, une borne interactive complète les écrans informatifs. Elle permet d’indiquer, s’il y a lieu, la raison de sa venue, éventuellement de scanner son ordonnance. Ainsi rassuré sur la prise en compte de sa demande, le patient peut parcourir l’espace de l’officine en attendant d’être contacté par sms.
Jack Erwin a poussé, à l’extrême, le concept de magasin services en ouvrant aux États-Unis un magasin de chaussures où l’on ne peut pas acheter ! Le magasin physique est entièrement dédié au conseil, à l’essayage… l’achat s’effectuant en ligne.
Pour Smart Pharma Consulting, l’optimisation de la performance économique des officines repose sur trois leviers principaux :
• l’augmentation des ventes par pharmacie,
• la réduction des coûts d’achat,
• l’optimisation de la gestion de l’officine.
Dans son étude récente sur la distribution des médicaments en France, Smart Pharma Consulting considère que, le premier levier comprend l’accroissement des ventes de produits ainsi que l’extension des services (prévention, dépistage, conseils, suivi thérapeutique). Des services qui seraient rémunérés par différents acteurs tels que l’Assurance maladie, les assureurs, les mutuelles, les ARS/URPS ainsi que les laboratoires pharmaceutiques. Étude Smart Pharma Consulting. Distribution et économie de l’officine en France, perspectives 2020. Octobre 2015.
Retrouvez les dossiers du guide de l'agencement :
> Pharmacie naturelle : un positionnement qui a du sens
> Pharmacie digitale : une nouvelle relation à construire avec le client
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