Vingt ans après
Original, Scott Turow ? Son initiative de reprendre le héros qui, dans « Présumé innocent », a fait de lui le pape du thriller juridique, et d’en donner une suite à partir des mêmes données, est en tout cas osée ! Les amateurs se souviennent de son roman paru il y a vingt ans – dans lequel s’affrontaient le procureur Sabich, accusé d’avoir assassiné son ex-maîtresse, et son collègue Tommy Molto –, qui a fait de cet avocat un écrivain traduit dans plus de vingt langues. Dans « Innocent toujours » (1), le procureur, maintenant âgé de 60 ans, est juge à la cour d’appel et se porte candidat à la Cour suprême... Jusqu’au matin où il découvre son épouse morte à ses côtés. Le voilà donc, après avoir été innocenté une première fois, de nouveau confronté aux accusations et à la persécution de son adversaire de toujours. Croyez-le si vous voulez, en partant de bases identiques, Scott Turow est parvenu à imaginer un imbroglio judiciaire et humain qui ménage « toujours » le suspense !
« Fiction documentée »
Signé Denis Alamercery, « Opération Goliath » (2) inaugure une collection, « Fiction documentée », qui propose une nouvelle manière d’aborder des sujets d’actualité. Le livre est ainsi constitué de deux parties : une fiction inédite et un cahier documentaire rédigé par un spécialiste. Le thème de ce premier titre est le terrorisme issu des réseaux cachés d’extrême-droite. Le récit met en scène un ancien commando de l’armée française et vétéran de la guerre du Golfe ; alors qu’il partage maintenant son temps entre les filles, l’alcool et la coke, il est forcé de se plonger au cœur des réseaux mafieux et néonazis déterminés à bouleverser l’ordre international. Après avoir suivi notre antihéros dans une spirale de rebondissements d’où l’humour n’est pas absent, on revient, via le cahier documentaire rédigé par Christine Revert-Charles, à la réalité des réseaux néonazis aux États-Unis.
Mélange des genres
Même si l’on trouve la charge de R. J. Ellory développée dans « les Anonymes » (3) un peu trop accentuée – en l’occurrence une dénonciation de la CIA et ses méthodes systématiquement dévoyées –, on ne peut que saluer l’intelligence de ce gros roman captivant de bout en bout. Après « Seul le silence » et « Vendetta », ses deux seuls ouvrages jusque-là traduits en français, l’écrivain anglais confirme ainsi son talent. L’histoire commence comme une banale enquête après le meurtre d’une femme à Washington. S’intensifie lorsque l’inspecteur – désabusé mais intègre – relie le crime à trois autres affaires. Et se complique encore quand il découvre que les victimes vivaient sous une fausse identité. Le récit policier se double ainsi d’un roman d’espionnage et d’un thriller politique. C’est extrêmement bien fait et bien écrit.
Entre réalité et fiction
Dans la même veine, « Cinq Cubains à Miami » (4), du Français Maurice Lemoine, ancien rédacteur en chef du « Monde diplomatique », raconte, en mêlant le réel et la fiction, la guerre secrète qui confronte Cuba et ses opposants en exil, en même temps qu’il lève le voile sur l’un des scandales judiciaires majeurs de notre temps. Le prétexte en est l’exil en Floride, dans le début des années 1990 et à l’instigation des services de renseignements de Cuba, de cinq jeunes gens chargés d’infiltrer les réseaux criminels afin de découvrir qui est à l’origine d’opérations terroristes menées dans l’île depuis le territoire américain, visant Fidel Castro et le régime. Après avoir communiqué leurs informations à La Havane qui les a transmises au FBI, les espions se retrouveront condamnés, au terme d’un procès ubuesque, à des peines démesurées pour avoir « espionné les États-Unis ».
Le début d’une trilogie
Espionnage encore avec le premier volet d’une trilogie signé Jon Stock, « Hors d’haleine » (5), dont l’adaptation cinématographique, nous dit-on, « promet d’être l’un des plus gros budgets de la Warner » ! C’est au pas de course que se déroule l’histoire, dont le nœud est un attentat contre l’ambassadeur américain à l’occasion du marathon de Londres, auquel il participe. Dans la foule des coureurs se trouve un ex-agent du MI6, évincé après que son père, qui était directeur du service de renseignements, a été soupçonné de trahison. En voulant sauver son honneur et sa réputation, il se retrouvera mêlé à un complot politique international.
À la rencontre du mal
S’il revient au thriller après le succès de sa trilogie fantastique « Autre-Monde », Maxime Chattam reste dans la même lignée, puisque, dans « Léviatemps » (6), qui se situe à Paris en 1900, les progrès de la science nourrissent la folie des âmes perdues en quête d’éternité. Le héros est un romancier à succès qui a tout plaqué pour se lancer dans un roman policier qui le plongerait dans les bas-fonds de la civilisation. L’assassinat d’une jeune prostituée et l’enquête qu’il va mener et qui le conduira des cercles ésotériques de la capitale aux démesures de l’Exposition universelle, vont le confronter à son Léviathan d’ombres.
Un conte moral
Autre personnage qui se lance dans une enquête improbable, le héros d’ « American Subversive » (7), un journaliste qui, quatre jours après l’explosion d’une bombe dans une tour de bureaux de Manhattan, reçoit la photo d’une jeune femme et un e-mail anonyme, la désignant comme la responsable de l’attentat. Lui-même journaliste à l’origine, David Goodwillie nous entraîne dans une enquête à multiples facettes dans les pas d’un groupe de terroristes partisans d’une écologie radicale, des jeunes Américains moyens dégoûtés par l’inertie collective et prêts à tout pour changer le monde. Un conte moral réaliste et non dénué d’humour.
(2) Les Carnets de l’info, 302 p., 19 euros.
(3) Sonatine, 689 p., 22 euros.
(4) Don Quichotte Éditions, 1049 p., 24 euros.
(5) Albin Michel, 443 p., 22 euros.
(6) Fleuve Noir, 353 p., 18,90 euros.
(7) Éditions Florent Massot, 490 p., 20,50 euros.
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