« Langue de chien, langue de médecin » : au-delà des dictons suggérant que la salive de notre compagnon constituerait un remède contre l’infection des plaies, le chien s’est longtemps révélé constituer une source inépuisable de principes thérapeutiques… Ainsi, dès l’Antiquité, tout son corps fut mis à contribution : son crâne notamment, calciné puis pulvérisé, hâtait, en usage topique, la cicatrisation des ulcères et, mélangé à du vin, guérissait la jaunisse et les convulsions ; sa cervelle traitait la folie et ses yeux les affections ophtalmiques. Les succès rapportés par les médecins du temps expliquent que l’imagination, jusqu’au Siècle des Lumières, n’ait guère connu de limites pour formuler électuaires, baumes et onguents canins… S’il fallait un exemple édifiant, l’article sur l’usage médicinal du canidé dans L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, au XVIIIe siècle, donne le ton : « Le petit chien ouvert et appliqué tout chaud sur la tête, est recommandé (…) dans les douleurs violentes de cette partie (…) ». N’est-il pas vrai que « ce remède de bonne femme, peut-être trop négligé aujourd'hui, ainsi que la plupart des applications extérieures, a produit quelquefois de bons effets dans l'un et dans l'autre de ces deux cas ? »
La graisse de chien, tenue dans le même article comme « l’une des plus atténuantes, plus détersives et plus vulnéraires », faisait merveille contre la goutte et l’otite, et traitait avec bonheur la gale. Plus élégamment si l’on peut dire, sa peau, transformée en gants ou en bas, adoucissait la peau, calmait les démangeaisons et prévenait les varices…
Enfin, la crotte de chien était commercialisée sous le nom d’album graecum ou de stercus canis officinale : réduite en poudre et mélangée à du miel, elle traitait les maux du gosier - rapidement toutefois, certains médecins doutèrent de son efficacité… -.
Huile de petits chiens
Nous devons toutefois à Ambroise Paré (1510-1590) un baume de… chiots ayant de quoi surprendre.
C’est à l’automne 1537 que le jeune homme prit la route du Piémont italien, recruté comme barbier-chirurgien par le capitaine René de Montejean. Montejean ayant été nommé gouverneur de la région à l’issue des combats, le chirurgien demeura une année à ses côtés. C’est alors qu’il entendit parler d’un médecin de la ville qui s’était fait une spécialité de traiter les « arquebusades » à l’aide d’un baume dont le secret était tenu jalousement gardé… Gagnant sa confiance, Paré mit plus de deux ans à le convaincre de lui livrer la formule du topique si miraculeusement actif… Finalement, c’est juste avant que le chirurgien ne retourne à Paris que le médecin se laissa fléchir moyennant « dons & presens » : « Il m'envoya quérir, raconta Paré, deux petits chiens, une livre de vers de terre, deux livres d'huile de lys, six onces de térébenthine de Venise et une once d'eau-de-vie ; en ma présence, il fit bouillir les chiens tout vivants en ladite huile, jusqu'à ce que la chair laissât les os ; et après mit les vers qu'il avait auparavant fait mourir en vin blanc, afin qu'ils jetassent la terre qui est toujours contenue en leurs ventres. Étant ainsi vidés, les fit cuire en ladite huile jusqu'à ce qu'ils devinssent tout arides et secs ; alors fit passer le tout par une serviette, sans grandement en faire expression ; cela fait, on y ajouta la térébenthine, à la fin l'eau-de-vie, et appela Dieu à témoin que c'était son baume, duquel, il usait aux plaies faites par arquebuses et autres qu'on prétendait suppurer, et me pria de ne divulguer son secret… ». Tout l’art de cette préparation, diversement déclinée dans les formulaires des XVIIe et XVIIIe siècle, consistait, disait-on, à trouver deux petits chiots qui ouvraient les yeux depuis peu !
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