Quand le maire de Fontaine-le-Dun a traversé la place de la mairie pour annoncer aux pharmaciens que la commune allait recruter un médecin, « on a poussé un grand ouf, on était hypersoulagés », rappelle Manuel Rezulak, un des trois titulaires. Ce petit bourg de Seine-Maritime, au sud de Dieppe, a vécu une histoire banale : deux médecins et demi y soignaient les 1 000 habitants, 3 000 avec la zone de patientèle. Un premier médecin part à la retraite, la seconde quitte le bourg pour travailler avec son mari. Quant au généraliste à temps partiel, il ne se voit pas récupérer la charge des précédents, et s'en va à son tour.
La situation de Manuel Rezulak devenait préoccupante : assistant de Marie-Pierre et Dominique Goulay, en 2011, il devient leur associé en 2014, pour leur succéder à leur retraite. Mais, en janvier 2017 : « Plus de médecin ! On a développé le conseil, fait de la bobologie, expliqué aux patients qu'on pouvait soigner un rhume sans aller voir le médecin. » Une situation provisoire, à l'évidence.
Yves Lefrique est natif de Fontaine-le-Dun, il a été élu au conseil municipal en 1971, et maire depuis 1991, après deux mandats d'adjoint. « Mon rôle d'élu municipal est d'apporter le maximum de services qui correspondent aux besoins des administrés ». La commune avait acquis, en 1985, une ferme, en plein centre bourg, qu'elle a transformée en maison médicale. Un dentiste y a exercé, comme les trois médecins qui sont partis. Restent un kiné, un podologue et deux infirmières. Dans cet ensemble, se trouvent aussi une maison des associations, un pôle multiservices qui accueille des permanences de services publics et une offre informatique.
Le maire est parti en quête d'un médecin. « Nous avons été d'échec en échec pendant des mois. J'ai rencontré plus de dix médecins, le plus souvent leur femme ne voulait pas venir. » Fontaine-le-Dun est pourtant un petit bourg vivant. Cent cinquante personnes y travaillent à la sucrerie, d'autres dans d'autres emplois. La pyramide des âges est représentative, ce n'est pas une maison de retraite. Yves Lefrique y a appliqué avec conviction sa conception du rôle de l'élu. La ville compte une trentaine de commerces de proximité, dont 70 % sont locataires de la commune, qui a aussi investi dans le logement locatif.
Fontaine-le-Dun a fini par recruter Bruno Vandermeersch, un médecin généraliste de 58 ans, exerçant à Fécamp, mais qui avait acheté une maison près de Fontaine. En accord avec l'agence régionale de santé (ARS), celui-ci est devenu employé communal, il travaille 35 heures par semaine et il est rémunéré comme praticien hospitalier : « On est un petit CHU ! », s'amuse le maire.
La commune était restée sans médecin pendant dix-huit mois, jusqu'au 1er octobre 2018, quand le Dr Vandermeersch a vissé sa plaque, avec « l'impression d'avoir été attendu ! ». À Fécamp, le médecin exerçait déjà comme salarié. « Il est maître de stage, précise le maire. Des étudiants de 4e et de 9e année travaillent régulièrement au cabinet, dont une qui sera thésée en fin d'année et devrait être embauchée à temps partiel par la commune. De quoi ouvrir déjà 43 heures par semaine. » Le médecin a aussi fait acheter par la commune du matériel, et il pratique des électrocardiogrammes. Une secrétaire médicale, également employée de la commune, lui permet « de ne faire que de la médecine. C'est une façon de dégager les urgences hospitalières », estime l'élu.
« Les relations avec Bruno Vandermeersch sont excellentes, reprend Manuel Rezulak, on retrouve une dynamique. » Le confrère a même allongé les plages d'ouverture, et regrette que l'officine ne soit pas adaptée, par exemple, pour la vaccination : « Ce n'est pas nécessaire d'aller chez le médecin pour cela. » Pour le maire, « le salariat des médecins, c'est l'avenir », et aucun habitant ne s'est plaint ou a même critiqué cette embauche. D'autres élus voisins l'approuvent aussi. Le pharmacien, pour sa part, se félicite de la démarche du maire, mais « ne comprend pas que l'État laisse un maire de village aller tout seul, se retrousser les manches », pour résoudre un tel problème de santé publique.
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