LA DISTRIBUTION du médicament est-elle chère ? Non, répond Emmanuel Déchin, secrétaire général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). La part du grossiste-répartiteur dans le prix public d'un médicament remboursable est de 2,4 %. C'est moins de la moitié de ce qui est attribué aux transporteurs de produits laitiers, de viande (6 % du prix du produit final) ou de journaux et magazines (7,3 %). Emmanuel Déchin avance la comparaison avec la distribution du courrier. Selon lui, la marge brute de la répartition est de 1,2 milliard d'euros. Deux milliards de boîtes de médicaments remboursables sont distribuées. C'est 85 % de l'activité des grossistes. « Cela fait un coût moyen à la boîte équivalent au prix d'un timbre-poste pour une lettre de 20 grammes, soit environ 0,56 euro. » En plus, le médicament commandé, on sait précisément quand il va être livré, ajoute le représentant des répartiteurs. Impératifs horaires, références en collection, chaîne du froid et bientôt traçabilité des médicaments, tout porte à dire que les grossistes ne sont pas de simples distributeurs. « Ils sont les moins chers des circuits de distribution spécialisés, estime Emmanuel Déchin. Il n'est pas possible de faire moins coûteux. En dessous, on prendrait le risque de fragiliser la chaîne de distribution. » Déjà, en 2006-2007, le secteur avait dû procéder à des plans sociaux pour rationaliser sa productivité. Rappelons que l’officine dispose quant à elle de 23,9 % du prix d’un médicament remboursable. Les syndicats pharmaceutiques bataillent ferme pour une revalorisation de la marge dégressive lissée des officinaux. Ils plaident également pour une évolution du mode de rémunération (voir l’entretien avec Jean-Jacques Zambrowski). Au final, il n'est pas aisé de comparer le prix du médicament avec celui d'autres produits de consommation courante. Il faudrait que le nombre de points de vente et la fréquence des livraisons soient équivalents. Le fait que le produit fasse l'objet d'un monopole et qu'il soit vendu sur conseil a aussi son importance. Voici tout de même quelques éléments sur ce que coûte la distribution de différents produits : fruits et légumes, produits laitiers ou encore cigarettes.
. Les livres
Le marché français du livre compte 600 000 titres disponibles, dont 70 000 publiés en 2008. Près de 490 millions d'ouvrages sont vendus chaque année. Les libraires réalisent le quart des ventes en valeur, soit autant que la vente par correspondance et Internet. Les enseignes culturelles (dont FNAC, Virgin) sont au même niveau que les hypermarchés et autres grandes surfaces non spécialisées, avec 20 % de PDM. Le chiffre d'affaires des éditeurs repose à 75 % sur un petit nombre de librairies (700 à 1 300 sur les 25 000 points de vente au total). Ces librairies sont approvisionnées par une plateforme interprofessionnelle en province ou directement par les distributeurs. Les deux plus gros (Hachette et Editis-Interforum) contrôlent la moitié du marché. Le délai de livraison varie entre 2 et 3 jours. Les remises obtenues par les libraires auprès des diffuseurs varient de 30 à 40 %. La marge commerciale s'établit en moyenne à 31 % du chiffre d'affaires. Les charges de loyer sont variables, de 4 % à Paris à 2 % en région. En revanche, les coûts de transport sont plus importants en province (1,8 %) qu'en Île de France (0,7 %). Assez stables depuis une vingtaine d'années, les charges de personnel représentent 17 % du chiffre d'affaires en moyenne. Les librairies sont soumises à des facteurs externes qu'elles ne maîtrisent pas : prix fixés par l'éditeur, politiques des diffuseurs, décisions des collectivités publiques, augmentation des charges, etc. Les libraires jugent nécessaire l'agrandissement des points de vente pour affronter la concurrence des grandes surfaces. Ils éprouvent des difficultés à rémunérer à sa juste valeur un personnel qualifié. Il se pose aussi le problème de la transmission des entreprises, dont la valeur s'est accrue.
La presse
Il parait, en France, une trentaine de titres nationaux et près de 2 700 magazines. Le coût de leur distribution s'élève à 34,3 % du prix de vente final, qui est en moyenne de 1,30 euro pour les quotidiens. Dans ce pourcentage, il faut considérer la part des diffuseurs (points de vente) et des dépositaires (grossistes). Elle est respectivement de 17 et de 10 %. Le reste (7,3 %) est attribué aux sociétés intermédiaires entre éditeurs et grossistes. Celles-ci sont détenues par des coopératives de messagerie, émanant elles-mêmes des éditeurs. C'est le cas des Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP). Aujourd'hui rebaptisées Presstalis, elles distribuent tous les quotidiens nationaux et 8 magazines sur 10. Les NMPP détiennent environ le tiers du marché français de la presse. À noter que certains éditeurs de quotidiens régionaux assurent eux-mêmes la distribution de leurs titres. Le secteur est amené à évoluer. En 1987, le coût total de la distribution atteignait 43 %, dont 16 % revenaient aux NMPP. Leur commission a donc baissé de près de 50 % en 20 ans. L'an prochain, la société verra la mise en œuvre d'une nouvelle stratégie qui comprend notamment une rationalisation du réseau des points de vente. Il y en a, au total, près de 30 000 en France. La moitié est représentée par les bureaux de tabac. La plus forte progression est marquée par la GMS, qui compte 2 000 points de vente à ce jour. Une autre particularité de ce circuit de distribution : le taux d'invendus, qui était de 41 % (soit plus de 800 millions d'exemplaires) en 2008.
