Ce qui a conduit M. Abad à cette suggestion extraordinaire, c'est qu'il est convaincu qu'au terme d'une inéluctable négociation, le gouvernement finira par renoncer à la prolongation des carrières. Il agit en fonction de sa propre logique que l'on a bien du mal à partager : si les syndicats – y compris la CFDT, considérée comme une organisation réformiste, exaspérée par le projet qu'à présenté le Premier ministre, Édouard Philippe – refusent tous que la date de départ soit repoussée, cela devrait signifier pourtant qu'ils n'adhèreront guère à la géniale proposition de M. Abad. C'est toute la différence entre le « dire » et le « faire ». M. Abad peut imaginer toutes les alternatives possibles ; pour le moment, c'est bien le pouvoir qui annonce la réforme et qui en supporte les conséquences. La droite ne voit dans cette affaire qu'une occasion politique d'affaiblir l'exécutif à la veille des élections municipales. Mais c'est la stabilité du pays qui est en jeu et, si la droite sort de son chapeau un âge de départ repoussé d'un an, croit-elle vraiment que les manifestants rentreront aussitôt chez eux ?
La vérité est ailleurs. Qu'on le veuille ou non et sans épargner le gouvernement pour ses terribles erreurs de communication et une lenteur dans l'action qui ressemble à de la procrastination pure et simple, le chef du gouvernement a eu le courage de présenter enfin, et dans le détail, son système à points. Puis, les ministres se sont lancés dans une campagne de persuasion qui n'a pas eu à ce jour les résultats escomptés. Mais qu'on fasse au pouvoir le procès du genre « on peut faire mieux et plus à droite », là les Républicains jettent de l'essence sur l'incendie. Contribution peu glorieuse à l'apaisement d'une crise qui ne peut venir, en fait, que de la négociation. Aussi bien le gouvernement, à plusieurs reprises, a-t-il lancé un appel au dialogue avec les syndicats : ils sont porteurs de la contestation, ils sont les partenaires naturels de l'exécutif. M. Philippe a déjà pris quelques rendez-vous.
L'heure de Berger.
On sait exactement ce qu'espère le gouvernement : que Laurent Berger, chef de la CFDT, finisse par accepter de parlementer après avoir fait sa crise de (très) mauvaise humeur. Peut-être est-il encore trop tôt. Mais nos dirigeants savent que le mécontentement populaire ne se retournera pas forcément contre les manifestants et les grévistes. Ils craignent d'être les victimes d'une opinion qui, à 50 %, estime que tout ça, c'est la faute du gouvernement. En outre, la complexité du système alternatif proposé par le Premier ministre ne favorise pas les interprétations positives. Le fond de l'affaire, comme toujours en France, c'est que le peuple préfère ce qu'il a et dont il est sûr à un autre modèle inconnu qui risque de lui coûter cher.
Et pourtant, le système à points et le report de la date de départ apportent des garanties aux futurs retraités. Pas de pension inférieure à 1 000 euros par mois (très important pour les petits agriculteurs), et les femmes seront mieux protégées ainsi que tous les travailleurs dont les carrières sont hachées, en ces temps si difficiles. Non, ce n'est pas une réforme de droite, ce n'est pas une réforme vraiment à gauche, mais c'en est une, de réforme, et elle est éminemment macronienne. En dépit du chaos social qui règne dans le pays, et de ses conséquences extrêmement négatives, dans quelques jours, un ou deux syndicats seront prêts à négocier. Le gouvernement a déjà fait savoir qu'il est d'accord pour discuter de chacun des points considérés comme inacceptables, qu'il est prêt à lâcher des concessions. Il peut par exemple, sur l'âge de départ, accepter de mettre en œuvre un système plus lent. Ce pourrait être la porte de sortie, tant il est vrai qu'il ne doit y avoir, au terme de cette crise, ni perdants ni gagnants.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion