LA SÉCURITÉ des médicaments – et leur surveillance au quotidien – est l’affaire de tous. C’est sur ce thème que le Comité sécurité et bon usage du LEEM a réuni divers acteurs essentiels de la pharmacovigilance. « C’est simple comme un coup de fil puisque les industriels ont mis en place des lignes dédiées disponibles 24h/24 et 7j/7 », indique Muriel Malbezin, présidente du Comité sécurité et bon usage du LEEM. Une assertion que la présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP), Isabelle Adenot, ne partage pas. « Ce n’est pas simple comme un coup de fil. Il faut savoir quoi déclarer, il faut informer les professionnels de santé sur les changements intervenus, puisque doivent aussi faire partie de ces déclarations des effets indésirables les cas de mésusages, d’erreurs médicamenteuses, etc. Il faut savoir à qui déclarer, de quel centre régional de pharmacovigilance on dépend, si on doit aussi contacter l’industriel. Il faut savoir repérer le produit en cause et remplir la fiche… » Une fiche qui semble particulièrement obscure, au point d’inciter l’Ordre à créer un portail, www.pharmavigilance.fr, qui propose dans la partie réservée aux pharmaciens un commentaire détaillé de ladite fiche pour comprendre comment la compléter. Pire encore, « ce document n’est pas informatisé, les confrères doivent l’envoyer dans sa version papier », déplore Isabelle Adenot. L’Ordre avait fait plusieurs propositions d’amélioration de la pharmacovigilance il y a quelques années, dont deux ont été retenues, à savoir assurer une véritable indépendance des personnes qui déclarent des effets indésirables, sans crainte de sanctions ou d’attaques, et la possibilité pour les pharmaciens de déclarer des effets indésirables pour tout médicament. En effet, Isabelle Adenot rappelle : « Avant 1995, le pharmacien n’avait pas à déclarer les effets indésirables dont il avait connaissance, un comble pour le spécialiste du médicament ; puis il a eu une obligation de déclarer ces effets, mais uniquement sur des médicaments qu’il avait lui-même délivrés. Une ânerie monumentale qui a été corrigée avec la nouvelle loi sanitaire. »
Drames humains.
Le CNOP aimerait que ses autres revendications soient entendues : alléger les contraintes liées à la déclaration, notamment en informatisant la fiche de déclaration ; modifier cette fiche pour la rendre plus simple à remplir ; motiver les professionnels de santé qui font des déclarations en les informant de ce qu’il est advenu après leur signalement. « La pharmacovigilance doit encore être améliorée. On parle de 10 000 ou 18 000 décès par an liés aux médicaments, sans compter les hospitalisations dues aux médicaments. Nous devons tous travailler à réduire le nombre de ces drames humains et les pharmaciens y travaillent aussi avec le dossier pharmaceutique, qui permet une analyse pharmaceutique sérieuse. »
La difficulté à savoir quoi déclarer est une réalité également chez les médecins, comme le souligne François Piette, chef de service gériatrie de l’hôpital Charles Foix, à Ivry-sur-Seine (Val de Marne), en particulier face à une population âgée fragile, souvent polymédiquée, souffrant de plusieurs maladies chroniques, chez qui les incidences des effets secondaires augmentent avec l’âge. Il peut être compliqué, en effet, de démêler un événement indésirable d’un événement sans lien avec les traitements utilisés. « La question est de savoir si je vais reconnaître tel événement comme un effet indésirable. Il y a tellement de gens qui ne se sentent pas bien depuis le même mois où un nouveau traitement a été initié. » À cela s’ajoute la problématique des nouveaux traitements qui arrivent sur le marché mais dont les essais cliniques n’incluent pas la population cible des gériatres, qui, en l’absence d’informations fiables sur le bénéfice-risque d’une référence sur des personnes âgées, proposent des dosages faibles et augmentent progressivement si le patient réagit bien… quand ils osent ! « Nous sous-déclarons, nous n’envoyons pas un signalement au moindre événement douteux, nous essayons de prévenir les effets indésirables en usant de règles de précaution basiques », reconnaît le Dr Piette.
Maillage territorial.
Le point de vue des patients est bien plus optimiste, certainement lié au fait que les déclarations effectuées par les associations et les malades sont une toute nouvelle mission qu’ils ont eux-mêmes réclamée. Laurence Carton, vice-présidente de l’Association française de lutte antirhumatismale (AFLAR), se félicite que le patient devienne véritablement acteur de sa santé, partant du principe qu’il est le mieux placé pour parler des effets indésirables qu’il rencontre. Une étude* lancée en 2006 par l’Agence du médicament, en collaboration avec les associations de patients, a montré l’apport des patients dans la déclaration d’effets indésirables. Sur les 200 cas reçus, 17 % avaient déjà été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance, 60 % concernaient des effets indésirables graves, et lorsque le médecin a pu être contacté, il a validé 58 % des cas présentés par leurs patients. Ainsi, depuis le 10 juin 2011, patients et associations de patients peuvent remplir une fiche d’auto-déclaration et l’envoyer à leur centre régional de pharmacovigilance (CRPV). Les auto-déclarations représentent actuellement 5 % de l’ensemble des déclarations d’événements indésirables, quand les pharmaciens sont à l’initiative de 15 % d’entre elles et les médecins généralistes de 8 %.
« Nous avons un maillage territorial de 31 CRPV, qui permet d’être proche des professionnels de santé et des patients. J’ai entendu les doléances de Mme Adenot et je tiens à préciser que dans le bilan 2013, le CRPV de Poitiers a prévu d’aborder le sujet des retours que les CRPV font aux personnes qui ont signalé un effet indésirable », précise Marie-Christine Perault-Pochat, responsable du CRPV de Poitiers (Vienne).
Le système de déclaration d’effets indésirables ne semble pas inefficace pour autant puisque le nombre de signalements ne cesse d’augmenter chaque année (36 000 en 2011).
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