Les cigarettes
La vente au détail de tabac relève d'un monopole détenu par l'État. Ce sont les Douanes qui se chargent d'attribuer des autorisations aux buralistes. Ceux-ci sont actuellement au nombre de 29 000 sur le territoire. Dans plus de 90 % des cas, ils sont livrés par la société Altadis Distribution France, qui importe le tabac manufacturé. Celui-ci est ensuite réparti dans des centres régionaux de distribution. Pour décomposer le prix des cigarettes, on se base sur la catégorie la plus demandée (marques Gitanes, Marlboro, etc.), dont le prix est aujourd'hui de 5,60 euros. La part de la fiscalité monte à 80,4 % du prix d'un paquet de cigarette. Elle se divise en deux prélèvements : la TVA (19,6 %, soit 16,38 % du prix de vente au détail) et le droit de consommation exigé par l'État. Ce dernier présente plusieurs composantes. Il est évalué à 64 % du prix de vente d'un paquet de cigarettes. Ce taux est de 27,5 % pour les cigares et de 58,5 % pour le tabac à rouler. Une fois déduites les taxes, il reste donc près de 20 % du prix du paquet, à partager entre le fabricant et le buraliste. Le premier touche 11,4 % du prix total, le second 8,2 %. Il s'agit là d'une marge brute car, en réalité, la remise directe sur facture est de 6,25 %. Le fournisseur verse en effet le différentiel (2 %) à l'administration (droit de licence et cotisation retraite). En 2003, les débitants de tabac ont obtenu une revalorisation de leur rémunération. Une remise compensatoire leur est attribuée pour récupérer la perte de remise nette en cas de baisse du chiffre d'affaires (50 à 90 % de la perte de remise). Une seconde remise, additionnelle, leur est versée tous les mois (de 0,5 à 2 %).
Les fruits et légumes
La part la plus importante du prix des fruits et légumes revient au producteur. Elle est de 36 % en moyenne. Vient ensuite le coût du stockage et de la vente en magasin. Il s'élève à 26,5 % du prix, dont 8 % pour compenser les pertes et autant pour couvrir les frais de personnel. Le troisième grand poste est le conditionnement, qui représente 23 % du prix des fruits et légumes. Il existe une hétérogénéité de marge importante entre les produits. De plus, les magasins se livrent à une forte concurrence, qui se traduit par des marges faibles sur certains fruits ou légumes du rayon.
Les produits laitiers
Les produits laitiers ont connu une augmentation de prix de l'ordre de 10 % entre les mois d'août 2007 et 2008. Depuis, une baisse de 1,5 % environ a été constatée. Cette baisse de prix est plus nette sur les yaourts nature, le beurre et le camembert que sur le lait écrémé ou les yaourts aux fruits. Le prix d'achat au producteur représente 72 % du prix d'un produit laitier vendu en grande distribution. Les frais de personnel s'élèvent à 9 % et le frais de transport à 6,2 %. La casse et la démarque comptent pour seulement 1,5 % du prix de vente au détail.
La viande
En dix ans, le prix du filet de bœuf a augmenté de près de 30 % en boucherie. Une évolution importante qui est moins liée aux coûts de la production qu'à ceux du transport et de la main-d’œuvre. Pourtant, c'est le coût de la matière première qui occupe le poste le plus important du prix de la viande en rayon. Il est de 55 % du prix total en boucherie et de 60 % en grande distribution. Le coût de la distribution en magasin représente plus du tiers du prix total. Il comporte des frais de personnel important (14 %). En GMS, ces frais viennent à hauteur de 6 % du prix total. S'ajoutent, dans ce circuit, les frais liés à l'emballage, qui sont de 4 %. En GMS et en boucherie, la perte compte pour 5 à 6 % du prix de la viande. Dans les deux circuits, l'effet des promotions est répercuté à hauteur de 5 % du prix payé par le consommateur. Les frais de fonctionnement du magasin sont à part égale dans les deux secteurs (9 % du prix total). Au final, la marge brute du magasin est de 38,5 % en boucherie et 33,50 % en grande distribution. Ces marges varient bien sûr en fonction des morceaux et des espèces produites. Il faut aussi prendre en compte l'aspect saisonnier. Ainsi, pour le bœuf, le prix des pièces à griller augmente dès le début de l'été alors que le prix des morceaux à bouillir diminue.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion