L’histoire de John R. Brinkley (1885-1942) commença à Beta, petite ville perdue des collines de la Caroline du Nord. Orphelin, il fut élevé dans des conditions misérables qui n’ébranlèrent pas son ambition. Après bien des vicissitudes professionnelles et familiales, Brinkley, ne pouvant réussir des études de médecine, finit par acheter un « diplôme » de l'Eclectic Medical University, une sulfureuse école de Kansas City. Cette autorisation d’exercer la médecine valant dans 8 états, Brinkley pratiqua alors en Arkansas, au Tennessee et au Kansas. Et c’est là, à Fulton, qu’il ouvrit une pharmacie. Six mois plus tard il fut élu maire de la petite ville. Conforté dans ses rêves de grandeur, il inaugura en 1917 une deuxième pharmacie, à Milford.
Les affaires de notre homme en seraient restées là si, un matin, un fermier de 46 ans, du nom de William Stittsworth ne l’avait abordé en se plaignant d'une virilité en berne. Et Brinkley de lui affirmer en plaisantant qu’il lui fallait des « glandes de bouc ». Et Stittsworth de lui répondre sans hésiter « Alors greffez-moi ces glandes ». Tout autre praticien aurait ri mais Brinkley releva le défi : le fermier fournit le bouc, et Brinkley son art ! Quelques semaines plus tard Stittsworth retrouva sa libido et suggéra à son sauveur d’œuvrer pour que sa femme puisse avoir un enfant. Un ovaire de chèvre lui fut inséré dans le bas ventre et, un an plus tard, elle donna naissance à un petit Billy… Le bouche à oreilles fit le reste. Plusieurs opérations plus tard, la réputation du charlatan était établie au Kansas au point que, dès août 1918, il ouvrit un hôpital de 50 lits et embaucha six chirurgiens pour le seconder. Le prix de l'implantation était de 750$ selon l’âge du bouc, toujours de la race du Toggenbourg : Brinkley empochait ainsi 15000$ par semaine, se contenant d’insérer dans les patients testicules ou ovaires de l’animal sans véritable greffe : les glandes finissaient par y être lysées - lorsque le patient ne décédait pas d’infection -.
Mais Brinkley alla plus loin. Il créa en 1923 la première station de radio du Kansas (KFKB pour « Kansas First Kansas Best » !) et se lança dans le diagnostic et la prescription en ondes : chaque nuit, il parlait des heures sur les troubles prostatiques, la baisse de la libido et l’infertilité, répondant au courrier des auditeurs, posant des diagnostics et concluant en vantant son opération et en recommandant les remèdes fabriqués par sa propre firme, la Milford Drug Co. Il recevait quotidiennement quelque 50000 plis et accueillait 50 patients.
Les choses tournèrent mal à partir de 1930. Un journal l’accusa d’avoir trafiqué de l’alcool durant la Prohibition mais, surtout, enquêta et découvrit qu’il n’était pas médecin. Il fut jugé pour fraude et charlatanisme. Aux dizaines de témoignages favorables s’opposèrent des médecins qui prouvèrent que plus de 40 patients étaient décédés. Finalement, Brinkley fut contraint de ne plus pratiquer la médecine au Kansas, et sa radio fut interdite. Il engagea des chirurgiens pour poursuivre les opérations et fit appel de la décision. S’étant présenté à l’investiture pour devenir gouverneur du Kansas, il fut battu mais obtint cependant 30% des suffrages. Sa fortune lui permit de construire une station radio à Villa Acuna, cité mexicaine jouxtant la frontière du Texas : sa puissance était telle qu’elle émettait jusqu’au Canada !
Brinkley s’installa au Texas et y reprit ses opérations. Finalement, accusé par un médecin, Morris Fishbein (1889-1976), il fut poursuivi par le gouvernement fédéral, condamné à payer des millions de dollars pour fraude et fit faillite en 1941. Diabétique, insuffisant cardiaque, Brinkley, amputé d’une jambe, décéda à 56 ans dans la plus totale misère, laissant derrière lui en héritage plus de 5000 implantations de testicules de bouc à des hommes en quête d’une jeunesse éternelle…
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