Les patients douloureux champions du détournement

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Publié le 04/03/2019

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Ce ne sont pas les usagers de drogue, mais les patients douloureux qui détournent le plus les antalgiques opiacés. Entretien avec le Pr Nicolas Authier, chef du service de pharmacologie à l'hôpital de Clermont-Ferrand et directeur de l'Observatoire Français des médicaments antalgiques.

Le Quotidien du pharmacien.- Quel est le profil des patients qui font un mauvais usage des antalgiques opioïdes ?

Pr Nicolas Authier.- Deux profils se distinguent. De façon minoritaire, des patients qui ont déjà un usage de drogue et qui peuvent détourner le médicament opioïde pour rechercher un effet euphorisant. En second lieu, une population beaucoup plus importante est constituée de patients douloureux qui peuvent avoir une raison valable de recevoir ce traitement. Mais à cause d’une vulnérabilité psychique, le médicament va continuer à être utilisé, non plus pour soulager une douleur, mais pour traiter une anxiété, une angoisse, un trouble de l’humeur, ou du sommeil. Progressivement, une tolérance et une dépendance au médicament s’installent. Les femmes de plus de 50 ans sont majoritairement concernées.

Comment repérer ces patients à risque ?

En identifiant chez eux des antécédents personnels ou familiaux de troubles psychiques : une anxiété, une humeur dépressive, un stress post-traumatique, des antécédents d’addiction, sans oublier le tabac et l’alcool. Rappelons qu’une première addiction prédispose à développer une nouvelle dépendance. Il faut repérer ces profils avant toute prescription d’antalgique opioïde. En revanche, ce n’est pas une contre-indication à l'usage des opioïdes, mais on informera et on surveillera ces patients de façon plus rapprochée.

Quelle est la marge de manœuvre du pharmacien face au mésusage d’antalgiques opioïdes et au nomadisme de ces patients entre plusieurs officines ?

Déjà, en repérant ces personnes, parfois avec l’aide du dossier pharmaceutique (DP) ou du dossier médical partagé (DMP). Ensuite, en abordant le sujet avec le patient pour lui proposer de l’orienter vers une prise en charge spécifique. Si ce dernier accepte d’être aidé, il pourra signer un protocole de soins qui déterminera une prise en charge adaptée à son sevrage, en désignant un seul prescripteur et un seul pharmacien, durant 6, 12 ou 18 mois.

Propos recueillis par C.D.