« J’ai choisi la pharmacie pour la compagnie des femmes, explique Jean-Louis Mautalen, titulaire à Bayonne et adepte de l’humour provocateur. En première année, il n’y avait presque que des filles, c’était le paradis ! Dans l’officine aussi, j’aime une ambiance féminine ; d’ailleurs les femmes sont bien meilleures que nous dans le métier. »
Passionné de sciences, le jeune Jean-Louis Mautalen s’oriente aussi vers la pharmacie pour le prestige de la blouse blanche : « Issu d’une famille modeste et aîné de 7 enfants, j’y voyais un moyen de grimper dans l’échelle sociale et pratiquer une profession alors prestigieuse. Un métier noble, et les nanas… pour moi, la pharmacie c’était ça ! »
Lors de ses études à la faculté de pharmacie de Bordeaux, son engouement pour les sciences ne se dément pas : « certains cours comme la biochimie moléculaire me passionnaient tellement que j’en oubliais de prendre des notes. »
« Je séchais pour aller en montagne »
Mais il est aussi un fervent alpiniste et les deux activités ne font pas toujours bon ménage : « Je séchais pas mal, pour aller en montagne, avoue-t-il. Un jour que je revenais le visage cramé par le soleil, un professeur m’a dit : il va falloir choisir. J’ai choisi, j’ai mis de l’écran total. » Il continue en effet de pratiquer la montagne à haut niveau (il a réalisé une première sur cascade de glace) jusqu’à la naissance de sa seconde fille. C’est aussi à l’université qu’il rencontre sa femme, qui est depuis sa complice en officine et dans toutes ses passions, y compris les plus échevelées.
Diplômé en 1984, Jean-Louis Mautalen entame une carrière d’adjoint au Pays basque. Très vite, il découvre que, en officine, l’économique prend le pas sur le scientifique et que son intérêt financier est de s’installer à son compte : « À l’époque les banques prêtaient, elles nous déroulaient même le tapis rouge, précise-t-il. Cela a bien changé. » En 1987, il achète une officine du quartier Saint-Léon-de-Bayonne, qu’il transférera en 2015 au cœur d’un petit centre commercial : « C’était l’âge d’or, se souvient-il. Les années Jospin-Aubry. La CMU faisait exploser notre chiffre d’affaires. Car notre métier est agité par deux forces contraires : ceux qui veulent donner des médicaments à tous, sans limite. Et ceux qui ne veulent donner que ce que le pays peut donner et mettent des contraintes budgétaires. Jospin contre Juppé. »
Parapente et aventure
C’est aussi l’époque où il découvre le parapente. Une discipline qui allie vitesse, altitude, prise de risque. Tout ce qu’il aime : « C’est une immense sensation de liberté, voler avec les goélands, les vautours, explique-t-il. Décoller, partir vers l’inconnu, se poser dans un endroit, voir les yeux émerveillés des enfants, parler avec les gens pour savoir où il y a un village, une route, faire du stop. Plus le pays est pauvre, plus chaleureux est l’accueil. »
En effet, si Jean-Louis Mautalen réalise une vingtaine de vols par an dans les Pyrénées, il plane aussi dans le monde entier avec des amis parapentistes ou lors de ses vacances : Himalaya, Brésil, Colombie, Maroc, Turquie… Il a déjà décollé du Mont-Blanc, du Toubkal (Maroc). « Partout où nous allons, il a toujours une valise pour son parapente », précise sa femme.
Une vie d’aventure car un vol en parapente peut durer plusieurs heures, monter jusqu’à 5 000 m d’altitude, parcourir des dizaines de kilomètres… « Il faut parfois plusieurs jours de marche avant de retrouver une route, dormir à la belle étoile à même le sol, explique-t-il. Même avec les ans, j’aime ça ! Quant au vol, il nécessite une bonne connaissance de l’aérologie, deviner les courants thermiques, comprendre les couleurs du sol, c’est une véritable science ! Les moments où l’on récupère un courant ascendant et où l’on comprend que le vol va se prolonger, la sensation est formidable, je hurle ! »
Jean-Louis Mautalen aime aussi l’esprit parapente : « ce sport mêle toutes les classes sociales et peut se pratiquer jusqu’à 70 ans ! »
Il s’adonne aussi au pilotage d’avions, mais pour d’autres sensations : « Là, je cherche la rigueur, explique-t-il. Comme en pharmacie, on n’a pas le droit à l’erreur, il faut une concentration maximum pour s’insérer dans le trafic aéroportuaire, par exemple. »
Enfin, Jean-Louis Mautalen est un adepte de la moto liberté. Sur sa Honda 650 Dominator, il aime parcourir l’Espagne, décidant son itinéraire à chaque carrefour.
Et Dieu, dans tout ça ?
Quand il regarde les évolutions du métier, il constate : « De façon subjective, j’ai l’impression que les clients sont moins sympas qu’avant et le travail plus difficile. Objectivement, le travail est plus complexe et nous oblige à passer du temps devant un écran au détriment du comptoir. Mais j’adore les nouvelles missions. »
Quand il se retourne sur ses passions dangereuses, il avoue : « Je fais peut-être tout ça pour épater mes parents, ma mère en particulier, qui ne m’a jamais considéré… Elle me rêvait prêtre, à tel point que je suis devenu anticlérical. Malgré cela, lors de certains vols en parapente, je ressens une telle plénitude que je ne peux m’empêcher de songer à l’existence de Dieu. »
À 63 ans, Jean-Louis Mautalen a trouvé la recette de son équilibre : les pieds bien ancrés dans son officine et la tête dans les nuages. Voire au-delà.
Comme vous l'aurez compris, ce portrait a été réalisé avant la pandémie. Le confinement n'empêche pas de rêver…
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