Humeur

Citoyen éploré

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Publié le 14/02/2019
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Vous savez, je ne suis pas insensible. Je comprends tout. Je comprends que les gilets jaunes expriment leur mécontentement tous les samedis ; je comprends que les auto-écoles bloquent Paris ; je comprends la grève de la SNCF qui a duré plus de trois mois ; je comprends la colère des salariés virés à la suite d'une fusion d'entreprises ; je comprends les routiers sympa qui empêchent l'approvisionnement des stations-services. Je les comprends tous, mais je me demande quand même pourquoi ils s'acharnent contre moi. De même que des universitaires ont créé une association, « les économistes atterrés », pour nous proposer une autre façon de gérer le pays, je voudrais en faire une autre que j'appellerai « les citoyens éplorés ». Elle regrouperait les victimes directes des conflits sociaux, ceux qui vont plus rarement à leur bureau, ceux qui hésitent à sortir pour dîner en ville, ceux à qui on réclame un gilet jaune comme passeport, ceux dont on a cassé la vitrine, ceux qui ne donnent jamais leur opinion mais n'en pensent pas moins. Eux aussi, je les comprends. Comme moi, ils sont pleins de compassion pour les déshérités. Mais ils en ont marre.

Richard Liscia

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3495