Éternel questionnement pour tout professionnel de santé et toute équipe soignante confrontés aux soins à procurer aux personnes âgées : à partir de quels critères déplacer le curseur entre ces deux postures que sont soigner et prendre soin ? Alors que le cure recourt au savoir-faire par lequel le professionnel met en œuvre ses compétences techniques de manière ciblée, le care fait appel à son savoir-être, acquis au fil des années et prenant en compte la personne en son entièreté.
Cette question commence depuis quelques années à préoccuper d’autres catégories professionnelles et gagne aujourd’hui l’ensemble de notre société. Pour preuve, une députée néerlandaise qui s’interroge sur la légitimité de traitements lourds pour les plus de 70 ans. D’où de vives réactions. Différentes raisons peuvent être avancées : allongement de la durée de vie, augmentation globale des dépenses de santé, peur de discrimination sociale voire d’abandon à l’égard des plus âgés comme des plus pauvres, déni collectif du vieillissement, attentes diverses des familles… Mais il est un point sur lequel certains experts tirent la sonnette d’alarme : après des années de croissance et de découvertes médicales et pharmacologiques, n’est-il pas temps de quitter un modèle biomédical exclusif qui a entretenu à souhait la confusion entre vieillissement et maladie ? N’est-ce pas le moment de changer de regard sur les dernières années de nos vies pour passer d’une surmédicalisation délétère, tant pour les personnes que nos finances publiques, à une attention prioritaire à la qualité de vie de chacun ?
Il faut ici rappeler que la « logique Alzheimer », pour reprendre l’expression du Pr Olivier Saint-Jean et d’Éric Favereau dans leur livre « Alzheimer, le grand leurre », a participé grandement à ce dérapage : on en est venu à « enfermer la vieillesse dans la maladie », avec l’effet pervers de marginalisation des aînés. Notre société s’est, pendant des années, donné bonne conscience en surmédicamentant ceux-ci, tout en demandant aux professionnels de santé de ne pas être trop regardant sur les conséquences d’un tel choix. Aujourd’hui nombreux sont ceux qui s’interrogent sur la pertinence de traitements lourds, contraignants, sources d’iatrogénie, voire inadaptés. Jusqu’où faut-il soigner ? À partir de quand privilégier « le prendre soin » ?
En nous faisant croire que les dernières années de nos vies ne sont que pathologiques, en faisant de larges concessions à tous ceux qui considèrent que la dépendance est d’abord une affaire de marché rentable, notre système de santé vis-à-vis des aînés n’est-il pas devenu à son tour malade ? Bien sûr qu’au niveau de la santé des individus, il existe des inégalités, notamment en fonction de leur parcours de vie, d’où le devoir de soigner tout patient âgé comme les autres. Mais comment ce système peut-il développer d’autres stratégies pour aller dans le sens d’un « vieillissement réussi ». N’a-t-il pas intérêt à s’enrichir de tout ce que les sciences humaines et sociales nous ont appris depuis plusieurs années afin de soutenir tout désir de vivre ? Quant au simple regard porté sur chaque personne, n’oublions pas qu’il peut entraîner son bonheur ou son malheur !
Le pharmacien peut jouer un rôle important dans tous ces questionnements, aux côtés d’autres professionnels : en s’investissant entre autres dans le bilan partagé de médication, il participera à un véritable système qui prend à cœur le patient. Par sa compétence, son souci du respect des personnes et de leur entourage, il est un de ceux qui peuvent s’interroger sur le bien-fondé des traitements, en termes de gain de qualité de vie au milieu des autres.
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