Des nuisances écologiques qui mettent en danger la biodiversité

Ces plantes exotiques envahissantes et menaçantes

Publié le 18/03/2010
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L’Institut Klorane, fondation d’entreprise créée en 1994 pour la protection et la bonne utilisation du patrimoine végétal, poursuit son engagement en 2010 dans le cadre de l’année internationale de la diversité biologique. Il met en place, en partenariat avec les pharmaciens d’officine, les conservatoires et les jardins botaniques, une action pédagogique sur le thème « Plantes exotiques envahissantes, espèces à surveiller pour préserver notre biodiversité ».

IL NE FAUT PAS CONFONDRE plante exotique envahissante et plante envahissante. En effet, certaines espèces indigènes sont envahissantes comme les ronces ou les orties, sans causer de dommages écologiques irréversibles. Une plante exotique envahissante, dite encore invasive, est une espèce végétale d’origine étrangère qui a été introduite en dehors de son aire naturelle, de façon volontaire (à des fins économiques, ornementales ou agricoles) ou accidentelle (transports, échanges commerciaux), et qui présente une capacité d’adaptation et de multiplication importante. Sa prolifération dans la zone introduite peut mettre en péril la flore indigène (ou autochtone) et avoir des conséquences négatives sur l’écosystème, la santé humaine et l’économie.

En France, on peut retrouver ces plantes dans les parcs, aux bords des routes, dans les cours d’eau ou encore les espaces ruraux. « Heureusement, toutes les espèces ne sont pas envahissantes, rassure Enora Leblay (chargée de mission à la Fédération des conservatoires botaniques nationaux). On estime que sur 100 espèces, dix vont se naturaliser (s’acclimater) et trouver leur place naturellement, comme cela fut le cas pour la pomme de terre et la tomate, seulement une seule va devenir problématique et avoir un impact négatif sur la biodiversité, c’est la règle des dix. Il existe parfois une période de latence plus ou moins longue pour qu’une plante exotique passe de la catégorie non envahissante à envahissante et vice-versa, en fonction de sa localisation géographique (à l’intérieur même de l’Hexagone) et de son degré de prolifération. »

Il est difficile de dresser un portrait-robot de la plante invasive mais il existe certains traits biologiques, comme une reproduction végétative rapide, une production prolifique de graines facilement dispersées par le vent ou l’eau, l’absence de parasites ou de prédateurs naturels dans la région d’accueil, une compétitivité importante vis-à-vis des espèces indigènes ou un écosystème préalablement perturbé par les activités humaines.

Des nuisances aux conséquences lourdes.

Au premier rang des conséquences écologiques dues à ces plantes, les plus inquiétantes sont la diminution de la biodiversité, le déséquilibre des écosystèmes et l’uniformisation des paysages. En proliférant, ces espèces captent la lumière, l’humidité, l’oxygène, et les nutriments au détriment des plantes locales qui sont menacées de disparition. Par voie de conséquence, on assiste à la disparition de certains animaux, poissons, ou insectes qui ne peuvent plus se nourrir correctement. La composition de certains milieux (sol, eau) est modifiée, en particulier la faune et la flore aquatique. Certaines espèces (Renouée du Japon, Jussies) entravent les réservoirs d’eau, limitent les écoulements d’eau, avec des risques d’inondation et une gêne pour certaines activités comme la pêche, la baignade, la navigation ; d’autres produisent des substances toxiques pour le bétail et les équidés (Séneçon du Cap).

Leur impact sur la santé de l’homme n’est pas non plus négligeable et on connaît les allergies (pollinoses) causées par l’Ambroisie ou les réactions de phototoxicité provoquées par la Berce du Caucase. L’impact économique intègre des coûts directs engagés par la lutte et la destruction de ces espèces, et indirects dus à la restauration des zones envahies, la diminution des rendements agricoles et de la valeur des pâturages.

Les gestes écocitoyens.

La prévention pour une gestion durable de l’environnement rejoint la philosophie de l’Institut Klorane dont les trois missions majeures sont : conserver et protéger le patrimoine végétal, éduquer, informer et soutenir. Ces démarches visent à communiquer sur les risques encourus, sur les actions à entreprendre en présence de ces espèces, et l’importance de se renseigner sur l’origine et la nature des plantes exotiques ou étrangères avant de les acheter ou de les introduire dans son environnement. Il faut apprendre à gérer les déchets verts y compris pour les plantes d’aquarium (filtrer l’eau avant de la jeter), et prévenir les services compétents de la région lorsqu’un (nouveau) foyer est repéré. En revanche, il ne faut pas vouloir régler le problème seul en arrachant une plante exotique nuisible au risque de la propager, ou utiliser des herbicides susceptibles de détruire les autres végétaux présents.

L’introduction des plantes exotiques dans le territoire français est interdite (article L411-3 du Code de l’Environnement) mais l’application de cette loi reste délicate car les contrôles et la surveillance sont difficiles. Certains départements prennent des dispositions au cas par cas (Jussie, Ambroisie). En 2010, pour sensibiliser le plus grand nombre, l’Institut Klorane édite une brochure grand public, et, au niveau scolaire, il distribue un guide pédagogique et des posters, et mène avec les plus jeunes une action de lutte symbolique sur le terrain.

D’après une conférence de l’Institut Klorane.
CHRISTINE NICOLET

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2734