VOS CLIENTS sont pleins de bonnes intentions. Si, si. Par exemple, votre client asthmatique, celui qui aspire quotidiennement son bronchodilatateur trois fois par jour. Pour ne pas vous faire de peine, il ne vous dit pas qu’il n’a jamais vraiment suivi le traitement qui lui a été prescrit par le pneumologue. Le corticoïde anti-inflammatoire de l’asthme persistant, il ne l’utilise pas. D’abord, ça ne le soulage pas, alors il ne voit pas pourquoi il le prendrait. Et en plus, la cortisone, tout le monde le sait, c’est très très mauvais pour la santé. Donc, il y a toujours autant de doses dans son flacon pressurisé. Mais comme il ne veut pas vous embêter avec tout ça, qu’il sait bien que c’est en vendant des médicaments que vous gagnez votre vie, et que, de toute façon, lui, il ne débourse pas d’argent, il continue à venir dans votre pharmacie pour ses renouvellements mois après mois, à ne rien vous dire, et à repartir chez lui avec son bronchodilatateur et son corticoïde dans son petit sac.
Un jour, pendant son hospitalisation dans un service de pneumologie, quelqu’un de bien intentionné (son épouse, sa fille, l’infirmière… ce sont souvent les femmes qui se lancent dans ce genre d’opération), fait du tri dans son armoire à médicaments, et vous rapporte quelque chose comme une quinzaine de boîtes d’inhalateurs tout neufs, dont l’emballage n’a même jamais été ouvert. Avec un grand sourire et le sentiment de faire quelque chose pour l’humanité, elle vous confie qu’elle espère que ces médicaments seront utiles à ces pauvres Africains, là-bas. Bien entendu, vous n’allez pas polémiquer sur le concept de gaspillage dans la civilisation occidentale, alors vous dites simplement merci.
Les municipalités aussi ont de bonnes intentions. Dans les zones à forte concentration en Yorkshires, Bichons et autres Caniches (bon… disons, par exemple, et tout à fait au hasard, la Côte d’Azur), on met à la disposition de l’écocitoyen des distributeurs de sacs pour déjections canines. Et ça marche. Plus ou moins. Un certain nombre de maîtres de chiens, quand les petits sacs marron et les poubelles à déchets canins sont à leur disposition, font leur devoir, et ramassent volontiers les excréments de leur animal. Bien sûr, ne rêvons pas, il y a aussi ceux qui s’en fichent complètement. Et puis il y a ceux qui, tout en ayant de bonnes intentions, ratent malgré tout leur coup.
Le sac, une fois lesté de son chargement, on ne sait plus trop qu’en faire. On ne va quand même pas se balader avec ça à la main, non ? Alors on l’abandonne le plus discrètement possible, au bord du chemin, dans la rue, sur le trottoir. Ou, pire, vous allez voir la suite. L’infirmière vient de récupérer chez un de ses malades tout un tas de médicaments, surtout des antibiotiques, d’ailleurs, assez étrangement. Elle donne le sac à sa copine la kiné, qui va le faire passer à une autre copine infirmière, qui va le déposer à la pharmacie, où il est oublié pendant quelques jours. Survient ce moment où l’on a besoin tout de suite d’une petite poche en plastique, on est à côté du sac, on regarde à l’intérieur, et, oui, il y a un truc qui a exactement la taille de ce qu’on cherche. On est en train de l’ouvrir pour le vider, et on remarque innocemment : « C’est rigolo, on dirait un sac à… »
Oui, c’était bien un sac à… Et à l’intérieur, il y en avait bien une. Un peu vieillotte, forcément, mais toujours odorante. Mais comment était-elle arrivée là ? La chaîne des bonnes intentions, vous dis-je, la chaîne des bonnes intentions…
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion