« Les gens âgés n'ont plus de voiture, ne conduisent plus, et n'osent pas demander d'aide à un voisin quand il s'agit de santé. Ils sont pourtant des concitoyens, des contribuables, à qui on doit un service, sinon ils partent à la ville, étant privés de tout. » Yves Eon, maire de Berville-sur-mer, un village de 750 habitants dans l'Eure, n'est pas le seul édile à faire le constat. Mais lui, il veut apporter du service, comme, en l'occurrence, rapprocher la pharmacie de ses patients.
C'est en fait un pharmacien de Beuzeville, un bourg de 4 500 habitants, à une quinzaine de kilomètres au sud, qui avait fait le premier pas auprès de Berville : si les ordonnances pouvaient être envoyées à la pharmacie, par exemple par la mairie, les délivrances seraient livrées le soir même, ou le lendemain.
Bien qu'appelée « sur-mer », Berville est en bord de Seine. Sa place des Voiles de la liberté - du nom de la parade des grands voiliers école qui se regroupent à Rouen, tous les cinq ans depuis 1989 - fait face au fleuve, ici large de plus d'un kilomètre. À l'est, le pont de Tancarville, à l'ouest, le pont de Normandie, en face le port du Havre, ses gigantesques grues à conteneur, et la ville à 20 km par l'autoroute.
Sa situation résume l'histoire de Berville, autrefois agricole, aujourd'hui habités de travailleurs qui vont au Havre ou à Honfleur, et de personnes âgées, « 101 de plus de 62 ans », précise le maire.
Un dépannage
Le service de livraison des médicaments vivotait gentiment. Arnaud Salliou et Kristen Chaudin-Winkelmann, actuels cotitulaires de la pharmacie de la Morelle, à Beuzeville, livrent régulièrement dans le canton. Depuis la mairie de Berville, ils reçoivent une ordonnance dans la journée, livrent le soir ou le lendemain, « en fonction du chemin de chacun, du lieu où vit le patient », précise la consœur. Ils voient cela comme un dépannage.
Un article paru cet été dans la presse locale a relancé la dynamique. Autour de Berville se trouvent aussi Conteville, 1 000 habitants, Fatouville, 750 habitants, Manneville, 1 500 habitants, Geneville, 800 habitants Tous ont le même profil démographique. Le sénateur de l'Eure ne s'y est pas trompé, qui a envoyé à Yves Eon une carte de félicitation pour son initiative.
Pour la secrétaire de mairie de Berville, l'opération est simple : scanner et envoyer une ordonnance. Deux autres pharmacies peu éloignées, celle de l'Église, à Beuzeville, et celle de La Rivière, à La Rivière Saint-Sauveur, ont été contactées par le maire. « On va développer le principe, explique Yves Eon. Je vais faire connaître le service en en parlant au repas des aînés, par le bulletin municipal, et je ne veux pas mettre les pharmacies en concurrence. » Dans cette idée de service à la population, le maire loue déjà une salle de la mairie à trois infirmières qui y pratiquent des prises de sang, et à un kiné-ostéopathe.
« On propose systématiquement à nos clients de faire envoyer leur ordonnance lorsque venir à la pharmacie leur est compliqué, explique Arnaud Salliou. Mais il ne faudrait pas que cela devienne du confort. »
Un modèle qui reste à définir
La livraison est gratuite, « en tant que dépannage ». Les deux pharmaciens voient même une certaine facilité, comme de pouvoir préparer une livraison au calme, hors du comptoir. « Pour les traitements chroniques, cela reste simple : en cas de changement dans le traitement, on peut vérifier en appelant le client. Mais le conseil est plus compliqué dans le cas d'un traitement aigu. » Dans ce cas, pour un problème particulier, un des pharmaciens se déplacera chez le client, plutôt qu'une préparatrice.
Les deux confrères soulignent pourtant que la logistique n'existe pas si le service vient à se développer, ni même son paiement, quand bien même il faudrait embaucher pour faire face à la demande. La ruralité reste à définir.
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