SI DES RÉSULTATS ont déjà été obtenus pour réduire le « trou de la Sécu » en 2011, puis en 2012, le redressement des comptes sociaux connaîtra un « véritable coup d’arrêt » en 2013, note la Cour des comptes. Présentant le rapport annuel sur la Sécurité sociale à la presse, Didier Migaud a estimé que « l’interruption du mouvement de réduction du déficit est préoccupante, même si elle résulte largement de l’atonie de la croissance ». Cette année, le déficit du régime général de la Sécurité devrait ainsi s’élever à 14,3 milliards d’euros, hors fonds de solidarité vieillesse. Ces comptes vont être ajustés le 26 septembre, lors de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 par le gouvernement, qui s’est engagé à limiter son déficit public à 3,6 % du PIB fin 2014.
Plus généralement, la Cour s’inquiète d’une « spirale » de la dette sociale, « toujours plus élevée et de moins en moins financée », qui doit être enrayée « avec une urgence impérieuse ». M. Migaud a évoqué un encours global qui devrait passer de 147 milliards à 159 milliards d’euros entre 2011 et 2013. Il a fait valoir que, dans la zone euro, seules la Grèce et l’Espagne ont connu en 2012 un déficit des administrations sociales supérieur. Les comptes sociaux (Sécurité sociale, mais aussi assurance chômage et retraites complémentaires) sont revenus à l’équilibre dans la zone euro en trois ans, alors que ceux de la France sont en déficit de 0,6 point de PIB en 2012.
« Résorber le déficit de la Sécurité sociale doit constituer une priorité majeure », relève la Cour dans son rapport et c’est « essentiellement en pesant sur la dépense que la trajectoire de retour à l’équilibre doit se poursuivre et s’accélérer ».
Des gisements d’économies.
Pour Didier Migaud, il existe « des gisements d’économies considérables » dans l’assurance-maladie, dont le déficit devrait atteindre près de 8 milliards en 2013, « sans compromettre, bien au contraire, la qualité des soins ni l’égalité d’accès au système de santé ». Selon la Cour, la progression des dépenses de santé remboursées par l’assurance-maladie, fixée chaque année par l’ONDAM (objectif national des dépenses de l’assurance-maladie), doit être limitée à 2,4 % en 2014 (au lieu de 2,6 prévu) puis 2,3 % en 2015 et 2016. En 2012, ces dépenses se sont élevées à 170,3 milliards d’euros.
La Cour des comptes consacre cinq chapitres aux hôpitaux, privés ou publics, où des économies sont réalisables. Elle insiste notamment sur le développement de la chirurgie ambulatoire. Quatre interventions sur dix sont pratiquées sur ce modèle en France, contre huit sur dix dans plusieurs pays « qui nous sont comparables ». Or le développement de la chirurgie ambulatoire permettrait d’économiser 5 milliards d’euros.
Des efforts peuvent également être réalisés sur les dépenses liées à la biologie médicale, dont le coût représente six milliards d’euros pour l’assurance-maladie. La récente réorganisation des laboratoires d’analyse « est encore bien trop timide pour faire baisser les coûts », relève la Cour. L’objectif est d’agir à la fois sur la tarification des actes et sur leur nombre. « Une économie de l’ordre de 500 millions d’euros pourrait résulter rapidement d’actions résolues dans cette double direction », juge-t-elle.
Plus délicat, elle suggère de réfléchir à ce que l’assurance-maladie se retire de l’optique, déjà peu remboursée, à hauteur de 200 millions d’euros, et largement pris en charge par les complémentaires santé, pour 3,7 milliards. Le remboursement de la Sécurité sociale est « devenu extrêmement dérisoire » et « c’est un constat d’échec que nous faisons » dans un marché « qui a explosé, qui est peu transparent et peu concurrentiel », a déclaré M. Migaud. « Nous appelons à une meilleure régulation du marché dans l’intérêt des patients », a-t-il ajouté, évoquant une « dérive » du secteur. Mais la ministre de la Santé, Marissol Touraine a d’ores et déjà indiqué que le gouvernement excluait tout déremboursement des lunettes.
« Pour le futur, il peut y avoir une articulation différente entre ce qui peut relever de l’assurance-maladie obligatoire et d’un régime d’assurance complémentaire qui deviendrait général », selon lui. Autres pistes d’économies : la permanence des soins la nuit, les jours fériés et les week-ends, où l’on assiste à une « explosion des dépenses de l’assurance-maladie qui ont triplé depuis 2001 ».
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