Concrètement, les médecins remettront aux patients qui le désirent une ordonnance électronique, laquelle sera stockée sur un serveur centralisé. Le patient pourra demander à la pharmacie de son choix – y compris virtuelle — de télécharger cette ordonnance et de l’honorer. Président du syndicat régional des pharmaciens du Schleswig-Holstein et représentant de la profession au sein du consortium Gematik, Peter Froese a rappelé, lors de la rencontre de Hanovre, l’importance de l’ordonnance électronique pour l’avenir de l’officine.
« Nous distribuons 861 millions de boîtes par an, ce qui correspondra un jour à 861 millions d’ordonnances électroniques, explique-t-il : en d’autres termes, c’est toute l’économie de l’officine qui circulera à terme sur les réseaux numérisés, et il est fondamental que les pharmaciens gardent la maîtrise exclusive de ces derniers. » Il constate en effet que les « allers-retours » de l’ordonnance entre les médecins, les patients et les pharmacies aiguisent l’appétit de certains intermédiaires, y compris des caisses de maladie, des éditeurs informatiques ou des grossistes-répartiteurs… mais aussi des pharmacies virtuelles, dont Doc Morris. Cette dernière mène déjà des « expériences » de télétransmissions d’ordonnances avec quelques syndicats régionaux de médecins. Toutefois, les officinaux ont veillé, avec succès, à ce que ces initiatives respectent le libre choix de la pharmacie. Dans tous les cas, poursuit-il, si nous déléguons la moindre partie du transport de l’ordonnance à des tiers, quelles que soient leurs motivations, alors ils s’engouffreront au cœur de notre activité et nous excluront du système.
Vérouiller l'exclusivité de la relation informatique
Pour éviter ce risque, tous les pays ayant déjà introduit l’ordonnance électronique garantissent soigneusement l’exclusivité de la « relation informatique » entre le patient, le médecin et la pharmacie, mais cette dernière est encore insuffisamment verrouillée en Allemagne, selon M. Froese. Dans le monde, seuls les États-Unis autorisent les intermédiaires et autres « traders » d’ordonnances en ligne, qui les rachètent pour les redistribuer ensuite en fonction de leurs propres intérêts, ce qui marginalise les pharmacies qui ne fonctionnent pas sur ce modèle. Ce risque majeur doit être évité, d’autant plus que les ordonnances électroniques alimenteront les futurs dossiers patients des pharmaciens. Il s’agit d’ailleurs là aussi d’un domaine où l’Allemagne entend rattraper son retard, « notamment par rapport à la France », a souligné ce pharmacien en rendant hommage au dossier pharmaceutique et au DMP hexagonaux.
À côté de l’ordonnance électronique ou des dossiers personnels numériques, l’Allemagne « fera autant de nouvelles lois qu’il sera nécessaire pour se hisser à la tête de l’innovation en santé numérique », a souligné ensuite le responsable de ce dossier au sein du ministère de la Santé, Christian Klose. Des enjeux d’avenir qui ne doivent pas cacher les risques et les difficultés de la révolution numérique, y compris en matière de sécurité : ainsi par exemple, 64 % des hôpitaux allemands ont déjà été victimes d’attaques informatiques.
Enfin, la rencontre s’est penchée, de manière plus philosophique, sur les impacts du numérique sur les comportements et la psychologie sociale : « les masses infinies de données sont en train de nous désapprendre l’incertitude, et il est grand temps de s’interroger sur la puissance des algorithmes », estime l’écrivaine Théa Dorn, au risque de voir une « dépression numérique » s’abattre sur une humanité devenue soumise à l’intelligence artificielle.
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