Le reportage de l’émission « Capital » diffusé la semaine dernière sur M6 a provoqué un torrent de réactions de la part des pharmaciens. De très nombreux confrères ne se sont pas reconnus dans le tableau dressé par le documentaire. Un avis largement partagé par les syndicats d’officinaux qui se sont très vite exprimés pour rétablir plusieurs vérités.
« Capital a choisi de se focaliser sur 20 % de l’activité des pharmacies en occultant le cœur même du métier de pharmacien qui occupe 80 % de son activité et de ses équipes », déplore ainsi l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). « La communication, c’est aussi ce que certains médias choisissent de faire de la présentation d’un métier. Ce qui est montré dans une émission sur M6 n’est pas représentatif de ce qu’est aujourd’hui la pharmacie d’officine française », s’insurge également Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
« Et ce n’est pas le modèle que nous voulons pour la pharmacie de demain. » « L’image du pharmacien est "brouillée", estime pour sa part l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF). Au mieux, il est décrit comme un simple "logisticien", vendeur de boîtes ; au pire, il est perçu comme un nanti faisant le jeu de la GMS ». Pour le syndicat, des évolutions sont nécessaires. « Le statu quo et la pérennisation d’un système archaïque prônés par certains ne feront qu’accentuer la mauvaise perception du pharmacien et détériorer son image auprès de ses patients », affirme-t-il.
Quoi qu’il en soit, la profession ne semble pas décidée à rester les bras croisés et entend bien poursuivre dans la voie d’un pharmacien toujours plus professionnel de santé. « Il est nécessaire de réinventer notre métier, faire du pharmacien un pharmacien clinicien et lui permettre d’exercer pleinement le métier pour lequel il a été formé », indique ainsi l’UNPF.
« Il faut faire de notre profession souvent oubliée, une profession en première ligne qui revendique son positionnement dans le système de santé et dans le parcours de soins », déclare pour sa part Gilles Bonnefond. Pour lui, la bonne stratégie est de porter un projet commun à tous les syndicats. « Nous n’avons pas de temps à perdre, le réseau perd 12 millions d’euros par mois, explique-t-il. On ne peut pas attendre 2017 ».
Le président de l’USPO veut élever le débat et ne pas se contenter de ferrailler avec la FSPF sur la question de la rémunération à la boîte, « un débat dépassé et qui n’est pas au niveau de l’ambition de notre profession ». « Cette question, bien que centrale, n’est pas prioritaire, explique-t-il. Il faut en premier lieu assurer l’avenir du réseau et l’application des nouvelles missions. » Pour Gilles Bonnefond, tout nouveau livre blanc ou rapport serait superflu, il suffit de mettre en application les conclusions tirées des précédents travaux.
Autre point qui a fortement irrité la profession à la vue de cette émission, l’idée selon laquelle le pharmacien serait « le commerçant le mieux payé de France ». La FSPF rappelle ainsi qu’en 2015, le chiffre d’affaires officinal s’est stabilisé à +0,3 %*, après les décroissances enregistrées les trois années précédentes.
Quant à la rémunération du pharmacien, devenue mixte l’an dernier, elle affiche une chute de 147 millions d’euros. Sans la mise en place de l’honoraire à la boîte de 0,80 euro, la perte se serait même élevée à 220 millions d’euros. La FSPF regrette cependant que cet honoraire n’ait pas été de 1 euro dès 2015, car cela aurait permis de limiter la perte à 116 millions d’euros.
Le syndicat souligne également que « les petites officines, celles qui assurent la proximité dans de nombreux villages et quartiers, sont en grande difficulté ». C’est la raison pour laquelle la FSPF a proposé il y a quatre mois un plan d’urgence pour soulager les trésoreries de ces pharmacies.
Après cette émission, M6 aura sans doute baissé dans l’estime des pharmaciens.
Voir également la réaction de Lucien Bennatan, président de PRG.
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