DEPUIS son introduction en Italie, la carte fidélité, inventée par les pays anglo-saxons, a conquis le cœur des consommateurs et la tête des pharmaciens. Légalisée en 2006, lors de la mise en œuvre du décret sur les libéralisations, elle est une copie conforme des cartes distribuées en grande surface, permettant de fidéliser la clientèle en lui offrant des cadeaux moyennant le cumul des points. La liste des objets liés à la carte fidélité est particulièrement impressionnante. Les meilleurs clients peuvent ainsi gagner un sèche-cheveux, un aérosol ou encore une bicyclette pour la gymnastique amaigrissante. Un dérapage selon certains pharmaciens, qui jugent cette opération de pur marketing dangereuse pour l’image de marque des officines. « Le comportement des pharmaciens doit être différent de celui des commerçants ordinaires. Notre objectif n’est pas de pousser le client à la consommation tous azimuts, mais de l’orienter », estime Carla Debernardi, titulaire d’une officine familiale, tout en s’insurgeant : « nous ne sommes pas des supérettes ! »
Autre problème : le contenu de la carte de fidélité. La totalité des achats effectués par le consommateur est transcrite sur la carte. Du coup, cet instrument qui contient l’historique du parcours médicamenteux du patient, sert également de dossier pharmaceutique. Cependant, les médicaments sont exclus de la liste des produits permettant le cumul des points. Une interdiction permettant que les réductions liées aux cartes fidélité soient appliquées à l’ensemble des patients, comme le prévoit la loi en vigueur. Sur ce point d’ailleurs, l’autorité de régulation antitrust veille au grain. Déjà saisie à plusieurs reprises, la fédération des Ordres des pharmaciens italiens a toujours fait savoir qu’une violation du code de déontologie applicable à la carte de fidélité, peut entraîner des sanctions disciplinaires pour ceux qui transgresseraient les règles.
Études de marché.
Autre intérêt de cette carte, le cumul des données pharmaceutiques permet d’établir des tableaux sur l’évolution du marché. Aujourd’hui, les fabricants offrent aux pharmaciens la possibilité d’analyser les données grâce à un logiciel extrêmement sophistiqué. Moyennant toutefois une autorisation écrite du consommateur comme le prévoit le dispositif sur le respect de libertés individuelles. Un droit essentiel, unanimement reconnu en Italie, notamment par la Cour de Cassation. Mais cette pratique fait bondir plusieurs pharmaciens, à commencer par Andrea Cicconetti, membre de Federfarma Latium, l’une des fédérations régionales des pharmaciens : « Des pharmaciens peuvent être tentés de revendre leurs données aux industries pharmaceutiques. »
De l’autre coté de la barrière, les pharmaciens favorables à la carte fidélité affirment, au contraire, qu’elle permet de dresser un état des lieux du potentiel commercial des officines. Pour preuve, un dossier publié en avril dernier par « Tema Farmacia ». Dans son rapport, le mensuel des pharmaciens italiens fait état de quatre typologies de consommateurs. Dans la catégorie A, les consommateurs qui représentent 8 % de la clientèle d’une pharmacie moyenne, participent à hauteur de 30 % au chiffre d’affaires annuel, contre 28 % pour la zone B (18 % de la clientèle) et 27 % pour la catégorie C (25 %). Enfin, la zone D équivaut à 50 % de la clientèle soit 15 % du chiffre d’affaire. Mais cette étude prend en compte l’ensemble des achats effectués dans une officine, sans séparer les médicaments de la parapharmacie.
Pour l’heure, le débat reste ouvert entre les pharmaciens qui refusent la carte fidélité en se retranchant derrière la déontologie et ceux qui le qualifient d’instrument désormais indispensable pour la profession. Une affaire à suivre…
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