Jusqu’à présent, les jeunes diplômés souhaitant s'installer pouvaient compléter leur apport par le soutien de pharmaciens investisseurs, par un booster d’apport via un groupement, ou encore par un prêt obligataire auprès du fonds d’investissement de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP). Une nouvelle solution vient d’être apportée à la transmission d’officines et à la transition générationnelle – le nombre de titulaires de plus de 60 ans a doublé au cours des dix dernières années —. Au cours de l'été, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) ont lancé PharmEquity en coopération avec Interfimo.
Ce dispositif destiné à renforcer les fonds propres de tout candidat à l’installation repose sur le principe du crowdequity (1). Ainsi, tout titulaire peut choisir de placer son épargne (minimum10 000/20 000 euros) en prenant des parts dans un ou plusieurs (maximum quatre) projets de jeunes repreneurs présentés sur la plateforme www.pharmequity.fr. Tous les projets mis en ligne ont été validés par Interfimo qui leur a délivré un accord de crédit. Il en coûtera au repreneur une commission fixe de 5 000 euros et un prélèvement de 7 % sur la levée de fonds. Quant à l’investisseur, son inscription sur la plateforme est gratuite. Une contribution lui sera demandée en cas de souscription : 4 % pour les adhérents de la FSPF et de l’UNPF, 5 % pour les autres titulaires.
Aucune ingérence
Dans ce « Monopoly » de la pharmacie, les règles sont simples. L’investisseur ne doit pas exercer dans la même région, une distance de 100 kilomètres doit même être respectée entre les deux partenaires. Car le titulaire investisseur – qui s’interdit de participer au capital de pharmacies proches du projet du repreneur — est un sleeping partner. En un mot, aucune caution bancaire ne lui est demandée et il n’a d’autres contraintes que de parapher au début du partenariat un pacte d’associé qui régira les relations entre les deux pharmaciens. En aucune façon, le titulaire investisseur ne pourra s’ingérer dans la gestion de l’officine, à l’exception des décisions majeures (adhésion à un groupement, investissement supérieur à 30 000 euros…) pour lesquelles son accord sera requis. Un reporting semestriel allégé (évolution du chiffre d’affaires, nombre de clients/jour, marge, stocks…) lui sera fourni deux fois par an.
Quant au jeune repreneur, qui pourra développer son officine en toute indépendance, il n’aura aucun dividende à verser durant la phase de désendettement. Un aspect majeur quand on sait combien les remboursements grèvent la rémunération des jeunes titulaires dans les premières années de leur exercice. Le jeune titulaire devra donc faire face uniquement à ses emprunts bancaires. Ce n’est qu’entre la huitième et treizième année que la sortie de l’investisseur pourra être envisagée. « On estime en effet que passé ce délai, l’entreprise officinale est assez mature pour permettre au titulaire d’obtenir un prêt bancaire afin de racheter les parts de l’investisseur », expose Luc Fialletout, président du comité PharmEquity. Il précise que le prix des parts sera déterminé par les fonds propres de la société. Leur valorisation sera uniquement liée au désendettement de la société. « Le rendement de ce placement est spectaculaire, il est de l’ordre de 14 %, voire 15 % ! Sans compter qu’il est assorti d’une fiscalité attractive à la sortie (2) », affirme Luc Fialletout. Autre point fort de PharmEquity, contrairement à d’autres modes de financement, la plus-value sur le fonds reviendra uniquement au « jeune » pharmacien.
Le concept mis en place par la profession pour la profession sera prochainement présenté dans les facultés de pharmacie. Compte tenu du potentiel d’épargne des 27 000 titulaires exerçant actuellement, Interfimo et les deux syndicats ont toutes les raisons d’être optimistes. La relève peut être assurée.
(1) Principe reposant sur le modèle du crowdfunding, ou financement participatif, qui consiste à lever des fonds pour financer des TPE/PME.
(2) Selon les situations : Prélèvement forfaitaire unique (PFU) 30 %, prélèvements sociaux (Plan épargne en actions) ou 4 % (titres de participation) pour SPFPL. À noter 25 % de déductions fiscales à l’entrée (loi Madelin).