Les officines de la région parisienne, mais aussi de nombreuses autres dans l'Hexagone, ont connu un été particulièrement chaud, et pas uniquement à cause des températures caniculaires observées. Pas moins de douze cambriolages, dont huit entre le 19 et le 25 août, ont été enregistrés en Ile-de-France au cours du mois passé.
Une ampleur « inédite » que l'on commençait tout juste à percevoir lors de la publication de l'Observatoire des agressions, fin juillet. L'Ordre faisait alors état d'une augmentation de 58 % des déclarations d'agressions en comparaison de l'an dernier (lire ci-dessous). Caisses vidées de leur contenu, vols de produits de substitution aux opiacés, vitrines brisées… Réussies ou non, ces attaques ne sont pas sans conséquence sur l'équipe officinale, qui reste souvent très marquée par ces événements. Le phénomène ne doit surtout pas être banalisé pour Renaud Nadjahi, président de l'Union régionale des professionnels de santé (URPS) d'Ile-de-France : « Les butins sont généralement très faibles mais le plus problématique est le stress que cela génère sur les pharmaciens victimes de ces événements. Un sentiment de malaise et de méfiance s'installe et c'est inacceptable. » Quasi exclusivement nocturnes, ces cambriolages répétés s'expliqueraient surtout par « le fait que les voleurs voient en l'officinal un professionnel aisé financièrement qui laisserait des sommes conséquentes dans son tiroir-caisse ». Les braqueurs d'officine n'auraient pas du tout saisi que, aujourd'hui, « la quasi-totalité des transactions sont réalisées par cartes bancaires et Vitale ». Une « méconnaissance », notamment chez certaines bandes organisées, qui espèrent bien trouver derrière le comptoir un véritable trésor. Or les sommes dérobées dépassent rarement les 500 euros…
Pas de « solution miracle » pour éviter les intrusions
Pour cet officinal de Saint-Rémy-les-Chevreuse, dont la pharmacie a été « visitée » quatre fois en quinze ans, ces cambriolages sont tout simplement « consternants ». L'installation de caméras de vidéosurveillance, d'une alarme et de verre sécurit n’aura pas suffi à dissuader les cambrioleurs qui, en juillet dernier, sont allés jusqu'à dérober les « centimes présents dans le fond de caisse ». Aucune « solution miracle » n'existe pour Renaud Nadjahi, par ailleurs président de la section des Yvelines de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO). « Si l'alarme me semble absolument obligatoire, de même que les caméras de vidéo surveillance, d'autres moyens, comme les gaz lacrymogènes, peuvent entraîner plus de désagréments qu'autre chose », estime-t-il. S'il évolue aujourd'hui dans un cadre plutôt serein et sécurisé à Rambouillet, sa précédente pharmacie avait fait l'objet d'une vingtaine de visites nocturnes imprévues, malgré ce moyen censé être dissuasif. « Au lieu d'empêcher l'intrus de se servir dans la caisse, l'odeur du gaz lacrymogène a embaumé l'officine pendant 15 jours. » Des conditions pas idéales pour reprendre son activité et accueillir les clients. Certaines autres conséquences sont tout aussi fâcheuses : « Quand un cambrioleur coupe l'électricité et qu'on perd tous les médicaments entreposés au frigo, les dégâts sont forcément très importants. » Sans parler des conséquences financières induites par la dégradation d'une vitrine, d'un rideau métallique, ou d'autres dispositifs coûteux présents dans ou devant l'officine. « De toute façon, il n'existe pas de solution miracle, on ne va pas se barricader ni transformer l'officine en blockhaus », rappelle-t-il, mettant par ailleurs en garde chacun face aux offres « mirobolantes » proposées par certaines sociétés qui promettent « monts et merveilles » sans aucune garantie de résultat.
L'Ile-de-France n'est pas la seule visée
De même que les petites pharmacies ne semblent pas plus vulnérables que les grandes, aucune région française ne semble être totalement épargnée. Cambriolages en Bretagne, notamment dans le Morbihan, mais aussi dans l'Est du pays, dans les Bouches-du-Rhône, dans la Sarthe… En Ile-de-France, ces événements semblent souvent le fait de mineurs non-accompagnés. « Il s'agit peut-être d'une équipe qui opère en ce moment et vise surtout les pharmacies », suppose Yann Bastière, référent national investigation du syndicat Unité SGP-Police et ancien des « stups ». Des mineurs sûrement pilotés directement par des caïds, qui se contentent, ensuite, de récupérer la « recette ». Impossible après de poursuivre ces jeunes individus âgés de moins de 18 ans, qui sont parfois toxicomanes ou agissent alcoolisés. Yann Bastière et son organisation ne sont pas encore en mesure de quantifier le phénomène sur le plan national mais ils commencent à « collecter les remontées ». Ailleurs en France, comme à Montpellier par exemple, ces jeunes se concentreraient plus sur « le trafic de stupéfiants ou les violences ». En Ile-de-France, ils cibleraient donc intensément les pharmacies ces dernières semaines, mais il est encore trop tôt pour savoir précisément pour quelle raison précise.
Suivis jusqu'au domicile
Autre comportement très inquiétant, même s'il reste encore très rare, certains voleurs n'hésitent pas à suivre, en voiture, des officinaux qui regagnent leur domicile au retour d'une nuit de garde, parfois jusque devant chez eux. « Des signalements de ce type m'ont été rapportés », confirme en effet Renaud Nadjahi, inquiet face à ces cas extrêmes. « Ils changeront peut-être de cibles au vu des montants dérisoires rapportés », tente-t-il de rassurer, estimant que, à sa connaissance, c'est surtout l'argent qui est ciblé et non les médicaments. Il espère donc, dans les semaines à venir, une diminution de ces méfaits. Renaud Nadjahi et l'URPS régional, ont récemment envoyé un document par mail, résumant quelques recommandations essentielles à ses confrères et consœurs franciliens pour les appeler à la plus grande vigilance. Notamment en leur rappelant l'existence d'un numéro d'urgence, qui permet d'entrer directement en contact avec la police ou la gendarmerie en cas de suspicion ou d'attaque manifeste.
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