« Ici, à la campagne, la pharmacie est le premier recours des personnes victimes de morsures, abcès dentaires, blessures ou coupures graves… Je reçois au moins deux urgences sérieuses par semaine », explique Marc Jautard, titulaire depuis 18 ans, à Meilhan-sur-Garonne, petite commune lot-et-garonnaise de 1 450 habitants.
Face à ces urgences, l’orientation des patients pose problème : « Impossible d’être pris en charge par un généraliste avant deux jours, explique-t-il. Nous n’en avons plus sur la commune depuis deux ans*. Quant au 15, il renvoie vers les urgences de l’hôpital de Marmande qui sont devenues ingérables ; certaines personnes reviennent parfois dans mon officine avant d’y avoir été prises en charge. Je ne peux laisser ces patients sans soins. Car ma conception du métier, c’est d’être là pour traiter le patient, pas pour vendre des compléments alimentaires. Alors, je fais le médecin, je dispense antibiotiques, cortisone… mais j’aimerais être sécurisé par un avis médical. »
Première borne officinale de téléconsultation
C’est pour cela que Marc Jautard a pensé à la télémédecine. Et depuis le 15 juillet, son officine est la première du Lot-et-Garonne à s’être équipée d’une borne de téléconsultation. Installée dans une pièce dédiée, la borne se compose d’une caméra, d’un écran où le médecin apparaît en grandeur réelle et d'objets connectés : tensiomètre, thermomètre, stéthoscope, oxymètre, dermatoscope, otoscope.
Bien sûr, l’accompagnement des patients par le pharmacien est indispensable : stress engendré par la blessure, maniement des objets connectés, suivi de la procédure (créer un compte, indiquer nom, prénom, date de naissance, n° Sécurité sociale pour le tiers payant). Après consultation, la prescription est imprimée par la borne et inscrite au DMP du patient où son médecin traitant pourra la consulter… s’il est mis au courant, car la procédure ne prévoit pas son information directe.
La sécurité n’a pas de prix
La borne est louée 700 € HT/mois par la société Tessan : « Il n’y a pas de prix pour être sécurisé », souligne Marc Jautard, qui maintient la gratuité pour les patients utilisateurs, même si le fournisseur suggère de faire payer de 5 à 7 €/téléconsultation. Pour notre pharmacien, l’essentiel est de pouvoir accéder à un avis médical en moins de 3 minutes, du lundi au vendredi, de 9 heures à 12 h 30 et de 15 heures à 19 heures. Et en 2020, à des spécialistes.
Les médecins du secteur n’ont guère apprécié l’arrivée de cette borne, mais Marc Jautard les rassure : « Elle est exclusivement réservée aux urgences ou à des patients à pathologie lourde dont le médecin traitant serait en congés. Mon seul objectif est de sécuriser ma délivrance. Les généralistes n’ont aucune concurrence à craindre, car rien ne vaut une consultation en cabinet. D’ailleurs en deux mois, je n’ai eu recours que 5 fois à la téléconsultation. »
Côté pharmaciens, seul le Conseil de l’Ordre s’est signalé en protestant contre l’article du quotidien local annonçant l’installation de la borne de téléconsultation.
* Pour lutter contre la désertification médicale, Marc Jautard a investi (seul) dans un cabinet médical qui a accueilli des médecins jusqu’en 2017. Le départ du dernier généraliste a fait chuter de 25 % son chiffre d’affaires.
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