DE LA PANDÉMIE grippale redoutée, on ne sait pas grand chose : ni la date de son éventuelle survenue, ni son origine, même si une mutation du virus aviaire H5N1 chez l’homme est le scénario le plus fortement suspecté. Sur incitation de l’OMS, différents pays, dont la France, ont élaboré des plans de lutte destinés à en limiter les conséquences. Toutefois à quoi sert un plan, aussi abouti soit-il, s’il est ignoré de la population qui en est la cible ? Pour Annick Alperovitch, l’un des rapporteurs de l’avis 106 sur les « Questions éthiques soulevées par une possible pandémie grippale » du CCNE, la très grande situation d’incertitude ne doit pas dispenser les pouvoirs publics d’éclairer, dès à présent, la population. « Il faut informer à l'avance pour que, si cette pandémie arrive, chaque membre de la société puisse se sentir responsable », indique l’épidémiologiste.
Imaginons le contexte. En l’absence de toute mesure de lutte, une proportion très importante de la population présenterait un syndrome grippal (allant jusqu’à 50 % dans certaines hypothèses). Sur le plan de la dynamique de l’épidémie en France, le délai entre les premiers cas et le pic de la première vague épidémique serait d’environ six semaines. Un vaccin pandémique ne serait disponible en quantités suffisantes pour couvrir l’ensemble des besoins prioritaires que plusieurs semaines après le début de la pandémie. Ainsi, la plus grande partie de la première vague de la pandémie devrait vraisemblablement être gérée dans un contexte de ressources vaccinales très limitées.
À qui bénéficieront les premières ressources thérapeutiques ? Pour le philosophe Pierre Le Coz, l’efficacité de la stratégie d’un plan est conditionné par son éthique, sa philosophie globale. « Chacun devra être convaincu que c’est sans favoritisme, mais uniquement dans le souci de limiter l’extension de la pandémie que la puissance publique agit. » Le respect des valeurs auxquelles la société est attachée, l’égalité et l’équité notamment, va conduire la population à adhérer aux consignes. Les membres du comité se sont inspirés des règles de répartition des greffons mises en place par l’Agence de la biomédecine pour réfléchir à la question de la « priorisation ». « Si l’on fait abstraction du critère de l’ancienneté sur liste d’attente (dépourvu de pertinence dans le cas de la pandémie grippale puisque chacun est a priori demandeur), on constate que le souci d’une répartition équitable s’exprime à travers un jeu de pondération entre les critères de l’espérance de vie, la recherche de l’efficacité et le degré d’urgence ».
Chacun est responsable.
Se préparer éthiquement à une situation de crise permet d'éviter des réponses arbitraires, estime l’immunologiste Jean-Claude Ameisen. Ce cheminement vaut dans le cas d’une pandémie grippale comme pour une catastrophe naturelle. « Se préoccuper de l'autre peut aussi améliorer sa propre protection », a-t-il souligné, en mettant en garde contre les tentations d’isolement. « Un plan de lutte, pour être pleinement efficace, doit être solidairement accepté par l’ensemble de la population. Chacun, dans son environnement familial et social, doit être conscient de ses responsabilités dans ce plan », écrivent les auteurs de l’avis. D’où l’importance d’une communication publique. « Pour être efficace, cette communication devrait être faite par différents canaux et sous différentes formes et être répétée au cours du temps, comme les pouvoirs publics ont su le faire pour d’autres questions de santé publique majeures, comme la préconisation de la limitation à la prescription d’antiotiques », concluent les membres du comité.
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