LA PRISE en considération de ces thérapies par les dirigeants de l’AP-HP et, le cas échéant, le désir d’en organiser le développement, montre l’intérêt que revêt ce thème dans le domaine de la santé. Les recommandations émises par l’Académie de médecine doivent être comprises non comme une reconnaissance et une valorisation de ces méthodes, mais comme un moyen de faire le point sur les connaissances scientifiques relatives à ces techniques, de clarifier leurs indications et d’établir de bonnes règles pour leur utilisation. Un groupe de travail pluridisciplinaire, composé de nombreux cliniciens, experts, juristes et responsables de l’AP, a été réuni pour étudier le problème dans le détail. La littérature médicale et scientifique a été passée au crible pour trouver des preuves justifiant ces pratiques dans les hôpitaux publics, et leur légitimité dans la prise en charge du patient. Il s’agit d’un travail en profondeur destiné à donner une définition claire de chacune des quatre thérapies complémentaires (ThC) analysées, sur la base d’une évaluation objective des résultats disponibles. Fidèle à son approche rationnelle et scientifique, l’Académie a tenu à préciser l’importance de la terminologie « thérapies » pour désigner ces techniques, en évitant l’appellation tout à fait injustifiée de médecines. « Il n’existe qu’une seule médecine validée par les preuves, ces quatre ThC ne sauraient être considérées comme une alternative à la médecine traditionnelle proprement dite, insiste le Pr Daniel Couturier, membre du groupe de travail. L’acupuncture, l’hypnose, la médecine naturelle (ostéopathie, chiropraxie) et le tai-chi sont les ThC les plus riches en publications indexées mais les travaux cliniques sont de qualité discutable car les évaluations sont difficiles à faire ; les résultats sont peu décisifs, parfois contradictoires et nécessiteraient de faire des méta-analyses. » Les travaux suggèrent que, par rapport à des traitements usuels, ces ThC pourraient avoir une faible efficacité dans les troubles fonctionnels dominés par la douleur, en particulier dans le suivi des chimiothérapies anticancéreuses et la prévention des gestes invasifs en pédiatrie pour éviter des souffrances. Par rapport à la rééducation habituelle, le tai-chi s’est révélé efficace pour contrôler les chutes chez les personnes âgées.
Recenser, évaluer, encadrer.
Cependant, les ThC ne répondent pas à tout et comportent des dangers. Or de plus en plus de patients se tournent vers ces pratiques non conventionnelles. Un Français sur quatre fait appel à elles, et tout particulièrement les malades atteints de cancer. Il est donc important qu’ils bénéficient d’informations bien contrôlées et validées. « Notre première recommandation est de ne pas recourir à ces pratiques sans un diagnostic ou un avis médical et jamais en première intention, déclare le Pr Daniel Boutoux, principal auteur de ce rapport. L’exercice de ces ThC dans les hôpitaux est légitime dans la mesure où elles apportent un plus, mais elles doivent s’intégrer dans une prise en charge globale et être mises uniquement à la disposition des malades suivis par l’hôpital, poursuit le rapporteur. Le rôle de l’hôpital est de recenser ces techniques, de les évaluer régulièrement, de les contrôler et de les encadrer au sein de l’établissement de soin. » Pas question que le personnel hospitalier cautionne ou fasse la promotion de ces techniques et ouvre des consultations à tous les publics. En revanche, en exploitant les résultats de ces traitements dans le cadre d’essais cliniques, les soignants pourraient s’en servir pour alimenter la recherche expérimentale et motiver les chercheurs hospitalo-universitaires.
Par ailleurs, les académiciens ont conscience que les ThC se développent dans des conditions presque incontrôlées dans la pratique privée. Souvent, les malades y ont recours sans oser en parler à leur médecin référent ; pour établir une relation de confiance et un dialogue interactif, les médecins doivent être mieux informés. En ce sens, L’Académie souhaite qu’un enseignement soit introduit dans le cursus médical pour informer les futurs médecins sur la place de ces thérapies, leurs limites, leurs dangers et leurs modes d’exercice. Le Pr Charles-Joël Menkès met en garde contre les risques de dérive et l’usage que des associations pourraient faire de ces pratiques, par le biais hospitalier. « Les ThC s’entourent d’une certaine philosophie, il faut rester vigilant et se méfier, par exemple, de l’intervention de secte profitant du désarroi des malades dans le contexte difficile de la cancérologie. » L’Académie déconseille formellement la création d’un statut ou d’un label de praticien de thérapie complémentaire, et elle recommande que la HAS soit chargée de veiller aux bonnes pratiques de ces thérapies.
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