« Décision absurde », « méthode de voyous », échanges vifs, pétition, réunion de concertation qui tourne court… L’annonce, en mai dernier, de la fermeture de la pharmacie mutualiste de Fumel a mis le feu aux poudres. Élus, syndicalistes, patients ont pris cette décision comme un nouveau coup dur infligé à une ville qui n’en avait pas besoin. D’autant que la vie de cette officine épouse les courbes heureuses, puis dramatiques de l’économie locale.
Symbole des années où l’usine sidérurgique employait ici jusqu’à 3 500 personnes, la pharmacie a vu le jour en 1949. Créée par la mutuelle des salariés du complexe industriel, elle en a vécu l’apogée puis toutes les vicissitudes : plans sociaux, reprises et fermeture définitive. Faute de salariés, la mutuelle a fini par rendre l’âme, et sa pharmacie a été reprise en 2007 par la Mutualité française du Lot-et-Garonne.
Aussi, l’annonce de sa fermeture et du licenciement de ses 6 salariés, a été ressentie comme un nouveau coup de couteau dans la plaie, toujours à vif, d’une ville blessée par sa débâcle industrielle.
Désertification médicale
Certains ont voulu parier sur l’installation, en 2020, d’une maison de santé à proximité de la pharmacie mutualiste, pour envisager son sauvetage. Mais cette MSP n’enregistre l’arrivée d’aucun nouveau médecin capable d’endiguer le départ à la retraite imminent de plusieurs généralistes fumélois.
Dans ce contexte marqué par le marasme économique et démographique, la désertification médicale, la baisse des marges et la présence de 4 officines libérales (pour 4 900 habitants), la pharmacie mutualiste ne pouvait résister : « Depuis une décennie, nous subissons des pertes de chiffre d’affaires et de marge conséquentes, la pharmacie était en difficulté*, explique Valérie Legrand, directrice générale de la Mutualité française Lot-et-Garonne. Je comprends qu’on s’enflamme, mais même mutualistes, nous avons des équilibres à tenir, surtout pour nos autres centres (dentaires, optiques, audition…) du département qui nécessitent des investissements. »
La page est tournée
Les pharmaciens libéraux fumélois, eux, ont très mal vécu cette période. Tenus à l’écart des concertations, ils ont ressenti comme du mépris le soutien des élus à une officine mutualiste qui contribuait à déstabiliser un marché avec déjà trop de pharmacies. Dans une lettre au président de la communauté de communes, ces quatre officines libérales rappelaient : « Nous ne pouvons pas déplorer la fermeture de nos confrères mutualistes, qui ne paient pas d’impôts ni de taxes et n’assument pas les gardes, dans un contexte de baisse de rémunération des médicaments, des prestations de santé, et donc de notre marge, dans un désert médical où le patient lutte pour obtenir une prescription médicale. Nous bénéficierons tous de la répartition de leur patientèle dans nos officines… »
« Ces libéraux ont raison ! souligne Valérie Legrand, ravie de trouver en eux des alliés. Les élus ont fait comme s’ils n’existaient pas. » La Mutualité française du Lot-et-Garonne a d’ailleurs contacté les officines du territoire pour replacer les personnels de sa pharmacie fuméloise : « Sur nos 6 salariés, une pharmacienne et deux préparatrices ont déjà été reprises, précise Valérie Legrand. Une pharmacienne est en préretraite ; seules une préparatrice et une rayonniste n’ont pas encore retrouvé d’emploi. »
La pharmacie mutualiste de Fumel a définitivement tiré le rideau le 22 août. La tempête est retombée. En privé, certains élus, il y a quelques mois très virulents, affirment que, bien que négative pour l’image de leur ville, la fermeture de cette pharmacie était pleinement justifiée. La page est tournée.
* 370 000 euros de pertes financières.
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